L’illustration politique de Manu Scordia

Manu Scordia est un dessinateur engagé, issue d’une famille militante, qui traque toutes les injustices avec ses crayons et ses feutres : « Je vois le dessin comme un outil et un médium de sensibilisation politique ». BD, illus pour la presse associative ou affiches pour des activistes, sa palette est large mais suit un fil rouge : « Mon travail s’axe autour de la dénonciation du racisme d’État, ce racisme structurel dans la continuité des dominations coloniales et des pillages du sud ». Il prépare d’ailleurs actuellement une BD qui revient sur l’affaire Mawda dont il avait déjà signé le portait devenu iconique au cours de la mobilisation. Mais point de place à la résignation : « Dans mes dessins, on retrouve souvent l’idée de ces systèmes implacables, de ces dominations qui nous écrasent, et qui nous rendent, nous individu, assez démunis. Et en même temps, je mets toujours en avant, l’espoir et la possibilité d’une résistance par la lutte collective. »

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Le « Onze de l’indépendance » ou la katiba sportive du FLN

Au printemps 58, la contre-guérilla menée par l’armée française contre les insurgés algériens cause d’importantes pertes au sein du Front de Libération Nationale (FLN), l’organisation politico-militaire qui lutte pour l’indépendance de l’Algérie. La libération du pays est alors plus qu’incertaine d’autant que le mouvement est traversé par un conflit interne sanglant

Encore marquée par les exactions des troupes parachutistes lors de la Bataille d’Alger, de janvier à octobre 57, les premiers mois de l’année 58 sont durs pour la branche armée du FLN dont plusieurs katibas ont aussi été vaincues aux abords des frontières. Les assassinats et disparitions se multiplient, sans parler du recours systématique à la torture contre les personnes arrêtées. La Question du journaliste et militant communiste Henri Alleg, justement écrit pour témoigner de la torture, est immédiatement censuré à sa sortie. Dans la même période, en métropole comme en Algérie, la rivalité pour le leadership de la lutte indépendantiste se solde par de nombreux règlements de compte meurtriers entre le FLN et le Mouvement National Algérien (MNA) de Messali Hadj. Le FLN qui, suite au Congrès de la Soummam en août 1956, s’est doté de structures étudiantes et ouvrières à sa botte, viendra à bout des messalistes et imposera sa ligne.

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L’Algérie face aux tortionnaires français par Frantz Fanon

Texte de Frantz Fanon publié dans El Moudjahid, N° 10, septembre 1957

La Révolution algérienne, par l’inspiration profondément humaine qui l’anime et son culte passionné de la liberté, procède depuis trois ans à la destruction méthodique d’un certain nombre de mystifications.

Certes, la Révolution algérienne restitue ses droits à l’existence nationale. Certes, elle témoigne de la volonté du peuple. Mais l’intérêt et la valeur de notre Révolution résident dans le message dont elle est porteuse.

Les pratiques authentiquement monstrueuses qui sont apparues depuis le 1er novembre 1954 étonnent surtout par leur généralisation… En réalité, l’attitude des troupes françaises en Algérie se situe dans une structure de domination policière, de racisme systématique, de déshumanisation poursuivie de façon rationnelle. La torture est inhérente à l’ensemble colonialiste.

La Révolution algérienne, en se proposant la libération du territoire national, vise, et la mort de cet ensemble, et l’élaboration d’une société nouvelle. L’indépendance de l’Algérie n’est pas seulement fin du colonialisme mais disparition, dans cette partie du monde, d’un germe de gangrène et d’une source d’épidémie.

La libération du territoire national algérien est une défaite pour le racisme et l’exploitation de l’homme ; elle inaugure le règne inconditionnel de la Justice.

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Rationalité, Islam et décolonisation chez Maxime Rodinson

Le savant et le militant. Rationalité, Islam et décolonisation chez Maxime Rodinson

Intellectuel hors-norme Maxime Rodinson est surtout connu pour sa magistrale étude Islam et capitalisme (1966) et a également eu une intense activité militante, notamment au sein du Parti Communiste Français, dont il fit partie de 1937 à 1958. Dans cet article, Selim Nadi revient sur les rapports entre activité scientifique et engagement politique chez Rodinson à travers son analyse des possibilités tactiques et stratégiques qu’offrait l’Islam dans les luttes anticoloniales. De la lutte de libération nationale algérienne au dialogue de Rodinson avec Edward Said, en passant par la Révolution iranienne de 1979, cet article se propose de revenir sur les défis auxquels a dû faire face Rodinson dans son effort pour penser et accompagner les processus révolutionnaires dans les pays musulmans.

« […] j’ai toujours perçu une certaine contradiction entre l’engagement politique et la rationalité. […] L’expérience et l’âge aidant, je me suis rendu compte que plus on avance dans le militantisme, plus on s’aperçoit, à chaque instant, des irrationalités qu’entraîne sa pratique courante. » 

Maxime Rodinson, Entre Islam et Occident. Entretiens avec Gérard D. Khoury

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Frantz Fanon par Raphaël Confiant, ou l’extension du domaine de la créolité

Frantz Fanon par Raphaël Confiant, ou l’extension du domaine de la créolité 15 juin 2017 Par Lise Wajeman Avec les moyens de la littérature, Raphaël Confiant offre une biographie de Frantz Fanon, pour le « désiconiser » et transmettre aux jeunes générations de quoi outiller leurs luttes. Entretien avec l’auteur. « Raphaël Confiant est surtout connu pour ses nombreux … Lire la suite

Mâle décolonisation

Mâle décolonisation de Todd Shepard Une lecture genrée de la Guerre d’Algérie Publié le 23 mars 2017 Le dimanche 5 mars 2017, la librairie parisienne « Les Mots à la bouche » recevait  l’historien nord-américain Todd Shepard à l’occasion de la publication de son livre Mâle décolonisation aux éditions Payot & Rivages. Cette rencontre animée par le libraire … Lire la suite

Interview de Nils Andersson

« Des crimes de guerre en Algérie? Il y en a eu », nous raconte Nils Andersson dans une interview de 16 minutes. 
Nils Andersson, né en 1933 à Lausanne d’un père suédois et d’une mère française, était « porteur de valises », une petite minorité de Français qui apportaient une aide concrète au Front de Libération Nationale FLN algérien: aider des militants FLN dans leur déplacements en France, louer un appartement, transporter des valises d’argent pour financer la guerre d’indépendance, aider à des évasions de prison, … 
Ses ouvrages liés à la cause algérienne étaient censurés ou interdits en France, notamment ses rapports avec les réseaux Jeanson et Curiel. La France lui ferme la porte pendant de nombreuses années et en 1966, son engagement dans l’édition militante amène même son expulsion de Suisse. Il habite actuellement à Paris et milite toujours. Il collabore au Monde Diplomatique, Politis, L’Humanité, Les Temps Modernes, …
Interview: Chris Den Hond pour Investig’Action

Pour aller plus loin, lire aussi :
– L’interview de Nils Andersson réalisée par Alex Anfruns : Du colonialisme français à la Troïka, une longue histoire de luttes