Extrait de Fútbol y Teoría crítica de Luis Martínez Andrade. En mobilisant sciences sociales et références littéraires, il regarde l’assassinat d’Andrés Escobar à travers la figure religieuse du “bouc émissaire” dans un football à l’image de la société spectaculaire marchande.
Fútbol y Teoría crítica, de Luis Martínez Andrade
“Le football est un miroir du système et, sans aucun doute, il est aussi un champ de bataille au-delà de l’aspect purement sportif.” Cet essai en langue espagnole, propose une analyse marxiste influencée autant par Walter Benjamin que par Eduardo Galeano.
Avec cet ouvrage sorti en juin dernier aux éditions barcelonaises La Vorágine, à quelques mois d’une des Coupes du Monde les plus contestées de l’Histoire, Luis Martínez Andrade – originaire de Puebla au Mexique – apporte sa pierre à l’étude et à la compréhension du football et des enjeux qui l’entourent. Il livre, selon les mots de son éditeur, “une cartographie de la pensée critique contemporaine et de l’étude des formes perverses et eurocentrées du capitalisme et de la modernité“.
« Les Blancs ne comprennent rien au football »
Le football, espace de luttes !
Le football est parfois méprisé par des gens de gauche car il serait un divertissement pour les travailleurs, au sens premier à savoir les distraire de leurs intérêts de classe. Il est vrai aussi que le capital s’est emparé de façon prodigieuse de ce sport populaire pour accumuler des profits, en user de façon diplomatique (le Qatar à travers le Paris Saint-Germain) ou faire de la propagande personnelle (Silvio Berlusconi, président de l’AC Milan jusqu’en 2017). Il est également vrai que beaucoup de jeunes, sans conscience de classe, sont fascinés par un sport ultramédiatisé qui entretient l’illusion d’un argent facile. À cet égard, des discussions avec des élèves sont révélatrices : certains ne peuvent comprendre l’attachement à certains clubs désormais moins réputés par rapport aux grosses machines à fric qui achètent à tour de bras des joueurs, de la force de travail, à coup de millions. Des jeunes sont plus attachés à la vedette et moins au club. Pourtant, le club, c’est l’identité d’un collectif. Aussi, s’il est nécessaire de critiquer le football-business et le football professionnel voire de vouloir le limiter et demander aux puissants clubs de contribuer davantage financièrement, il ne faudrait pas rejeter le football. En effet, au-delà de l’aspect financier, le football et le stade sont des enjeux de classe et de luttes sociales. Pour le comprendre, il faut parfois retourner aux origines des clubs.