Dans cet entretien avec le « QG Décolonial », Alana Lentin revient sur les idées phares de son dernier livre Why Race Still Matters (Polity, 2020), soulignant ainsi les enjeux politiques posés par les débats théoriques sur la question raciale. Évoquant notamment les limites du concept de « privilège blanc » et les enjeux liés à l’idée selon laquelle la race est une construction sociale, Lentin propose une lecture rigoureuse et plus complexe de la réalité raciale.
Splendeurs et misères de l’autonomie indigène. 2005-2020
Splendeurs et misères de l’autonomie indigène. 2005-2020 : Le PIR, ou l’histoire courte d’une réussite politique et de sa conjuration
« La mariée ne peut espérer des compliments que de sa mère ou à la rigueur de sa propre bouche » – Proverbe algérien.
Ce bilan pourra être considéré soit comme une contribution critique au débat sur les progrès et les échecs du mouvement décolonial en France soit comme une fable. Il sera fable si les forces politiques à prétention révolutionnaire s’obstinent à nier l’existence d’une résistance blanche active en leur sein et à refuser de trancher ce nœud gordien de la race qui empêche toute alliance stratégique entre les classes populaires blanches et non blanches et qui perpétue la domination impérialiste. Si cet objectif n’était pas atteint, nous espérons qu’il aura au moins valeur de pièce à conviction devant le tribunal de la petite histoire de l’immigration post-coloniale.
Ce bilan n’engage que ses auteurs.
A propos de Miss Provence et de l’antisémitisme (le vrai)
L’anti-tatarisme des Palestiniens (et des banlieues) n’existe pas
A propos de Miss Provence et de l’antisémitisme (le vrai)
Par Houria Bouteldja
Imaginons :
La Palestine n’a pas été colonisée par des populations se réclamant du judaïsme mais par des Tatars qui se réclament (pourquoi pas ?) du tatarisme.
Ce n’est pas Herzl qui écrit « l’Etat des Juifs » en 1896 mais un Tatar.
Les participants au premier congrès sioniste à Bâle qui a lieu en 1897 ne sont pas des Juifs mais des Tatars
La déclaration Balfour écrite par le Ministre des affaires étrangères anglais, le 2 novembre 1917, n’est pas adressée à Lionel Walter Rothschild en tant que principal financier du mouvement sioniste mais à un Tatar.
Les premiers colons, plus connus sous le nom des « amants de sions » (1880), ne sont pas Juifs mais Tatars.
Les premiers mouvements de colonisation de masse après 1905 ? Des Tatars !
Enfin, la dernière grande vague de colons qui déferle après le génocide nazi (après avoir été interdite d’entrée aux Etats-Unis) n’est pas juive mais tatare.
Bref, si le sionisme avait en théorie et en pratique, été, porté et réalisé par des Tatars, les Palestiniens auraient probablement développé une forme d’anti tatarisme que feu Maxime Rodinson aurait appelé un « racisme de guerre » ou Albert Memmi un « racisme édenté» (« édenté » ne signifiant pas « inoffensif » car ce « racisme » peut blesser ou même tuer mais pas avec les moyens et la logistique fournis par un Etat). « Racisme » que les Français, oublieux, connaissent bien, eux qui avaient affublé l’ennemi allemand des injures aussi sympathiques que « Boches », « Chleuhs », « Frisés »…
FREEDOM & ABOLITION: POUR LA LIBERATION DE MUMIA
Nul doute que cette initiative fera date. Son succès tient à la fois à la qualité de la rétrospective sur le « dossier Mumia » et au choix de réunir plusieurs générations de participants, venus d’horizons divers, mais toutes et tous dédiés à la cause de celui qui est devenu le symbole de tous les prisonniers politiques injustement emprisonnés depuis des décennies aux Etats-Unis, que ce soit l’amérindien Leonard Peltier (75 ans dont 45 années d’incarcération) ou Russell Maroon Shoat (ancienne Panthère Noire de Philadelphie) âgé de 77 ans et atteint du Covid.
La participation d’Angela Davis et du célèbre joueur de football américain Colin Kaepernick (*) – l’occasion pour lui de demander publiquement la libération de Mumia – a donné à cette conférence une dimension médiatique exceptionnelle.
Nous portons à votre connaissance (avec un grand merci à Claude Guillaumaud-Pujol et Steve Zade pour les traductions) :
> l’intervention de Colin Kaepernick sur Prison Radio
> le compte-rendu intégral en français
> l’enregistrement intégral en version anglaise et en images sur Youtube
Maradona, un dribble contre le purisme intersectionnel
Traduction du texte de Jose Romero-Losacco faite par Libra Sphera
POUVONS-NOUS ÊTRE FÉMINISTES ET AIMER MARADONA ?
Mercredi 25 novembre mourait Diego Maradona, légende du football mondial à laquelle des millions de personnes se sont identifiées tout au long de sa vie, des faubourgs de Buenos Aires aux quartiers populaires de l’Italie méridionale. Nous avions rendu hommage à celui qui, animé par une impérissable loyauté de classe, n’a cessé de prendre position pour la justice sociale et la défense des peuples opprimés par l’impérialisme.
Certains débats ont émergé ces derniers jours visant à confronter aux célébrations endeuillées du footballeur la réalité de son machisme, ainsi que les accusations de violences conjugales émises à son encontre.
DIEGO L’ANTI-IMPÉRIALISTE
« S’il n’avait pas été footballeur, il serait devenu révolutionnaire »
Emir Kusturica
« Ils défendent tous les États-Unis, moi c’est Cuba »
Diego Maradona
Diego Armando Maradona est décédé un 25 novembre, quatre ans jour pour jour après Fidel Castro, dont il s’était fait tatouer l’effigie sur son mollet gauche et qu’il considérait comme son « second père ». Champion du monde avec l’Argentine en 1986, Maradona a marqué l’histoire de son sport, dont il restera l’une des plus légendaires incarnations.
Mais lui qui avait grandi à Villa Fiorito, bidonville surpeuplé et insalubre dans la banlieue sud de Buenos Aires, qui dès son plus jeune âge choisit Boca Juniors, le club populaire de la capitale argentine, contre son rival des quartiers riches River Plate, n’a jamais oublié ses origines prolétaires. Et s’il est un fil rouge qui traverse les différentes étapes de sa vie, de la gloire footballistique aux déboires judiciaires en passant par sa dépendance à la cocaïne, c’est bien une sensibilité anti-impérialiste dont il ne s’est jamais caché.
Un match résume à lui seul la carrière de Maradona. Les images de sa performance lors du quart de finale de la coupe du monde 1986 au Mexique entre l’Argentine et l’Angleterre, ponctuée par deux buts d’anthologie, resteront gravées dans la mémoire de tous les amoureux du ballon rond.
Les afro-descendants belges et la question de la reconnaissance
Par Aymar Bisoka N.
Les manifestations antiracistes à la suite de la mort de George Floyd, tué fin mai 2020 par des policiers blancs aux États-Unis, ont apporté un souffle nouveau à la lutte contre le racisme et contre l’exclusion que subissent encore les Noirs à travers le monde.
En Belgique, si les premières actions ont consisté à prendre pour cible, à vandaliser ou encore à déboulonner les statues de Léopold II, ancien roi des Belges, c’est parce que, pour les manifestants, la question noire dans ce pays nécessite à la fois un retour sur l’histoire coloniale belge en Afrique des Grands Lacs et ses divers héritages contemporains.
LES « BIENS COMMUNS » COLONIAUX ET LA DÉCOLONISATION DE LA GAUCHE
Les chercheurs universitaires Daniel Montañez et Juan Vicente Iborra (UNAM, Mexique) dénudent les contradictions d’une certaine gauche « communaliste » occidentale. Tracer trop vite une « internationale des biens communs » dissout le rapport prépondérant du colonialisme. Le « ni-nisme » sur le Venezuela, si utile à l’Empire, n’en est qu’une des conséquences politiques.
L’absence et ses masques.
L’absence et ses masques. Les commissions parlementaires belges sur la colonisation et le problème de dignité.
« Les masques ne sont pas les pièces les plus emblématiques de ce musée. Les belges les ont presque tous pillés durant la colonisation pour orner leurs musées. Voilà pourquoi nos musées sont presque vides […]. Ce qui nous reste de grandiose se trouve dehors dans le jardin. Il s’agit de gigantesques fresques qui représentent des esclaves noirs en train de construire une voie ferrée sous la surveillance des colons blancs. On y voit aussi d’imposantes statues de bronze de Stanley et de Léopold II, ces deux blancs par lesquels le malheur a commencé ».
Voilà comment Justin introduit souvent, de manière quasi-machinale mais toujours solennellement, la visite du minuscule musée du Mont Ngaliema à Kinshasa. Au fur et à mesure qu’on avance pour admirer la cinquantaine d’œuvres d’art reparties dans les deux pièces exiguës qui composent le musée, on se heurte effectivement à un contraste. D’abord l’absence et le vide créés par la violence coloniale. Il n’y a pas grand-chose dans le musée. Selon Justin, il faut aller au musée de Tervuren à Bruxelles pour avoir accès aux masques. Ensuite, la violence qu’expriment ces fresques et ces statuts qui surplombent le jardin. Elles sont si impressionnantes qu’on pourrait croire qu’elles avaient été conçues pour cacher l’absence de masques congolais que déplore Justin.