Jihad
Le concept de jihad, duquel de nombreux journalistes ont tiré l’appellation de « jihadistes », est généralement traduit par guerre sainte. Pour beaucoup, cette notion sous-entend une guerre obligatoire contre les non-musulmans pour les convertir de force ou les exterminer. Laissons de côté l’usage métaphorique du mot, qui, comme « croisade » en français, peut s’appliquer à toute lutte pour une cause juste, sans inférer du contenu idéologique ou religieux de la démarche. Même littéralement, le jihad reste un effort sur la voie de Dieu qu’il soit interne ou externe, individuel ou collectif, comme son sens radical le suggère (en arabe, la racine j-h-d traduit la notion d’effort), et le mot lui-même n’a intrinsèquement aucune connotation a priori militaire ou violente, comme le mot français « mobilisation ». On peut parfaitement parler de jihad pacifique.
Par ailleurs, le droit et la jurisprudence islamiques mettent des conditions précises à la proclamation d’un jihad, ou à la qualification d’une guerre comme jihad, et toutes font appel au caractère obligatoirement défensif de la guerre. Il ne peut pas y avoir de jihad à de simples fins d’agression ou d’expansion, même du domaine de l’islam. Par ailleurs, il serait utile de revenir sur le concept de « gens du Livre » dans le Coran, comprenant juifs et chrétiens contre lesquels le jihad n’est a priori pas recommandé. Pour les sunnites comme les chiites, le jihad est toujours défensif et le grand jihad est bien celui contre soi-même.
Chahid, martyrs, attentats-suicide
Voici encore un exemple d’abus de concept : l’utilisation, à tort et à travers, du mot chahid, généralement traduit par « martyr », mais que les nombreux médias européens et nord-américains emploient pour désigner l’auteur d’une opération-suicide. Étymolo-giquement, le mot renvoie à la racine du verbe « témoigner », ainsi qu’à la chahada, la profession de foi, le « témoignage » qui, en principe, suffit pour exprimer l’adhésion à l’islam de celui qui l’énonce. Le chahid est donc la personne dont la mort constitue un témoignage. Il en ressort que dans la pratique de la langue, et depuis fort longtemps, toute personne assassinée ou qui périt de mort violente, y compris accidentelle, est chahid. C’est donc aussi le terme qui s’applique à toute victime de la guerre, civile ou militaire.
Le concept n’a donc, initialement, aucune corrélation avec le suicide ou les attentats-suicides. Celle qui donne sa vie dans les tranchées d’une guerre conventionnelle n’est pas moins chahid que celle qui se sacrifie dans une opération de commando, qu’elle soit dirigée contre des objectifs militaires, et procède donc de la résistance armée légitime, reconnue par le droit international, ou contre des objectifs civils, ce qui fait d’elle, selon le « droit humanitaire de la guerre », car c’est son nom paradoxal, et tout particulièrement les conventions de Genève de 1949, un crime de guerre, et constitue donc du terrorisme.
En tout cas, la majorité des autorités religieuses musulmanes dans le monde entier réprouvent et certaines condamnent catégoriquement, au nom de l’islam, les « opérations-suicide » pourtant conduites prétendument au nom de l’islam, avec l’aval d’une minorité de clercs.
Pour le reste, l’esprit de sacrifice et la glorification de la mort héroïque au service du Bien ne sont guère un monopole des musulmans. « Que meure mon âme (puissé-je périr) avec les Philistins ! », s’écrie le héros Samson en faisant s’écrouler sur lui-même et sur ses ennemis le temple de Dagon, dans une sainte opération-suicide. Les écoliers français de ma génération, par ailleurs, ont tous en mémoire le sacrifice sublime de l’adolescent Bara, « le petit Bara », tambour de la République qui mourut sous les coups de l’ennemi chouan, lequel exigeait qu’il criât « Vive le Roi », en s’écriant « Vive la République ! » Robespierre fit de cet acte héroïque une épopée parlementaire, et en dépit des doutes que les historiens font peser sur l’authenticité de l’événement, André Gretry en fit un opéra, L’apothéose du jeune Bara, le peintre David l’immortalisa, et David d’Angers fit de lui une sculpture pour l’exposition de 1839.
De même, les kamikazes japonais n’étaient pas particulièrement musulmans. Mais c’est que l’esprit de sacrifice dans « mon camp » est toujours admirable l exprime l’amour que nos héros portent aux leurs, leur générosité, leur altruisme, leur abnégation, tandis que dans le camp adverse le sacrifice exprime le fanatisme et l’absence d’humanité, la haine aveugle et la bestialité. On a vu cette imagerie à l’œuvre, appliquée même à l’ennemi soviétique, dans le cinéma hollywoodien des années de la Guerre froide. L’attribution du mépris de la vie et du culte de la mort (composantes classiques du fascisme) à la tradition et à la culture arabe ou islamique ne devrait donc pas surprendre : c’est un discours de guerre classique. Mais il ne devrait pas non plus mystifier qui que ce soit. Pas plus que ne le devraient les références soi-disant savantes qui extrapolent à partir de la distinction que pratique l’islam médiéval entre dar al-islam, le domaine islamique, et dar al-harb, le domaine de la guerre, c’est-à-dire le reste du monde.
N’oublions pas, à titre d’exemple, que pour la chrétienté médiévale, les infidèles sont intrinsèquement voués à l’extermination, et lorsqu’un chef croisé, lors du siège de Jérusalem, en 1099, fit valoir que certains des assiégés étaient quand même chrétiens (bien que grecs orthodoxes), il reçut l’ordre d’appliquer la recette albigeoise qu’Amaury appliquera à Béziers un siècle plus tard :
« Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens ! »
L’esclavage et la colonisation, le génocide et l’apartheid ont été justifiés par diverses églises chrétiennes en des temps et des lieux divers et, aujourd’hui encore, nombre de courants de l’ultra-droite européenne se réclament du christianisme, sans pour autant le résumer. Quant aux juifs orthodoxes, ils bénissent Dieu tous les matins de ne les avoir créés « ni esclave, ni non juif, ni femme ». Dans toutes les grandes religions, on trouve de très nombreuses citations pour dire tout et son contraire, le meilleur et le pire, et on peut toujours tout prouver par les textes.
Ijtihad
L’ijtihad est l’effort de réflexion et d’interprétation du texte. La fameuse « fermeture » de l’ijtihad, le renouvellement de l’interprétation de la Loi, évoquée plus haut, qui serait censée expliquer la rigidité et l’immobilisme du droit, de la pensée et de la pratique islamiques, est utilisée sans modération. Dans les replis de cette interdiction jamais formellement abolie, au demeurant fort confortable pour le clergé conservateur, cependant, qui s’en est arrogé l’unique apanage, de considérables développements dans la compréhension des textes et du droit sont intervenus au cours des siècles et une mesure importante de renouvellement est apparue avec la multiplication des Écoles et des confréries. De fait, les théologies politiques des courants islamisants contemporains, des Frères musulmans égyptiens aux « salafistes » maghrébins, représentent autant de manifestations de cette innovation théologique prétendument bannie. Ici encore, la textualité contredit l’observation de la pratique, y compris de la pratique discursive.
Charia
La référence récurrente à la charia, littéralement, la normalité révélée, qui se décline devant la jurisprudence islamique, est elle aussi souvent prétexte à interprétation abusive, dans la mesure où l’absence de traduction du concept le chosifie et son opacité permet les perceptions les plus extrêmes. Ainsi, des pratiques parfaitement étrangères au texte coranique, et antérieures à lui, comme l’excision ou l’infibulation, sont-elles amalgamées à la législation coranique. La charia diffère d’ailleurs d’un pays à un autre, d’une région à une autre, d’une école religieuse à une autre. Il y a donc plusieurs formes de charia et l’appellation générique est donc nécessairement fallacieuse. D’autant que la compréhension réductrice du terme enferme la charia dans les houdoud – les peines fixées – et notamment les châtiments corporels, qui ne sont qu’une partie de la jurisprudence.
Hijab
Au chapitre des stéréotypes, il faut placer la représentation du sort des femmes dans les sociétés islamiques. Nous avons parlé plus haut du foulard, le hijab ou mandil. Mais le monde musulman, c’est vrai, connaît aussi le tchador, plus contraignant, le haïk, qui recouvre le visage, et même la burka afghane, qui cache le corps des pieds à la tête. Il importe peu que pour les tenants de ces impératifs ou options vestimentaires, ce soit justement la tendance à découvrir les femmes et à les exposer comme objets sexuels qui constitue une atteinte à leur dignité. Ce qui compte, c’est que l’islam en tant que tel n’en exige aucune. Ici, l’innovation des autorités religieuses est allée en régressant, vers la préhistoire de l’islam, la jahiliyya, à l’époque où les Arabes, comme les Chinois ou les Indiens, ne dédaignaient pas d’assassiner les fillettes à leur naissance.
Par ailleurs, on voit que le statut pratique des femmes dans d’autres sociétés méditerranéennes – en Espagne, en Italie du Sud, en Grèce, en Crête, voire en Corse – pourtant chrétiennes, ne diffère guère, jusqu’à la veille de la révolution industrielle et au-delà, de celui des femmes dans le monde musulman méditerranéen. Il est d’ailleurs significatif de noter que dans des pays comme le Nigeria, l’islamisation d’une proportion importante des Yorubas, majoritairement animistes jusqu’à l’époque contemporaine, n’a pas entraîné de régression notable du statut et du pouvoir social et économique traditionnellement détenu par les femmes.
Il convient en effet, avant d’incriminer l’islam, d’examiner le statut des femmes dans les mêmes sociétés avant l’islam. Où l’on constatera que ce dernier légifère un progrès notable, émancipateur, par rapport à l’état antérieur de la société. Ce qui évidemment ne signifie pas qu’il réponde aux impératifs et aux besoins contemporains. Mais il faut aussi mettre les textes en résonance avec les pratiques et dépasser les lectures superficielles des situations et des comportements.
Intolérance
De même faut-il relativiser l’affirmation, souvent répétée, que l’islam est synonyme d’intolérance et d’oppression des minorités religieuses et ethniques. Rappelons qu’il a fallu attendre dix-sept siècles après le concile de Nicée pour voir la nomination, en 2013, d’un pape d’origine non européenne. Alors que du calife abbaside Abul-Abbas abdAllah al-Ma’Mun, arabo-persan, au troisième siècle de l’islam, à Salah Eddine, le Kurde, des sultans et des princes berbères aux Turcs seldjoukides, aux Ottomans et aux Moghols, sans compter l’Iran safavide et sa conversion au chiisme, le monde musulman a connu une mobilité ethnique, une ouverture à tous les peuples de l’Empire qui n’a d’égale dans l’histoire que celle de l’hellénisation à l’époque alexandrine.
En ce qui concerne le rapport de l’islam aux autres religions, il faut distinguer entre deux catégories théoriques de non-musulmans. D’une part, ceux que le Coran reconnaît comme « Gens du Livre », Ahl al-kitab, chrétiens et juifs, auxquels il faut ajouter les « sabéens », que l’on identifie généralement aux adeptes de Zoroastre et de Mani ; et d’autre part, les païens, qu’ils soient animistes ou hindous, à l’égard desquels l’intolérance est absolue et l’esclavage admis.
Bien sûr, dans la pratique des sociétés et la multiplicité des situations, on a également vu le contraire : des exemples de coexistence pacifique islamo-animiste et des épisodes de persécution des uns ou des autres des Gens du Livre. Mais l’exceptionnelle tolérance dont ont joui, dans l’histoire, les juifs et les chrétiens, au moins au centre arabe et sunnite du monde musulman, est fondée sur un double ancrage, théologique et matériel. Car si le judaïsme, qui revendique l’antériorité de la révélation, ne reconnaît aucune tradition ultérieure, le christianisme se fonde sur la vieille religion d’Israël, dite Ancien Testament, qui l’a précédé, tandis qu’il rejette l’islam postérieur à lui, et que ce dernier, ultime venu, s’approprie l’héritage des deux précédents. Ainsi, dans la représentation islamique de la chaîne de la révélation, les Gens du Livre sont les dépositaires des lettres d’accréditation de l’islam lui-même, et leur foi ne saurait être mise en cause sans attenter aux fondements mêmes de l’islam.
Cette tolérance est inscrite dans une équation matérielle dépourvue d’ambiguïté. Car les musulmans sont des hommes libres, c’est-à-dire non imposables, et les Gens du Livre étaient, au début de l’islam, les propriétaires des villes et du négoce moyen-oriental. Aussi l’État islamique classique avait-il un intérêt fiscal à ce que les Gens du Livre demeurent fidèles à une foi qui lui assurait de solides revenus.
Il est d’ailleurs remarquable que le droit musulman, lui-même diversement appliqué ou adapté à des situations particulières, confère le même statut aux chrétiens et aux juifs, et que ces derniers n’aient jamais été soumis à une législation les singularisant. Pour Bernard Lewis, les Gens du Livre dans l’État islamique classique étaient des citoyens de seconde zone. Mais il reconnaît qu’un citoyen de seconde zone est quand même un citoyen, ce que le serf chrétien lui-même n’était pas dans l’État chrétien sous l’Ancien Régime et a fortiori, le Juif.
Liberté
Au chapitre de la liberté et des libertés aussi, il faut bien reconnaître que l’islam n’est ni plus ni moins intrinsèquement liberticide que les autres traditions religieuses et que, comme toutes les autres, il existe en son sein des courants contradictoires, plus ou moins permissifs ou répressifs. C’est l’équivalent de ce que constituent les écoles rabbiniques de Shammai (la rigueur) et de Hillel (la clémence), ou les pôles que représenteraient, dans le contexte chrétien, les franciscains et les jansénistes, ou encore, pour s’appuyer sur des paraboles parfaitement contemporaines, l’Opus Dei face à la théologie de la libération, les prêtres ouvriers ou l’abbé Pierre face à Mgr Lefebvre et ses amis lepénistes.
Violence
Parmi les poncifs islamophobes, il faut mettre en bonne place l’association récurrente, dans le discours « occidental » entre islam et violence. Ici encore, il y a les textes et la pratique. En dépit de l’angélisme et de l’Amour de Dieu et du prochain qui couvre des pages entières du catéchisme, ce sont bien les États dits chrétiens qui se sont rendus coupables des plus grandes violences de l’histoire, ne serait-ce que quantitativement. Dans le domaine textuel, d’ailleurs, c’est bien le Dieu de l’Ancien Testament, celui que les prophètes appellent Elohim Tsevaoth, le « Dieu des armées » qui préside aux guerres et aux révolutions de palais, aux plaies d’Égypte et autres manifestations éclatantes du caprice céleste, qui organise la noyade des troupes du pharaon dans le miracle de la Mer Rouge, comme il intervient, providentiellement et miraculeusement, dans les vengeances personnelles les plus mesquines et les rancunes les plus tenaces.
Dans l’ensemble, l’islam partage avec les deux autres religions du Livre le même fanatisme inspiré, la même propension à tuer et à mourir pour le Bien, la Gloire de Dieu, et l’éradication de « l’Axe du Mal » peut-être la marque propre du monothéisme, encore que cette catégorie soit elle-même problématique. Que l’on compare avec l’adage des Pygmées de l’Ituri, qui dit que dans un conflit, celui qui a tort n’est pas celui qui a commencé, mais celui qui ne veut pas finir !
Terrorisme
À ce stade de la déconstruction, on peut également poser la question : existe-t-il un lien particulier entre l’islam et le terrorisme ? Si l’on s’en tient à la définition proposée du terrorisme stricto sensu, en l’occurrence la technique de guerre consistant à prendre des civils pour cibles d’opérations militaires à des fins politiques, la réponse est indubitablement négative. Le terrorisme, en tant que moyen de pression, d’intimidation ou de déstabilisation politique, qu’il émane d’individus, de groupes organisés ou d’États, n’a pas commencé avec des musulmans.
Certes, les Algériens y ont eu recours dans leur lutte de libération nationale, mais les colonialistes -français de l’Organisation de l’armée secrète (OAS) aussi, et même les communistes vietnamiens n’ont pas reculé devant son utilisation. En Inde, les nationalistes hindous l’ont pratiqué à grande échelle contre les musulmans. Au dix-neuvième siècle, en Europe, anarchistes, socialistes révolutionnaires et indépendantistes des nations renaissantes sur les ruines des Empires multinationaux moribonds – l’Austro-Hongrois et l’Ottoman – se sont spécialisés dans l’assassinat politique (on se souvient de l’archiduc de Sarajevo, dont l’assassinat marque le début de la Première Guerre mondiale), tandis que les Balkans ont été, à notre époque, et depuis le démantèlement de la Fédération yougoslave, le théâtre de forfaits terroristes d’envergure. Même le PKK, qui se réclame du marxisme et non de l’islam, a commis nombre d’opérations qui entrent dans la même catégorie.
Il faut rappeler ici deux épisodes marquants, voire traumatisants, de l’histoire du terrorisme au Moyen-Orient à l’époque moderne : les bombes posées en décembre 1950 par les services secrets israéliens à Bagdad, tout d’abord au Centre culturel américain, puis dans la synagogue Shem Tov pour convaincre les Juifs d’Irak qu’ils étaient menacés ; et celles posées en Égypte par un réseau de Juifs égyptiens travaillant pour le renseignement militaire israélien, en 1954, contre des objectifs civils anglais et américains, pour faire croire aux Occidentaux qu’un réseau terroriste était à l’œuvre en Égypte, dissuader les États-Unis et la Grande-Bretagne de signer un traité de coopération avec Gamal Abdel Nasser, qui venait de prendre le pouvoir en renversant la monarchie, et pousser ce dernier dans les bras des Soviétiques, de façon à préserver l’exclusivité de l’alliance israélo-américaine.
L’assassinat politique, par contre, même s’il revêt un caractère criminel – il s’agit, après tout, d’une exécution extrajudiciaire, donc d’un acte contraire au droit – ne constitue pas du terrorisme au sens strict du terme. Cette distinction n’est pas indifférente, dans la mesure où l’histoire des États islamiques – et non pas l’islam lui-même – a été jalonnée d’assassinats politiques, tout d’abord à cause de la nature politique de la césure entre le sunnisme et le chiisme, et aussi parce que les rivalités dynastiques s’articulaient sur des affrontements d’ordre théologique ou liturgique, mais débouchaient presque immanquablement sur la nécessité, ou la tentation, d’éliminer le faux imam, l’usurpateur, pour laisser la place au Commandeur légitime des Croyants.
À l’ombre des vociférations islamophobes de droite et de gauche, on peut aujourd’hui dire et écrire, en Europe et aux États-Unis, tout et n’importe quelle horreur dégradante et disproportionnée sur l’islam, sur le Coran et sur la personne du Prophète. L’affaire des caricatures danoises, à cet égard et l’écho particulier qu’elle a rencontré en France sont emblématiques. Car chacun trouve son compte particulier dans ces envolées lyriques de la haine bien pensante. Ceci concerne tout un spectre allant de l’ultra-droite ouvertement arabophobe aux souverainistes, des Échos de France aux pseudo-républicains ultra-laïques pour lesquels la ligne de front passe au sein des directions du MRAP et d’Attac, du Front national à Charlie Hebdo, de Benoît XVI – souverain pontife de choc et de combat, candidat au rôle de chantre de la nouvelle croisade – au prof de banlieue, fils de nazi devenu ultra-sioniste, raciste et démagogue, menacé sur un obscur site Internet prétendument islamiste et, à ce titre, promu martyr de la liberté d’insulter l’islam et les musulmans. Peut-on tendre à ceux qui pensent ainsi défendre la liberté un miroir où ils verraient à quoi et à qui ils ressemblent ?