Pourquoi les penseurs décoloniaux sont-ils accusés d’antisémitisme ?

Parce que nous avons dissocié l’antisémitisme de la colonialité de la race – ce dont les défenseurs d’Israël se réjouissent en coulisses.

Publié le 9 février 2021 sur vashtimedia.com

Traduction par Sylvie Tout Court

Dans Peau noire, masques blancs (1952), Frantz Fanon – figure majeure du combat anticolonial, psychiatre et philosophe – écrivait au sujet de la condition noire sous régime colonial : « Car le Noir n’a plus à être noir, mais à l’être en face du Blanc. Certains se mettront en tête de nous rappeler que la situation est à double sens. Nous répondons que c’est faux. Le Noir n’a pas de résistance ontologique aux yeux du Blanc ».

Cette description me renvoie à mon ressenti en tant que Juive établie dans le Nord global, dans ce monde qui a vu passer l’Holocauste et la Nakba. Ce n’est pas que les Juifs (et en particulier les Juifs blancs, occidentaux), comme les Africains colonisés, se voient dénier la permission de se définir eux-mêmes de façon indépendante. C’est plutôt que, tout comme le Blanc a besoin du Noir pour se définir, le Juif doit être défini aux yeux des autres.

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« La lutte contre l’antisémitisme échouera si l’on en fait une arme pour pratiquer le racisme »

Le philosophe, historien, politologue et penseur post-colonialiste camerounais a été la cible d’une intense controverse en Allemagne. La raison ? Il lui est reproché d’avoir dressé un parallèle entre l’apartheid en Afrique du Sud et la situation des Palestiniens
Une caricature contre l’apartheid et le racisme placée sur une barrière de sécurité, lors d’une manifestation devant l’ambassade israélienne, à Buenos Aires (Argentine), le 12 septembre 2017 (AFP)
Une caricature contre l’apartheid et le racisme placée sur une barrière de sécurité, lors d’une manifestation devant l’ambassade israélienne, à Buenos Aires (Argentine), le 12 septembre 2017 (AFP)
Par Hassina Mechaï
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PARIS, France

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À propos de la restitution des artefacts africains conservés dans les musées d’Occident

Historien

La question de la restitution de l’art africain pillé par les occidentaux fait l’objet de débats dont les termes doivent être clarifiés. Car les œuvres d’art africaines n’ont pas qu’une valeur matérielle, mais également cosmologique : elles transcendent la distinction entre objet et sujet, elles traduisent une volonté de s’insérer dans le monde dans le but d’y participer et de le prolonger, plutôt que de le dominer et de l’assujettir. La restitution ne saurait donc être simplement matérielle : comment pallier l’appauvrissement symbolique entrainé par les pillages ? Cela est-il seulement remédiable ?

Aujourd’hui, la question de savoir s’il faut ou non restituer à leurs ayant-droits les artefacts africains conservés dans les musées d’Occident se pose avec acuité. Très peu, cependant, se préoccupent de comprendre ce qui aura justifié, à l’origine, la migration de ces objets en Europe. Davantage encore, nombreux sont ceux et celles qui ne savent ni quelle est leur valeur esthétique réelle, encore moins de quoi ils furent le signifiant dans la conscience européenne. Il importe, dans ces conditions, de revenir à l’essentiel. Posons-donc les questions de la manière la plus claire possible.

 

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