Au moins 89 personnes sont mortes cette année en voulant traverser la Manche. Des tentatives de plus en plus risquées, aggravées par la répression policière.

1er janvier 2025 Épisode n° 11

Les épisodes

Photo Édouard Bride/Hans Lucas Édité par Lucile Sourdès-Cadiou

À chaque plage son cadavre recraché par la Manche. Ces dernières semaines se sont multipliées sur la Côte d’Opale les alertes relatives à la découverte d’une dépouille rejetée par la mer. Le 21 décembre, un corps, entier mais en état de grande décomposition, a été trouvé par un riverain sur la plage de Wimereux, dans le Pas-de-Calais, non loin de l’école de voile. Un mois plus tôt, c’est un promeneur qui en repérait un autre, méconnaissable après un long séjour dans l’eau, sur la plage de Quend, au nord de la baie de Somme. Le même scénario s’est reproduit à de nombreuses reprises dans le Pas-de-Calais dernièrement : le 12 novembre à Wissant, le 17 novembre à Marck, deux fois à Calais les 6 et 14 novembre, ainsi qu’à Sangatte, au pied des falaises ivoires du cap Blanc-Nez, les 2 et 14 novembre. Si on ajoute les quatre corps repêchés au large de Calais les 5 et 6 novembre, celui retrouvé le 8 décembre en mer à hauteur d’Escalles et, enfin, la dépouille récupérée à proximité du port de Douvres, côté britannique, le 5 décembre, ce sont en tout quatorze cadavres qui ont été rendus par la Manche, la plupart dans un état de décomposition avancée, depuis début novembre. La majorité des corps retrouvés sont liés à des naufrages de « small boats » tentant de rejoindre l’Angleterre, en particulier un, survenu le 23 octobre et dont le bilan humain officiel, qui faisait état de trois morts, a été largement sous-estimé.

Cette lugubre liste ne fait qu’illustrer la réalité plus générale observée à la frontière franco-britannique au cours de l’année qui vient de s’écouler. Alors que près de 37 000 personnes migrantes ont réussi à franchir le Channel depuis le 1er janvier, d’après le ministère de l’Intérieur britanniqueLes Jours ont recensé au moins 89 exilés qui ont perdu la vie cette année dans la région, ainsi que le documente le « Mémorial de Calais », un outil interactif inédit à retrouver en bas de page. C’est, de loin, l’année la plus meurtrière à cette frontière depuis 1999 – la seconde, l’an 2000, compte 60 décès, dont 58 exilés chinois asphyxiés le même jour dans un camion. L’hécatombe, qui dure depuis vingt-cinq ans et a fait au moins 484 victimes, n’en finit pas. Retour sur ces douze mois mortifères.

Dina Al Shammari, 21 ans, Sara El Hashimi, 6 ans, et Abdulaziz, 21 ans, sont morts de la même façon : écrasés dans des zodiacs surchargés

« Il était environ 4 heures du matin quand nous avons commencé à embarquer sur le zodiac, près de 100 personnes attendaient sur la côte », se remémore Nour Al Shammari, 19 ans, originaire du Koweït, rencontrée à l’accueil de jour du Secours catholique à Calais. La jeune femme et sa sœur, Dina, 21 ans, sont parmi les premiers passagers à monter sur le pneumatique ce dimanche 28 juillet, sur une plage proche de Calais. Mais le trop grand nombre de candidats au passage crée rapidement une situation de chaos avant même le départ. « On s’est retrouvées coincées au milieu d’une vingtaine de personnes, nous n’arrivions plus à respirer, détaille Nour. On a crié à l’aide, mais personne n’a rien fait sur le moment et le bateau a quand même démarré. »

« Certains passagers ont demandé assistance peu de temps après le départ, se souvient Éric, un marin qui a pris part à l’opération de sauvetage. En s’approchant, on a vu qu’il y avait de nombreuses personnes debout qui n’osaient pas bouger tellement l’embarcation était en surcharge. » Au cours de l’intervention, les sauveteurs remarquent vite Dina, inconsciente au milieu de la foule de passagers. « Un secouriste est monté au milieu de l’embarcation et l’a récupérée, puis on a tenté de la réanimer une fois à bord de notre bateau, souffle Éric, mais elle était en arrêt depuis de nombreuses minutes. C’est l’horreur complète, elle a été écrasée. » Dina Al Shammari appartenait à la minorité bidoune au Koweït. Elle avait fui avec sa famille les discriminations dont sont victimes les membres de cette communauté pour l’Allemagne en 2021, où ils avaient demandé l’asile. Déboutée au terme de la procédure, craignant une expulsion, la famille espérait trouver une seconde chance en Angleterre. La jeune femme, récemment diplômée dans le domaine de la santé en Allemagne, est morte asphyxiée.

Les circonstances de son décès ne sont pas exceptionnelles. Le 19 juillet, Abdulaziz, un Soudanais de 21 ans, est retrouvé par les secours mort étouffé au milieu d’une embarcation de 86 personnes. Le 23 avril, à hauteur de la plage de Wimereux, cinq personnes exilées meurent après avoir été piétinées par les passagers d’un zodiac dans lequel avaient pris place près d’une centaine de personnes. Parmi les victimes, Sara El Hashimi, une fillette irakienne de 6 ans. Le 15 septembre, un nouvel incident grave à proximité de la plage d’Ambleteuse fait huit morts, écrasés dans un mouvement de panique, selon une source policière. Le 5 octobre, quatre personnes, dont un bébé de 2 ans, décèdent étouffés dans deux traversées distinctes. Selon le préfet du Pas-de-Calais, Jacques Billant, les trois adultes ont été retrouvés inanimés au fond du zodiac, « vraisemblablement écrasés et noyés dans des bousculades et dans les 40 centimètres d’eau au fond de l’embarcation pneumatique ».

On observe beaucoup de tensions lors des départs, avec beaucoup de personnes exilées qui tentent de partir au même moment, sur le même bateau. Le tout dans un climat de violences policières, avec des interventions des forces de l’ordre qui font un usage massif de gaz lacrymogènes.

Angèle Vettorello, coordinatrice d’Utopia 56 à Calais

« Le bateau sur lequel se trouvaient Dina et sa famille s’est fait pirater, estime Éric, qui a discuté avec des rescapés. Des exilés, qui n’avaient pas les moyens de payer la traversée, étaient cachés dans les dunes et sont montés de force quand le zodiac a été mis à l’eau. » Ahmed El Ashimi fait un récit identique de l’événement ayant entraîné la mort de sa fille Sara. Selon les premiers témoignages, c’est également ce qu’il se serait produit, dimanche 29 décembre à Sangatte, pendant l’incident qui a fait quatre victimes. Un phénomène également constaté par les acteurs associatifs, qui a accentué les situations de panique au moment des embarquements et augmenté les risques. « On observe beaucoup de tensions lors des départs, avec beaucoup de personnes exilées qui tentent de partir au même moment, sur le même bateau, déplore Angèle Vettorello, coordinatrice d’Utopia 56 à Calais. Le tout dans un climat de violences policières, avec des interventions des forces de l’ordre qui font un usage massif de gaz lacrymogènes. »

La stratégie policière sur le littoral est régulièrement dénoncée, qui vise à tout prix à stopper les bateaux, y compris en crevant les zodiacs à coup de couteau. Cette logique s’étend aussi à la Manche : en mars, des journalistes du consortium Lighthouse Report ont ainsi montré, vidéos à l’appui, de quelle manière les forces de l’ordre tentaient d’intercepter en mer les embarcations d’exilés, quitte à mettre sérieusement en danger les passagers. « Moins de bateaux mis à l’eau, ça ne fait pas moins de personnes qui veulent passer, constate de son côté Flore Judet, de l’association l’Auberge des migrants. Au contraire, ça va juste générer une surcharge sur les embarcations qui arriveront à prendre la mer, car les passeurs doivent y retrouver leur compte, et donc potentiellement plus de décès. »

Victimes de la Manche

Adam Abderrahmane Ediya, Dina Al Shammari, Sara El Ashimi et Jumaa Al Hassan, décédés lors d’une tentative de traversée vers l’Angleterre — Photomontage Simon Lambert/Les Jours.

Ce climat sur les plages pousse alors les exilés à réaliser des tentatives toujours plus lointaines et risquées, en imaginant par exemple franchir la Manche à partir des cours des fleuves côtiers du Nord-Pas-de-Calais. Dans la nuit du 2 au 3 mars, 16 personnes, dont dix enfants et une femme enceinte, embarquent sur un petit bateau de pêche stationné sur le fleuve Aa, au niveau de la halte fluviale de Watten (Nord), à 30 km du littoral. Le moteur n’est pas démarré que le bateau chavire sous le poids des passagers. Coincée dans la cabine de pilotage, Rola Al Mayali, une enfant irakienne de 7 ans, meurt noyée sous les yeux de ses parents, Mohamed et Nour, et de ses trois frères Muhaimen, 14 ans, Hassan, 10 ans, et Moamel, 8 ans.

La même nuit, Jumaa Al Hasan, Syrien originaire d’Alep âgé de 27 ans, disparaît dans les eaux sombres de l’Aa, un peu plus en aval du fleuve, à hauteur de Gravelines. Jumaa patientait sur la berge avec un groupe d’exilés, dans l’attente du passage d’un zodiac descendant le fleuve, quand une patrouille de police intervient afin d’empêcher l’embarquement. Dans la panique et au milieu des gaz lacrymogènes, Jumaa, espérant atteindre le zodiac, saute à l’eau, coule une première fois, remonte à la surface avant de couler de nouveau. Les alertes lancées immédiatement par les exilés présents ne permettront pas de le retrouver. Le corps inanimé de Jumaa réapparaîtra seize jours plus tard, très en aval, à hauteur de Grand-Fort-Philippe.

« La France ne laissera pas la Manche devenir un cimetière »avait annoncé Emmanuel Macron, quelques heures après le terrible naufrage du 24 novembre 2021 au large de Dunkerque au cours duquel 27 personnes sont mortes et quatre ont disparu. Le bilan de l’année 2024 vient contredire de manière cinglante cette sortie du chef de l’État. Sur les 89 personnes exilées décédées à Calais cette année, au moins 53 sont mortes noyées dans la Manche. Le nombre de disparus reste pour le moment inconnu.

Les policiers présents ont vu couler Jumaa, nous les avons alertés, mais ils n’ont rien fait. Si un chien était en train de se noyer, ils l’auraient secouru.

Ahmed a assisté à la noyade de Jumaa Al Hasan dans la nuit du 2 au 3 mars 2024

Le 14 janvier, cinq exilés syriens, Aysar Abd Rabou (26 ans) et son frère Abadeh (14 ans), Ayham Al-Shouli (24 ans), Mohamed Jabawi (16 ans) et Ali Al Oklah (25 ans), se noient à quelques dizaines de mètres de la digue de Wimereux (Pas-de-Calais). Nous avions raconté la douloureuse épreuve liée à l’identification des victimes à laquelle ont été confrontés leurs proches (lire l’épisode 10, « À Calais, des exilés en quête de tombeau »). Le 28 février, Eren Gündogdu, Kurde de Turquie âgé de 22 ans, meurt en mer au cours d’une traversée au large de Wissant. Trois autres personnes sont toujours portées disparues. Le 12 juillet, quatre personnes de nationalité somalienne périssent après qu’un zodiac s’est renversé au large de Boulogne-sur-Mer. Cinq jours plus tard, Dakhlac, une femme érythréenne de 32 ans, décède au large de Gravelines. Le 11 août, deux exilés afghans, Fazal Rabi et Ishanullah, meurent au large de Calais. Le 3 septembre, dix femmes et deux hommes, tous originaires d’Érythrée, sombrent dans un naufrage au large du cap Gris-Nez. Le bateau pneumatique se serait affaissé sur lui-même sous le poids des passagers. Une treizième victime, Kbaat Gebrehiwet, Érythréenne de 20 ans, est retrouvée deux semaines plus tard après que son corps a été repêché en mer, au large d’Ambleteuse.

Énumération atroce d’événements tragiques à répétition se déroulant à trois heures de Paris. Le 3 septembre, sur un quai du port de Boulogne-sur-Mer, le ministre de l’Intérieur démissionnaire, Gérald Darmanin, fustige « les passeurs, ces criminels, responsables du naufrage » ayant provoqué la mort de douze personnes. Dans une tribune parue dans Le Monde mi-septembre, un collectif d’associatifs lui répond et dénonce « une politique mortifère » menée à la frontière « qui crée les conditions pour que les personnes se jettent dans les bras des trafiquants d’êtres humains et meurent en mer ». À Calais, Dunkerque, Boulogne-sur-Mer ou encore Ambleteuse se succèdent des commémorations organisées par des associatifs ou des habitants pour rendre hommage aux victimes (lire l’épisode 9, « Voir Calais et se souvenir, 376 fois »). Le 17 octobre, Meryem, un bébé de deux mois et demi, meurt noyée au cours d’un naufrage au large de Wissant. La famille de Meryem, originaire du Kurdistan irakien, espérait elle aussi rejoindre le Royaume-Uni et ainsi échapper au risque d’expulsion après le rejet de leur demande d’asile en Allemagne. La frontière n’offre aucun répit.

À ces morts en mer s’ajoute une série de décès, parfois invisibles médiatiquement, survenus à terre au cours de cette année. Le 27 janvier, le Soudanais Adam Abderrahmane Ediya est mort dans des conditions atroces : alors qu’il avait réussi à se cacher dans la remorque d’un camion en partance pour l’Angleterre, il a été écrasé et transpercé par la cargaison du véhicule, probablement mal stabilisée. Le 8 février, Radu-Ion Meterca, 44 ans et originaire de Roumanie, meurt électrocuté par un caténaire après être monté sur le toit d’un Eurostar stationné Gare du Nord, à Paris, et à destination de Londres. Le 14 décembre, à Loon-Plage, Hadu et Hamid, deux exilés kurdes iraniens, sont victimes, avec trois autres hommes de nationalité française, d’une tuerie collective perpétrée par Paul Domis, ancien routier, inscrit à club de tir et amateur de chasse…

Dans un tweet daté du 3 octobre, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, en marge du G7, constatait avec son homologue britannique Yvette Cooper que « l’efficacité des forces de l’ordre pour empêcher les traversées vers le Royaume-Uni avait des conséquences néfastes avec une augmentation des décès et des violences entre migrants et envers les forces de l’ordre ». Une déclaration qui constitue à la fois une reconnaissance de responsabilité et une euphémisation de ces morts, ramenés à des simples « conséquences néfastes ». En mars dernier, Ahmed a assisté, impuissant, à la noyade de Jumaa Al Hasan dans le fleuve Aa : « Les policiers présents ont vu couler Jumaa, nous les avons alertés, mais ils n’ont rien fait. Si un chien était en train de se noyer, ils l’auraient secouru. » En reprenant son souffle, le Syrien conclut : « Certes, nous sommes en situation irrégulière, nous n’avons pas de papiers, nous n’avons rien, mais nous restons des êtres humains. »

 

Le regard du Cartographe #37. La migration et ses morts vues par les cartes

Pour ce nouveau regard de cartographe, Nicolas Lambert nous parle de migrations. Il nous montre comment les mers qui bordent l’Europe sont devenues de cimetières pour des dizaines de milliers de personnes fuyant la guerre, la dictature ou la misère. 35 années mises en cartes qui déplacent « le regard du fait divers vers une lecture géographique et systémique ».

Depuis le début des années 2000, près de 68 000 personnes — femmes, hommes et enfants — ont péri en tentant de rejoindre l’Europe, un nombre équivalent à la population d’une ville comme Calais, Colmar, Bourges ou Valence. Noyades, asphyxies, accidents, écrasements, empoisonnements, explosions sur des champs de mines, morts de faim, de soif, d’épuisement, absence de soins médicaux, violences policières, etc. : autant de tragédies humaines qui auraient pu être évitées. Ces vies brisées sont le lourd tribut d’une politique migratoire marquée par l’indifférence et la répression, là où la solidarité aurait pu offrir à tout le monde un autre destin. Ces décès constituent une manifestation aussi évidente que tragique de la vulnérabilité des migrants et de violence des politiques migratoires qu’ils subissent.

Une histoire en cartes

En 2002, le géographe Olivier Clochard, chercheur au laboratoire Migrinter et fondateur du réseau Migreurop, réalisait la toute première carte des morts de la migration. À cette époque, aucune source officielle ne recensait les décès liés aux migrations. Ce travail inédit et pionnier s’appuie alors sur les données de l’organisation néerlandaise UNITED against Racism et celles de l’association des amis et des familles des victimes de l’immigration clandestine (AFVIC). Cette carte marque un tournant : elle déplace le regard du fait divers vers une lecture géographique et systémique. Elle rend visible une réalité jusqu’alors fragmentée, exposant la logique implacable et territoriale de la répression aux frontières. La carte montre que ces décès ne sont pas des incidents isolés, mais le résultat d’un système qui se dévoile à travers des lieux clés : le détroit de Gibraltar, le détroit de Sicile, le canal d’Otrante, la mer Égée, etc. À partir de 2004, Olivier Clochard enrichit cette carte en collaboration avec Le Monde diplomatique. Ce partenariat lui confère alors une résonance inédite, transformant cette carte en une arme politique majeure.

Au fil du temps, de nouvelles sources de données apparaissent. D’abord, l’incroyable travail du journaliste italien Gabriele Del Grande, qui, à travers son blog Fortress Europe, raconte ces drames invisibilisés aux frontières de l’Europe. Puis, en 2014, c’est l’émergence du projet de data journalisme « The Migrant’s file », qui s’illustre par son remarquable travail de vérification des faits. Aujourd’hui, les données proviennent en grande partie du projet Missing Migrants de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), consolidant ainsi une cartographie plus précise et plus complète.

Grâce à ces nouvelles données, la « carte des morts » a été mise à jour à plusieurs reprises par le réseau Migreurop, en 200920122015, et 2017. À chaque révision, la géographie de la frontière migratoire se précise, se dessine, se réorganise, à mesure que les dispositifs de contrôle se renforcent. Mais ces dispositifs, loin de freiner les migrations, n’ont pour effet que de dévier les routes migratoires, les rendant toujours plus périlleuses. Oui, il faut le dire haut et fort : ce sont bien ces politiques migratoires, cruelles et inefficaces, qui portent la responsabilité de cette hécatombe silencieuse. Dans ce billet, dans la lignée des travaux du réseau Migreurop, nous proposons une actualisation de cette carte selon les mêmes codes. L’échelle temporelle choisie est 1993-2024, mais libre à vous de la faire varier.

Credit: Nicolas Lambert

Attention : en raison du nombre de données traitées, la carte peut mettre quelques dizaines de secondes à s’afficher ou se mettre à jour.

La liberté de circulation en question

En 1952, dans Peau Noire, Masques Blancs, Frantz Fanon écrivait les mots suivants : « Il ne faut pas essayer de fixer l’Homme, puisque son destin est d’être lâché ». Cette phrase résonne ici avec force. Oui, depuis la préhistoire, l’humanité s’est toujours déplacée à la surface du globe, mais également sous l’eau et dans l’espace. La mobilité fait partie intégrante de l’histoire humaine. Ce qui l’est moins, c’est cette volonté d’empêcher ces mouvements. Notez, qu’ils ne sont pas empêchés pour tous. Il est très facile de traverser les frontières et voyager à travers le Monde dès lors que l’on est un riche habitant d’un pays riche.

Mais cette mobilité est systématiquement entravée pour les ressortissants des pays du Sud. La frontière est donc profondément inégalitaire et dissymétrique. Elle matérialise un rapport de domination entre les pays du Nord et les pays du Sud. Alors que faire ? Bien sûr, contester cet ordre mondial. Mais aussi, rappeler que le lieu de naissance est un hasard de la vie. Qu’il n’y a pas de crise migratoire mais une crise de l’accueil et de la solidarité. Et comme dirait Patrick Chamoiseau, rappeler que nos « frères migrants » ne sont pas des menaces mais des camarades de luttes. Une conclusion s’impose. Elle se résume en ces deux points : Prolétaires de tous les pays unissez-vous. Liberté de circulation et d’installation pour toutes et tous.

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