SANS-PAPIERS : au croisement des logiques xénophobes et capitalistes – Youri Vertongen

Youri Lou Vertongen est docteur en Sciences politiques. Il a mené une longue recherche sur les mouvements sans-papiers à Bruxelles, en Belgique. Joël Girès de l’Observatoire des inégalités l’interviewe pour discuter de ses analyses et retracer l’histoire des politiques migratoires belges dans ce troisième épisode de Contrechamp.

Youri Vertongen explique à quel point la politique migratoire est structurée par une xénophobie d’État.

22 septembre 1998 – 22 septembre 2025

On n’oublie pas. On ne pardonne pas.

Le 22 septembre 1998, Semira Adamu a été assassinée par l’État belge. Étouffée à l’aide d’un coussin par des gendarmes lors d’une expulsion, elle avait vingt ans. Sa mort est l’expression brutale du racisme d’État : une femme noire, migrante, demandeuse d’asile, rendue illégitime à vivre sur ce territoire.

Vingt-sept ans plus tard, rien n’a changé. La Belgique continue d’enfermer des hommes, des femmes et des enfants dans des centres fermés, continue d’expulser vers des pays en guerre, continue de traquer les sans-papiers jusque dans les gares, les associations, les quartiers. L’Union européenne privatise et externalise ses frontières, transformant la Méditerranée en cimetière et légitimant la collaboration avec des régimes criminels.

On nous dit parfois que « le fascisme arrive ». Mais pour nous, Noirs, Arabes, Musulmans, Migrants, Sans-Papiers, Rroms, il est là depuis toujours. Il se manifeste dans les contrôles au faciès, dans les rafles policières, dans les discriminations quotidiennes, dans les morts en détention, dans les vies étouffées par les politiques d’asile et de migration. Le nom de Semira résonne avec ceux d’Adil, de Mawda, de Mehdi, de Lamine et de tant d’autres, victimes de ce système qui hiérarchise les vies et condamne les indésirables à la mort lente ou brutale.

Nous n’oublions pas. Nous ne pardonnons pas. Le racisme d’État tue, hier comme aujourd’hui.

27 ans après, la Belgique poursuit sa politique de mort contre les personnes en migration.

  • Elle expulse vers des zones de guerre et des dictatures, en toute complicité avec les régimes autoritaires.

  • Elle traque les sans-papiers jusque dans les associations et les gares, les criminalise et les précarise.

  • Elle ouvre de nouveaux centres fermés, véritables prisons racistes où des familles, des femmes et des enfants sont encore enfermés.

  • Elle s’aligne sur la politique migratoire européenne, qui privatise le contrôle des frontières, sous-traite la répression à des pays comme la Turquie ou la Libye, et fait des milliers de mort·e·s en Méditerranée.

Le racisme structurel est toujours au cœur de ces politiques.
La logique coloniale qui hiérarchise les vies continue de tuer.

Mais face à cette machine à broyer, la résistance ne faiblit pas.
Les sans-papiers s’organisent en collectifs, occupent, manifestent, revendiquent leur régularisation. Des milliers de personnes refusent la résignation : elles hébergent, protègent, défendent, militent.

Semira Adamu incarne notre mémoire et notre lutte. Tant que ce système persistera, nous continuerons à résister.

Nous, Bruxelles Panthères, nous inscrivons dans cette lutte. Notre mémoire est une arme. Notre solidarité est une résistance.

En 2025, notre parole reste la même :

 Nos revendications :

  • Régularisation de toutes les personnes sans-papiers, en attendant une réelle liberté de circulation et l’égalité des droits pour toutes et tous.

  • Arrêt immédiat des expulsions et fermeture des centres fermés.

  • Condamnation des violences racistes, patriarcales, policières et d’État.

 Notre mémoire :

Semira Adamu n’est pas une « victime » parmi d’autres. Elle est un symbole de lutte. Sa mort est un crime d’État.
Et tant que l’État continue ses politiques meurtrières, notre devoir est de rappeler son nom, de transmettre son combat et d’organiser la résistance.

27 ans plus tard, notre cri est intact :
 On n’oublie pas.
 On ne pardonne pas.
 Justice pour Semira.
 Liberté et dignité pour toutes et tous.

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