Détention administrative : Systèmes carcéraux d’apartheid en Palestine et en Grèce

Détention administrative : Systèmes carcéraux d’apartheid en Palestine et en Grèce
Cette brochure résume un événement organisé en février 2025 : « Détention administrative : Systèmes carcéraux d’apartheid en Palestine et en Grèce », par l’Assemblée contre les centres de détention, le 6 mars 2025 à Athènes.
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(photo) Fresque à la bombe à l’extérieur de la prison de Petrou Ralli, Athènes
(photo) Fresque à la bombe à l’extérieur de la prison de Petrou Ralli, Athènes

L’intention et la motivation de l’événement proviennent d’une volonté de développer une analyse politique plus globale des prisons, de l’enfermement des migrant·e·s et des continuités répressives de l’occupation israélienne, de la Grèce et de l’UE. Il ne s’agit pas ici de comparer directement la situation en Palestine et en Grèce, mais bien de relier ces deux géographies via leurs prisons et leurs usages de la détention administrative. Nous affirmons également que la Grèce est pleinement complice du génocide en cours à Gaza et du colonialisme de peuplement en Palestine, comme en témoignent les nombreux liens et collaborations militaires, politiques et économiques.

La détention administrative, une forme d’emprisonnement non judiciaire distincte du système pénal, permet aux gouvernements d’incarcérer toute une catégorie de personnes, pour une durée indéfinie ou sans date de libération, dans des conditions non régulées. Les personnes détenues sont des cibles politiques, visées par des politiques gouvernementales cherchant à les déshumaniser et en faire des boucs émissaires, qu’il s’agisse de Palestinien·ne·s ou de migrant·e·s.

La surpopulation, les conditions dégradées et la violence sont utilisées tant comme punition que comme mesure de dissuasion. Mais en réalité, cela perd tout sens lorsque des forces de police ou militaires habilitées abusent de pouvoirs de fouilles et arrestations arbitraires, sans preuve ni motif. En revanche, pour la personne emprisonnée, il est quasi impossible d’utiliser les voies légales pour recouvrer la liberté : les avocat·e·s sont entravé·e·s, les voies de recours bloquées, et les appels contre la détention sont systématiquement rejetés faute de contrôle juridique.

La détention administrative a toujours été un outil puissant du colonialisme, fondamental dans la formation et le fonctionnement de la société coloniale israélienne. C’est une mesure punitive utilisée contre les Palestinien·ne·s dans les territoires occupés en 1967 mais aussi dans la Palestine historique (colonisée en 1948). Ses racines se trouvent dans le droit britannique durant le mandat, preuves de ses origines et continuités coloniales.

En Grèce, comme dans toute l’Europe, les personnes non européennes et racisées sont enfermées en « centres de détention pour éloignement » (Pre‑Removal Detention Centres – PRDC), uniquement pour leur statut migratoire. La détention administrative y implique une absence de date de libération et souvent une totale ignorance des motifs invoqués. Ces centres sont censés faciliter les expulsions, mais servent surtout à renforcer le système carcéral.

En Palestine, le système d’apartheid est manifeste : occupation des terres, contrôle des corps et des déplacements par la force militaire, dualité juridique, contrôle de l’accès à l’eau, à la nourriture, au carburant, et restriction de l’existence selon l’identité et les documents officiels.
En Grèce, nous soutenons qu’un système d’apartheid sélectif est également en place, non pour égaliser la situation avec la Palestine, mais pour pointer les pratiques systémiques similaires d’apartheid perpétrées par les gouvernements successifs envers les demandeurs et demandeuses d’asile.

Cela se manifeste par la difficulté à accéder et à renouveler ses papiers d’identité, le poids accordé à la « légalisation » d’une personne conditionnant l’accès aux soins, au logement, à l’emploi et à l’éducation. On voit aussi l’expansion et la sécurisation croissante de camps précaires comme seule solution d’hébergement.

Ces mécanismes contrôlent les corps et les mouvements, imposant ségrégation, barrières, limitations, une société à deux vitesses. Le système carcéral et la détention administrative sont essentiels à cette logique de contrôle et de peur, renforcée quotidiennement par les contrôles d’identité et le harcèlement policier.

L’apartheid et la ségrégation se révèlent dans le système juridique d’un État-nation et ses prisons. En Palestine, la détention administrative et les tribunaux militaires aggravent la privation de droits juridiques, l’usage de la violence physique et la torture psychologique. En Grèce, la détention administrative se justifie par les conditions carcérales, l’absence d’assistance juridique et la torture mentale liée à l’incertitude sur la durée d’enfermement. Dans les deux contextes, de tels abus « légaux » ne seraient tolérés que par une fraction de la population : les citoyen·ne·s israélien·ne·s ou grec·que peuvent difficilement s’imaginer subir cela.

Les interventions d’avocat·e·s et d’ex-détenu·e·s palestinien·ne·s et grec·que·s porteront sur les réalités légales et politiques de la détention administrative, les conditions inhumaines subies, et les formes de lutte et de résistance à l’intérieur et à l’extérieur des prisons.

Nous appelons à une reconnaissance plus forte de la détention administrative comme forme spécifique d’emprisonnement intégrée au cœur des démocraties libérales.

Nous appelons à la solidarité avec les personnes détenues administrativement et à soutenir leur combat contre ce système, que nous relions à la violence carcérale en général.

Abolissons tous les centres de détention !
Brûlons les prisons !
Liberté pour la Palestine – Stop au génocide, fin de l’occupation !
Libérons tou·te·s !


Le cadre juridique de la détention administrative en Grèce

Intervention de Maria, avocate et camarade en Grèce

Depuis 2021, je prends en charge des dossiers de personnes détenues administrativement. Ce régime est ordonné par le directeur de police dès que les migrant·e·s sont suspecté·e·s de fuite, trouble à l’ordre public ou obstruction à leur départ. Si aucune objection n’est formulée dans les 48 h, une obligation d’expulsion est délivrée et la détention prolongée jusqu’à l’expulsion, qui peut durer jusqu’à 18 mois.

Les détenu·e·s doivent être informé·e·s dans une langue comprise. En pratique, c’est rarement respecté et difficile à prouver. Les contestations doivent d’abord passer devant le directeur de police dans les 48 h, puis devant le tribunal administratif. Le recours n’est pas suspensif mais peut être annulé si de nouveaux éléments émergent.

En pratique, à Athènes, il reste possible de contester la décision à tout moment. Le prétendu « risque de fuite » est souvent invoqué pour absence d’adresse fixe ou de moyens financiers, facilement résolus par contrat de logement ou déclaration d’hébergement. Les jeux d’identité (passeport valide/expiré) montrent que le système fonctionne contre les intéressé·e·s.

Le risque supposé à l’ordre public se fonde sur des condamnations à plus d’un an : souvent ces mentions sont vagues, des avocat·e·s doivent vérifier le dossier judiciaire. Les conditions de détention peuvent également être contestées (santé, absence de soins), notamment au centre d’Amygdaleza où le médecin ne passe qu’une fois par semaine, sans prise en charge des consommations ou addictions. Le manque d’assistance médicale et le caractère invisible de ces centres renforcent l’urgence de dénoncer ces situations.

La vie de famille et l’intérêt de l’enfant doivent être considérés : en théorie, la détention de mineurs est interdite, mais récemment des familles ont été enfermées pour des motifs arbitraires. La détention des demandeur·euse·s d’asile est illégale sauf exception (établissement des documents, risque à l’ordre public). Or, l’absence d’interprètes prolonge la détention administrative via le ralentissement des demandes d’asile.

En Grèce, l’assistance juridique par l’État est quasi inexistante, sauf pour certains demandeur·euse·s d’asile, et là encore les contacts sont difficiles. Connaître le système permet de l’utiliser dans la lutte jusqu’à l’abolition totale des centres de détention.

Q : Combien de Palestinien·ne·s sont détenu·e·s administrativement en Grèce ?
R : Dans la première moitié de 2024, on compte environ 600 Palestinien·ne·s sur un total de 12 700 personnes détenues administrativement.

Q : Ces détenu·e·s ont-ils·elles un dossier d’asile rejeté ?
R : Non. On peut être en cours de procédure d’asile tout en étant détenu·e, surtout le temps de vérifier son identité. Deux personnes contactées à Korinthos, rescapées d’un naufrage, ont été détenues immédiatement et privées du droit d’asile – stratégie fréquente aux frontières, notamment autour de Victoria à Athènes. Si l’on tente de contester la détention illégale, on vous rejette l’asile puis on vous redétient…

Q : Quel est l’accès aux soins ?
R : Les juges ignorent souvent la santé dans leurs décisions. Les centres refusent l’accès aux médicaments et les visites médicales sont rares. Les détenu·e·s malades sont quasiment abandonné·e·s.


Carte des centres de détention en Palestine
Carte des centres de détention en Palestine

Le cadre juridique de la détention administrative en Palestine

Intervention d’un avocat·e palestinien·ne expérimenté·e

Les lois dérivent du règlement britannique de 1945 et ont été utilisées prolifiquement contre les Palestinien·ne·s dans les années 1970, puis après l’occupation de 1967 via des ordres militaires. Les officiers militaires peuvent arrêter « sur base d’informations secrètes » pour 1 à 6 mois, reconductibles à l’infini : certain·e·s passent 5 ou 8 ans en détention administrative.

La loi de 2002 a prolongé ce régime aux non-Israéliens, sans limitation à six mois. En 2005, après le retrait de Gaza, les Gazou·euse·s sont désignés comme « non-occupés » et après octobre 2023, Israël a arrêté des milliers de personnes sous ce régime sans divulguer le nombre exact : en sept. 2024, l’État en annonçait 3 400, mais nous estimons le chiffre à plus de 10 000 détenu·e·s. Avant octobre 2023, environ 1 200 Palestinien·ne·s étaient détenu·e·s en Cisjordanie.

La détention administrative est une torture : ni la personne, ni sa famille ne connaissent sa durée d’enfermement. Les prolongations sont parfois communiquées seulement le jour même, tard le soir, créant un état d’incertitude permanente. Les détenu·e·s se mobilisent via grèves de la faim individuelles ou collectives. En 2014, elles ont duré 9 semaines, interrompues du fait d’attaques militaires. En 2012, Khader a subi une grève individuelle de 66 jours et obtenu sa libération ; sa 6ᵉ grève dura 87 jours : il est décédé le 1ᵉʳ mai 2023.

En 2023-2024, avec le nombre record de détenu·e·s administrativement, la grève semble exclue politiquement, car l’attention est centrée sur le génocide de Gaza. Deux jours avant l’événement, des mois de détentions ont été prononcés contre un·e mineur·e de 14 ans.

Les détenu·e·s administrativement sont incarcéré·e·s dans les mêmes établissements que les autres prisonnier·ère·s palestinien·ne·s, dans des conditions inhumaines : fouilles, violences physiques, confiscation de tout, interdiction des visites familiales, interdiction de la Croix-Rouge, fermeture des centres médicaux. En 2024, 62 détenu·e·s sont morts, souvent après avoir été refusé·e·s par les établissements hospitaliers extérieurs ; depuis 2015, les corps sont retenus par l’administration pénitentiaire.

Q : Les changements de gouvernement modifient‑ils ces pratiques ?
R : Aucune différence : ces dispositifs sont institutionnalisés par le système judiciaire, y compris la Cour suprême israélienne. La détention administrative a explosé après les accords d’Oslo et après les deux intifadas – la seconde a vu jusqu’à 12 000 détenu·e·s.

Q : Quel est l’accès aux avocat·e·s ?
R : Il existe des restrictions sévères : les avocat·e·s peuvent être interdits de visite jusqu’à 6 mois. Actuellement, la situation s’améliore légèrement, avec 5 à 7 visites par mois, mais souvent très courtes (5‑7 minutes), interdiction d’apporter des notes écrites, parfois des avocat·e·s sont accusé·e·s de soutenir le terrorisme.


(Image) Manifestation pour les prisonnier·ère·s palestinien·ne·s en Palestine
(Image) Manifestation pour les prisonnier·ère·s palestinien·ne·s en Palestine

Témoignage de Hadeel – activiste et ex-détenue en Palestine occupée

« Je suis libre aujourd’hui… à la frontière avec la Jordanie, ils m’ont arrêtée sans rien demander, en me disant : ‘tu es sous détention administrative’… pendant 22 jours… ils m’ont dit ‘six mois’… puis un nouvel ordre de quatre mois… »

Elle décrit une cellule isolée, des conditions inhumaines – humidité, sous-nutrition, absence de soins, isolement, tortures physiques et psychologiques : coups, fouilles à nu, matraquages, gaz lacrymogène, menottes y compris en audience. Hadeel perd 22 kg, a subi des violences continues, souvent isolée, privée de soins et de contacts familiaux. Son unique force : la solidarité entre détenu·e·s palestinien·ne·s, conscientes de lutter pour la vie et la cause. Elle observe des violences similaires dans le monde occidental contre les solidarités pro-palestiniennes, et appelle à la lutte anti-impérialiste et commune des mouvements en Europe et aux États-Unis.


Carte du centre d’Amygdaleza, près d’Athènes
Carte du centre d’Amygdaleza, près d’Athènes

Témoignage d’Amin – ex-détenu en Grèce

Amin a été arrêté deux fois. Sa première incarcération à Allodapon fut un enfer : confiscation totale, isolement, absence de contact familial, et cohabitation sans langue commune. Sa deuxième détention à Amygdaleza dura trois mois dans des conditions insupportables : sans eau, sans climatisation, nourriture de piètre qualité, impossibilité de cuisiner. Puis il fut transféré à Serres, puis à Drama/Paranesti, camp militaire fermé, sans téléphone ni intimité. Il décrit la violence psychologique, la solitude et la peur quotidienne de nouvelles arrestations.

Il met en avant l’importance du soutien extérieur : aide juridique, soutien psychologique, suivi après libération – pour lui, l’exil est un état permanent : « une jambe dans la liberté, une jambe en prison ». Après la libération, les ex-détenu·e·s doivent quitter le pays ou faire appel – une procédure longue, fragile, et soumise aux dérives racistes ou fascistes policières.

Amin refuse l’image de victime, il revendique le choix de sa lutte et appelle à la solidarité organisée avec les prisonnier·ère·s.


Abolissons tous les centres de détention !
Brûlons les prisons !
Liberté pour la Palestine – Stop au génocide, fin de l’occupation !
Libérons tou·te·s !

Traduction :  Bruxelles Panthères

Source  : against detention center sathens

Émission radio : Détention administrative – Systèmes carcéraux d’apartheid en Palestine et en Grèce
Cette émission est l’enregistrement d’un événement organisé par l’Assemblée contre les centres de détention, en collaboration avec d’autres camarades, le 6 mars 2025 à Athènes.

Radio Program: Administrative Detention: Apartheid Prison Systems in Palestine and Greece


6’17 : Intervention d’un ex-détenu en Grèce – Discours d’Amin
Amin, ancien détenu dans plusieurs centres de détention administrative en Grèce, témoigne de son expérience carcérale, des conditions inhumaines de détention, de la violence psychologique subie, et de la solidarité entre détenu·e·s. Il aborde aussi l’état de vulnérabilité permanente dans lequel les ex-détenu·e·s vivent après leur libération, et l’importance du soutien juridique, moral et matériel pour continuer la lutte.


21’00 : Le cadre juridique de la détention administrative en Grèce – Discours de Maria, avocate et camarade travaillant en Grèce
Maria explique les mécanismes juridiques qui permettent à l’État grec d’enfermer arbitrairement les migrant·e·s sans procès, souvent pour de longues durées. Elle détaille les obstacles légaux, l’absence d’assistance juridique effective, l’opacité des procédures, les conditions de détention dégradantes et les possibilités de recours, tout en appelant à une solidarité active contre cette politique raciste d’enfermement.


29’50 : Le cadre juridique de la détention administrative en Palestine – Discours d’un·e avocat·e palestinien·ne spécialisé·e en droits humains
L’intervention présente le système israélien de détention administrative, hérité du droit colonial britannique et utilisé massivement contre les Palestinien·ne·s depuis 1967. L’avocat·e explique comment cette pratique permet l’enfermement sans inculpation ni procès, renouvelable indéfiniment, et comment elle s’intègre dans un système d’apartheid juridique. Il ou elle évoque aussi les stratégies de résistance, notamment les grèves de la faim, et les conditions de détention systématiquement inhumaines.


50’58 : Militante et ex-détenue en Palestine occupée – Discours de Hadeel
Hadeel partage son expérience en tant qu’ex-détenue administrative dans les prisons israéliennes. Elle décrit l’arrestation arbitraire, l’isolement, les tortures physiques et psychologiques, la privation de soins et la violence systématique. Elle rend hommage à la résistance des prisonnier·ère·s palestinien·ne·s et appelle à la solidarité internationale. Elle relie sa lutte à celles des exilé·e·s, migrant·e·s et détenu·e·s ailleurs dans le monde, notamment en Europe, insistant sur la nécessité d’un front commun contre le colonialisme et l’enfermement.


Fin du programme
« Liberté pour tou·te·s les prisonnier·ère·s !
Brisons les murs de toutes les prisons, d’ici et de là-bas.
À bas les systèmes d’apartheid, en Palestine comme en Europe ! »

Communiqué

La CNDA reconnaît la qualité de réfugié·es aux Palestinien·nes de Gaza persécuté·es en raison de leur nationalité

Le Gisti qui, à l’instar de la LdH, de la Cimade et de Elena, s’était porté intervenant volontaire aux côtés de la requérante, salue cette avancée majeure pour la protection des Gazaoui·es qui réussissent à fuir les massacres en cours.

Nous reproduisons ci-dessous le communiqué diffusé par les organisations qui étaient à l’initiative de ce contentieux.

La Cour nationale du droit d’asile (CNDA) reconnaît le statut de réfugié à une palestinienne.
Cette décision affirme que les Palestinien·nes sont persécuté·es en raison de leur nationalité.

Une Palestinienne de Gaza obtient le statut de réfugié : une décision historique pour le droit des Palestinien·nes. Rendue en Grande Formation, cette décision de principe affirme que les Palestinien·nes de Gaza sont directement et personnellement persécuté·es par les forces d’occupation israéliennes en raison de leur nationalité.

Madame H., rescapée des bombardements, avait saisi la CNDA avec le soutien de l’association La Palestine Nous Rassemble et du Collectif des Avocat·es France Palestine. La Cour était réunie le 20 juin pour trancher une question essentielle : les violences en cours à Gaza relèvent-elles d’un motif conventionnel de persécution, tel que défini par la Convention de Genève de 1951 ? La réponse est oui.

La décision de la CNDA du 11 juillet 2025 affirme que : « Il ressort des informations publiques fiables disponibles que les Palestiniens de Gaza subissent des méthodes de guerre employées par les forces armées israéliennes qui conduisent à un nombre important de victimes et de blessés civils dont une majorité de femmes et d’enfants, une destruction à grande échelle d’infrastructures essentielles à la population civile, comme des points d’approvisionnement et de distribution d’eau et d’électricité, d’hôpitaux ou des écoles et des déplacements forcés de population. De même, les entraves et blocages à l’acheminement de l’aide humanitaire créent un niveau de crise d’insécurité alimentaire pour l’ensemble de cette population et une situation de famine pour 22 % d’entre elle. Ces méthodes de guerre, qui ont pour effet d’affecter directement et indistinctement l’ensemble de la population civile de Gaza depuis la rupture de l’accord de cessez-le-feu du 19 janvier 2025, sont suffisamment graves du fait de leur nature et de leur caractère répété pour constituer une violation grave des droits fondamentaux de l’homme auxquels aucune dérogation n’est possible [… ] et doivent être regardés […] comme des actes de persécution.”

“Les requérants, apatrides palestiniens de Gaza, possèdent les caractéristiques liées à une « nationalité » […], « l’appartenance à un groupe soudé par son identité culturelle, ethnique ou linguistique, ses origines géographiques ou politiques communes, ou sa relation avec la population d’un autre État »”.

“Il résulte de tout ce qui précède qu’en cas de retour dans la bande de Gaza où ils avaient leur résidence habituelle, la requérante et son fils mineur peuvent craindre avec raison d’être personnellement persécutés, du fait de cette « nationalité », par les forces armées israéliennes qui contrôlent une partie substantielle de ce territoire. Ils sont dès lors fondés à se prévaloir de la qualité de réfugiés. »

La CNDA avait déjà jugé que le conflit armé en cours à Gaza constituait un contexte de persécutions systématiques, visant indistinctement les civils palestiniens, en raison de la situation de violences aveugles d’intensité exceptionnelle.

Dans cette nouvelle décision rendue en grande formation la Cour va plus loin et considère que par les méthodes de guerre utilisées, les Palestinien·nes sont ciblé·es en raison de leur appartenance nationale. En qualifiant ainsi les frappes israéliennes d’actes de persécution contre la nation Palestinienne, la juridiction reconnaît que l’armée israélienne ne se défend pas : elle cible, détruit, et tue le peuple palestinien.

Cette décision s’appuie notamment sur les ordonnances rendues par la Cour internationale de justice (CIJ), la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, des rapports de la rapporteuse spéciale sur les territoires palestiniens occupés et d’autres expert·es de l’ONU, .

Comme le rappellent Maîtres Lino et Haigar, avocates des associations requérantes : « La Cour n’est pas compétente pour qualifier un génocide, mais elle utilise les mêmes sources que la CIJ pour conclure que tous les Palestinien·nes de Gaza sont persécutés en raison de leur appartenance nationale. »

Une avancée juridique majeure pour les Palestinien·nes

Cette décision juridique constitue un précédent majeur, ouvrant la voie à une reconnaissance de la qualité de réfugié en France pour tous les Gazaouis fuyant les persécutions par les forces d’occupation israéliennes.

Elle marque une étape décisive. La France et les États membres des Nations Unies doivent désormais s’unir pour prévenir le crime de génocide en cours, protéger la nation palestinienne et mettre fin à l’impunité des autorités israéliennes.

Signataires  :

  • Amnesty International
  • CNASaR
  • Collectif des avocat·es France Palestine

>>Voir la décision de la CNDA et l’ensemble du dossier contentieux

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