En 2010, David Cronin livrait une enquête sur les liens entre l’Europe et Israël. Le journaliste irlandais démontre que malgré les discours en faveur d’une paix en Palestine et du respect du droit humanitaire, de nombreux États (dont la France), l’Union européenne et de grandes entreprises font des affaires avec l’État hébreu sans se soucier du sort des Palestiniens. Un point essentiel pour comprendre l’actuelle inaction des Européens pour engager des sanctions contre Israël en dépit des violations du droit international et des crimes de guerre observés depuis l’engagement des représailles contre le Hamas, les exactions contre les civils à Gaza et en Cisjordanie, les assassinats de journalistes et la destruction des infrastructures à Gaza.
Traduit en 2012, les éditions La Guillotine propose en accès libre le chapitre 6 du livre « Europe Israël, une alliance contre-nature« .
Une alliance contre-nature – Un extrait du livre de David Cronin
L’approfondissement des relations économiques et politiques de l’Europe avec Israël ne peut pas être dissocié de cette empreinte néolibérale. Cela est devenu encore plus clair en novembre 2007 lors du « dialogue commercial UE-Israël », où des hommes d’affaires ont réfléchi sur la meilleure manière de démanteler les « barrières au commerce et à l’investissement ».
Le matériel promotionnel de ce « dialogue » ne disait pas que parmi les entreprises israéliennes présentes, un grand nombre se retrouve impliqué dans des activités en Palestine occupée et dans certains cas dans des activités que l’Union européenne rejette formellement. En voici quelques exemples :
- Elbit : en plus de fabriquer des drones et d’autres armes pour l’armée israélienne, elle fournit des équipements électroniques pour le « mur de l’apartheid » qu’Israël construit. La Norvège a estimé que cette implication était si grave, qu’en septembre 2009 un fonds de pension détenu par l’État a retiré ses six millions de dollars d’investissements dans Elbit car le mur avait été déclaré illégal par la Cour internationale de justice. « Nous ne souhaitons pas financer des entreprises qui participent directement à des violations du droit humanitaire international », a déclaré la ministre des Finances.
- Saban Capital : ce groupe est dirigé par Haim Saban, propriétaire de nombreux médias avec la double nationalité étasunienne et israélienne et qui figurait à la 261ème place du classement Forbes des milliardaires en 2009. Il est l’un des propriétaires de Bezeq, une entreprise de télécommunication qui fournit des services dans les colonies en Cisjordanie et sur le plateau du Golan, ainsi que pour les bases militaires israéliennes et les checkpoints de Cisjordanie. Une de ses filiales, Pelephone, fournit des services de téléphonie mobile à l’armée et a installé une centaine d’antennes et d’autres installations dans les territoires palestiniens occupés.
- Leumi : la seconde plus grande banque d’Israël a des succursales dans quelques établissements israéliens en Cisjordanie. Elle offre des prêts aux colons pour construire leurs maisons. Elle contrôle en partie Paz Oil et SuperPharm qui détiennent des stations services et des pharmacies dans les colonies.
Selon la Commission européenne, l’établissement de ce dialogue est le fruit de conversations commencées en 2005 entre Ehud Olmert et Günter Verheugen, Commissaire à l’industrie. En mettant sur pied cet organe, l’Union européenne a placé le minuscule Israël sur un pied d’égalité avec des pays comme les États-Unis, la Russie, le Japon et l’Inde. D’un certain point de vue, cela semble incroyable. Mais d’une perspective froidement économique, cela prend tout son sens étant donné qu’Israël est un concurrent de la Silicon Valley. Pour encourager les entreprises européennes à s’engager davantage en Israël où le secteur de l’industrie hightech représente 7% du PIB, Verheugen a rappelé : « Il y a un énorme potentiel économique qui n’a pas encore été pleinement exploité. »
Le premier président de ce dialogue a été Yossi Vardi, mieux connu pour être un pionnier dans la messagerie instantanée sur Internet avec son entreprise ICQ. Cet homme n’est pas seulement expert en télécommunication, mais aussi dans la capacité à adapter ses messages en fonction du public. Il a par exemple tenté de se présenter comme une sorte de pacifiste. Bavardant avec le correspondant du New York Times, il a déclaré entre deux gorgées de cabernet sauvignon :
Cet endroit est fou : un boom technologique côtoie une situation politique inacceptable et le chaos dans une bande de Gaza où la plus grande partie de la population vit avec moins de deux dollars par jour. Ce n’est pas juste, ni soutenable ! Vous savez, le pouvoir corrompt et l’occupation représente la manifestation ultime du pouvoir. Il n’existe aucun contrôle, aucune contrepoids. L’occupation, après quarante ans, corrompt totalement.
Vardi a également reconnu avec un malin plaisir que les prouesses technologiques israéliennes étaient inextricablement liées à l’occupation. Dans un reportage de la BBC, il a soutenu que la guerre de 1967 avait été un pivot important pour le développement industriel du pays parce qu’elle avait mené Israël à une situation qui l’avait obligé à dépasser le sentiment d’avoir été banni (particulièrement par la France qui avait imposé un embargo sur les armes) : « Les deux vrais pères de la high-tech israélienne sont le boycott des Arabes et Charles de Gaulle parce qu’ils nous ont contraints à développer ce secteur. »
Photographie : Parlement européen de Bruxelles.
Extrait du livre Europe Israël : une alliance contre-nature de David Cronin, Edition La Guillotine, pages 134 à 136
Europe-Israël, une alliance contre-nature (et contre les Palestiniens)
Europe Israël : Une alliance contre-nature
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Israël est souvent perçu comme le 51ème État des États-Unis. Désormais, il serait en passe de devenir membre de l’Union européenne. David Cronin a parcouru les couloirs de Bruxelles pour interroger hauts fonctionnaires et diplomates. Il a épluché les programmes européens et examiné les liens étroits que tissent les entreprises du continent avec ce petit État du Moyen-Orient. Loin des discours officiels, vous trouverez dans ce livre les résultats d’une enquête déroutante qui montre comment le prix Nobel de la paix 2012 participe à l’occupation de la Palestine et à l’oppression d’un peuple.
Préface d’Omar Barghouti
Un livre important qui explore les relations complexes empêchant les pays européens de tenir Israël pour responsable. Ken Loach
Un livre remarquable, précis. Je suis resté le souffle coupé. Robert Fisk, The Independent
Une étude bienvenue pour une réalité sous-examinée. Khaled Diab, The Guardian
David Cronin est un journaliste irlandais. Il a été rédacteur pour The Guardian, The Wall Street Journal Europe, European Voice, The Sunday Tribune et Inter Press Service. Il travaille actuellement pour The Electronic Intifada et vit à Bruxelles. Ce livre est la traduction de Europe’s Alliance with Israel paru chez Pluto Press en novembre 2010. Son blog : http://www.dvcronin.blogspot.fr/ ET articles traduits en français par Investig’Action
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ISBN : 978-2-9543806-0-5
224 pages
13 x 20 cm
Prix : 15 €
Dépot légal : décembre 2012
Edition La Guillotine
Imprimé à Toulouse par la SCOP Imprimerie 34
Interview de David Cronin – L’Europe, Israël et le lobbying
Si les américains ont eu droit au fabuleux travail de John Mearsheimer et Stephen Walt dans leur ouvrage intitulé « Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine », l’Europe n’a pas à rougir puisque le journaliste irlandais David Cronin nous livre un remarquable ouvrage sur les relations entre l’Union Européenne et Israël sous le titre « Europe Israël : Une alliance contre-nature », publié aux éditions La Guillotine.
David Cronin sait de quoi il parle puisqu’il a fréquenté durant sa carrière de journaliste énormément de hauts fonctionnaires et diplomates européens. Si l’UE nous rappelle sans cesse qu’elle est la plus grande donatrice de l’Autorité Palestinienne, elle est aussi le plus grand soutien à l’occupation israélienne. David Cronin, à travers ce livre, nous montre comment Israël – considéré comme le 51e Etat des Etats-Unis d’Amérique – tisse désormais des liens très étroits avec l’Union Européenne. L’enquête de M. Cronin nous démontre comment les partenariats concernant le domaine civil permettent aussi le développement du domaine militaire israélien, donc du massacre des palestiniens durant chaque conflit.
>>> ECOUTER OU LIRE L’INTERVIEW PAR LE CERCLE DES VOLONTAIRES