6 avril 2009 16:54
Voilées ou pas nous exigeons l’égalité… sans guillemets !
Le Conseil d’État a rendu ce 02 avril 2009 deux arrêts importants et identiques dans leurs conclusions, relatifs au port du voile dans les établissements scolaires relevant de la Communauté française de Belgique.
Les règlements l’interdisant sont maintenus. La motivation du Conseil d’État n’est pas anodine.
Le Conseil d’État décide que des règlements scolaires qui interdisent le port du voile contribuent à promouvoir la paix et la fraternité.
Les jeunes filles et les femmes qui portent le foulard ne sont pas des Belges entre guillemets, elles sont d’ici, partie intégrante de notre société. Même si nombre d’entre elles sont doublement exclues : d’abord parce qu’elles sont femmes et ensuite parce qu’elles appartiennent à un groupe social stigmatisé.
On ne compte plus les « vrais-faux » lapsus qui transforment dans la bouche des politiques et des journalistes, des citoyen(ne)s belges en immigré(e)s pour l’éternité.
Si l’on ne peut les convertir a notre universalisme, au moins leur interdira-t-on ainsi l’entrée des écoles, des administrations, des hôpitaux, etc… Ne pouvant les renvoyer « chez eux/elles » puisque ils/elles sont ici chez eux, on peut – on sait y faire ! – les traiter en citoyen(ne)s de seconde zone, en indésirables, en caste inférieure.
Tant que la Belgique refusera de donner aux descendants des peuples qu’elle a colonisés l’égalité promise par sa Constitution, par ses lois internes autant que par ses obligations internationales, la Belgique aura des problèmes. Des foulards, dont l’interdiction exacerbera la visibilité au lieu de la réduire, mais peut-être aussi d’autres réactions d’amertume un peu plus méchantes de la part des groupes discriminés. « Qui sème l’injustice récolte la colère », non ? On ne peut pas constamment mépriser, écraser, exclure, sans provoquer un jour une révolte.
La Belgique ne pourra tenir sa promesse d’égalité tant qu’elle refusera de regarder en face l’inégalité illégale tous les jours perpétrée : la discrimination permanente à tous les niveaux – emplois, école, administration, logement… Il n’y a pas un acte de la vie quotidienne qui soit indemne d’un racisme latent à l’égard de ceux que notre histoire coloniale continue à nous faire considérer comme des sous-êtres.
Pour l’instant, ce pays vit très bien avec ces discriminations – du moins le croit-il – et applique de fait, sinon de droit, le système de la préférence nationale et de la préférence masculine de façon éhontée. Et l’on veut encore ajouter une loi inique et raciste au contentieux ? Comment des juges peuvent-ils soutenir une loi qui aboutit à exclure des jeunes filles de l’école, souvent leur seul lieu d’émancipation ?
Chacun sait que cette loi qu’on nous présente comme une loi pour la laïcité vise en premier lieu le foulard en tant que signe visible d’une religion crainte et fantasmée, celle des « nouvelles classes dangereuses ».
Nous manifestons très fermement notre opposition à toute loi stigmatisant l’islam, et les femmes musulmanes en particulier. Nous en appelons à un débat de fond sur toutes ces questions à travers des discussions, contributions, rencontres, débats publics…, et aussi à lutter ensemble, en tant que démocrates et féministes, athées ou pas, voilées ou pas, contre toutes les discriminations et pour l’Egalité…sans guillemets.
Le 07 juin votez pour l’Egalité entre tous les citoyens !
Nordine Saïdi