L’affaire Tariq Ramadan: une autre « affaire Dreyfus »?/Tariq Ramadan-second Dreyfus Affair of France?
Feb 19, 2018 — (*English below)
L’AFFAIRE TARIQ RAMADAN: UNE AUTRE « AFFAIRE DREYFUS »?
Par Saliha Tuna
En décembre 1894, avec la montée de l’antisémitisme politique en France, le capitaine, officier juif de l’armée française, avait été injustement condamné pour haute trahison et condamné à la prison à vie par le tribunal militaire français.
Alors que ses rangs militaires et ses armes étaient dépouillés en présence d’une foule antisémite scandant « la mort aux Juifs » devant la célèbre Ecole Militaire de Paris, l’Affaire Dreyfus est entrée dans l’histoire comme le précurseur des crimes horribles commis contre la population juive de France sous le régime de Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale.
Le prétendu crime dont était accusé Dreyfus était de communiquer des secrets militaires français à l’ambassade d’Allemagne à Paris, et était basé sur quelques notes manuscrites trouvées dans la corbeille à papier de l’ambassade d’Allemagne.
Peu de temps après la condamnation de Dreyfus par le tribunal militaire français, de nouvelles preuves ont montré que l’écriture manuscrite sur les notes appartenait en réalité à un autre officier majeur de l’armée française, Ferdinand Esterhazy.
Néanmoins, les éléments de preuve ont été étouffés par certains des officiers de haut rang de l’armée et de la justice françaises, pour « sauver l’honneur de l’armée française et la stabilité politique de la France » et Dreyfus a été condamné une deuxième fois, cette fois basée sur des documents supplémentaires nouvellement fabriqués.
Après la révélation des preuves de l’innocence de Dreyfus, et surtout après la publication dans un journal parisien de la lettre ouverte historique du célèbre romancier français Emile Zola, s’adressant au président de la République, accusant les hauts fonctionnaires français de complicité dans la conspiration contre Dreyfus, l’opinion publique française ne pouvait plus ignorer les injustices explicites commises dans cette affaire.
La déclaration de Zola attira l’attention de beaucoup d’autres intellectuels français sur l’affaire.
La République française était ébranlée et il était évident que le calme et la stabilité de la nation ne pouvaient être rétablis sans que l’affaire Dreyfus fût résolue.
C’est pourquoi en 1899 peu après sa seconde condamnation par le tribunal militaire français, le président de la France se sentit obligé de pardonner à Dreyfus, mais son innocence ne fut officiellement reconnue qu’en 1906 par une décision de la Cour suprême française, puis il fut réintégré dans l’armée avec le grade de major.
L’affaire Dreyfus est restée l’une des plus grandes hontes de l’histoire politico-juridique de la France, par laquelle un innocent a été persécuté avec des motifs politiques et racistes avec la complicité des médias français et de hauts fonctionnaires français.
Près de 125 ans après l’affaire Dreyfus, nous assistons en France à un autre assassinat de caractère avec des motives politique et raciste, qui ne vise pas cette fois-ci un officier juif, mais un autre assassinat politique à caractère raciste, qui ne vise pas cette fois-ci un officier juif, mais un intellectuel musulman européen très influent, le Docteur Tariq Ramadan, déjà jugé et exécuté par le les médias français et désigné comme le « violeur musulman » et mis en prison par la justice française, avant même la construction de l’acte d’accusation formel contre lui par le parquet de Paris !
La similitude entre les deux cas ne se limite pas aux motivations politiques et racistes qui les sous-tendent, mais inclut également la complicité de certains hauts fonctionnaires français dont le véritable devoir était de substituer la justice.
Selon les informations et les rapports des groupes de défense des droits de l’homme, une preuve cruciale montrant que le Dr Ramadan n’était même pas présent dans le prétendu lieu de crime à l’heure présumée a été déposée à la police française par les avocats de la défense le 6 décembre.
La preuve s’est mystérieusement perdue et n’a pas été incluse dans le dossier du Dr Ramadan jusqu’à sa détention en février.
La «perte» de cet élément crucial de preuve attire toute l’attention sur le parquet de Paris qui est, selon la loi française, le directeur de la police judiciaire chargée de l’enquête sur le docteur Ramadan.
Le procureur général de Paris, M. François Molins, qui est actuellement en charge de l’affaire du Dr Ramadan, est un magistrat qui s’occupe habituellement des affaires de «terrorisme islamique» relevant de la juridiction nationale.
C’est lui qui enquêtait sur les attentats terroristes majeurs en France: les assassinats perpétrés par Mohammed Merah en 2012, l’attentat de Charlie Hebdo, l’attentat de Nice du 14 juillet 2016, etc.
Considérant que la première plainte contre le Dr Ramadan a été déposée au Parquet de Rouen et que celle-ci est la juridiction naturelle de l’affaire, la renonciation incompréhensible de compétence de ce dernier à M. François Molins soulève de sérieuses questions sur si le Dr Ramadan fait l’objet d’une enquête à cause d’un crime ordinaire ou simplement parce qu’il est «musulman».
Un autre indicateur de l’abus de pouvoir public dans le cas du
Dr Ramadan est révélé par la confession publique d’un célèbre anti-musulman français et adversaire de longue date du Dr. Ramadan, Caroline Fourest, révélant qu’elle avait organisé une réunion en 2009 entre un magistrat français de haut rang appelé Michel Debacq qui occupe maintenant un bureau à la Cour de Cassation de France et l’accusateur anonyme appelé « Christelle », apparemment en préparation d’intenter une action contre le Dr Tariq Ramadan qui suscite également de sérieux doutes sur l’impartialité des autorités françaises compétentes dans l’affaire du Ramadan.
Depuis le tout début du processus, le droit à la présomption d’innocence du Dr. Tariq Ramadan a été constamment violé par les médias français, avec un ton islamophobe nauséabond dans tous les reportages couvrant son cas.
Peu de temps après, la justice française est devenue complice de cette violation par le processus d’enquête indu appliqué au Dr Ramadan et en le plaçant en détention indéfinie malgré la bonne volonté et la pleine coopération manifestées par lui pendant le processus d’enquête.
En outre, nous apprenons des rapports que le Dr Tariq Ramadan a été placé dans une cellule d’isolement dans l’aile haute sécurité de la prison de Fleury-Mérogis à Paris, sans aucune raison légale compréhensible.
Maintenant, l’affaire Tariq Ramadan attend son propre Emile Zolas, qui sortira de l’intelligentsia française non-musulmane et dont le devoir historique serait d’attirer l’attention sur cette injustice flagrante qui se déroule actuellement en France.
Les enseignements tirés de l’histoire nous montrent que cette conspiration complotée contre le Dr Tariq Ramadan avec les motivations explicitement anti-musulmanes, ne vise pas seulement la personnalité d’un seul musulman, mais toute la communauté musulmane de France et d’Europe.
Et ceux qui ont choisi de ne pas parler contre l’injustice évidente commise contre le Dr Tariq Ramadan seront jugés par l’histoire comme les complices d’un crime beaucoup plus grand commis contre toute une communauté musulmane européenne.
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TARIQ RAMADAN CASE: THE SECOND “DREYFUS AFFAIR” OF FRANCE?
By Saliha Tuna
In December 1894, on the rise of political antisemitism in France, Captain Alfred Dreyfus, a Jewish officer of the French army was unjustly convicted for high treason and sentenced to life imprisonment by the French Military Court.
As his military ranks and weapons were stripped off in the presence of an antisemitic crowd chanting “death to the Jews” in front of the famous Ecole Militaire of Paris, the Dreyfus Affair passed into history as the forerunner of horrific crimes committed against the Jewish population of France under the Vichy regime during the Second World War.
Dreyfus’ alleged crime was communicating French military secrets to the German Embassy in Paris, and was based on some hand-written notes found in the wastebasket of the German Embassy.
Soon after Dreyfus’ conviction by the French military court, new evidence showed that hand-writing on the notes actually belonged to another Major Officer in the French army, named Ferdinand Esterhazy.
Nevertheless, this evidence were suppressed by high-ranking officers in the French Military and Justice, on account of “saving the honour of the French army and the political stability of France”.
Dreyfus was convicted for a second time, this time based on additional newly fabricated documents.
After, evidence came to light indicating Dreyfus’ innocence.
Especially after the publication in a Parisian newspaper of a historic open letter by famous French novelist Emile Zola, directly addressing the president of France, accusing high ranking French public officers as accomplices in the conspiracy against Dreyfus.
French public opinion could no longer ignore the explicit injustices committed in this affair.
Zola’s declaration engaged many other French intellectuals’ attention to the case.
The French Republic was shaken at its cores and it was obvious that the calm and stability of the nation couldn’t be restored without getting the Dreyfus affair resolved.
That’s why in 1899 shortly after his second conviction by the French military court, the president of France felt obliged to pardon Dreyfus.
Yet his innocence was officially recognized only in 1906 through a decision of the French Supreme Court and then he was reinstated in the French army with the rank of Major.
The Dreyfus affair remained one of the biggest disgraces in the politico-legal history of France, by which an innocent man was persecuted with political and racist motives with complicity of the French media and high-ranking public officials of France.
Nearly 125 years after the Dreyfus Affair, we are witnessing another racist and politically motivated character assassination in France, this time not targeting a Jewish military officer, but a highly influential European Muslim intellectual, Dr. Tariq Ramadan.
He has already been judged and executed by the French media as a “rapist Muslim” and put into prison by the French justice, even before the preparation of the formal bill of indictment against him by the Paris Prosecutor’s Office.
The similarity between the two cases is not limited to the political and racist motivations underlying them, but also includes complicity of some high rank French public officials.
According to the news and human rights groups’ reports, a crucial piece of evidence demonstrated that Dr. Ramadan wasn’t even present when the alleged crime took place.
This was submitted to prosecutors by the defence attorneys December 6, the evidence got mysteriously « lost » and wasn’t included in Dr. Ramadan’s file until his detention in February.
The “loss” of this crucial piece of evidence draws attention to the Paris Public Prosecutor’s Office which is, according to French law, the director of the Judicial Police conducting the investigation on Dr. Ramadan.
Since the very beginning of the process, the right to presumption of innocence of Dr. Tariq Ramadan has been constantly violated by the French media, along with a toxic anti-Muslim tone all over the news reports covering his case.
The Public Prosecutor of Paris M. François Molins, currently in charge of Dr. Ramadan’s case is a magistrate who usually deals with “Islamic terrorism” cases with national jurisdiction.
He been responsible for investigating major terrorist attacks in France: the killings perpetrated by Mohammed Merah in 2012, the Charlie Hebdo attack, Nice attack of July 14, 2016, and so on.
Considering that the first complaint against Dr. Ramadan was filed at the Rouen Public Prosecutor’s Office who would have natural jurisdiction over the case, the incomprehensible waiver of jurisdiction being moved to the Paris Prosecutor’s office under M. François Molins raises serious questions on whether Dr. Ramadan is under investigation because of an ordinary crime or just because he is a “Muslim”.
Another indicator of abuse of public power in Dr. Ramadan’s case came to light by the public confession of a well-known French anti-Muslim and long-time adversary of Dr. Ramadan, Caroline Fourest.
She revealed arranginga meeting in 2009 between a high rank French magistrate Michel Debacq who is now holding an office in the Court of Cassation of France and the anonymous accuser “Christelle”.
Apparently this was to prepare to bring an action against Dr. Tariq Ramadan. This also is cause for serious doubts on the impartiality of relevant French authorities addressing the Ramadan Case.
Shortly after, French justice became a complicit in this violation by the undue investigation process applied to Dr. Ramadan and by putting him under indefinite detention despite the goodwill and full cooperation shown by him during the investigation process.
On top of all, we learn from the reports that Dr. Tariq Ramadan has been put into an isolation cell in the high-security wing of Paris’ Fleury-Mérogis prison, without any understandable legal motive.
Now, the Tariq Ramadan affair awaits for its own Emile Zolas, who shall come out from the non-Muslim French intelligentsia and whose historic duty would be to call out this blatant injustice currently taking place in France.
Lessons taught by the history shows us that this conspiracy plotted against Dr. Tariq Ramadan with explicit anti-Muslim motives, does not target only the personality of a single Muslim man, but the whole Muslim community of France and Europe.
And those who chose not to speak up against the obvious injustice committed against Dr. Tariq Ramadan will be judged by history as accomplices of a much bigger crime committed against a whole European Muslim community.