Nous sommes allés dans les camps de Chatila, Borj Al Barajneh, Marelias, Nahr Al Bared, Badawi, Ain El Hilweh et Rachidiya. Partout la même pauvreté, la même surpopulation, les étroites ruelles, les fils électriques branchés les uns sur les autres, les ateliers pour les petits boulots… mais partout aussi la même volonté inébranlable de retourner dans leur pays, la Palestine.
La Nakba : 65 ans de mystifications, mais la vérité finit toujours pas éclater
Comme la fameuse « terre sans peuple pour un peuple sans terre », la légende sioniste consistant à dire « ils ont pris la fuite », en parlant des centaines de milliers de Palestiniens chassés de leurs terres en 1948, a sérieusement pris du plomb dans l’aile, 65 ans après ce qui est désormais désigné par le terme « nakba » qui signifie « catastrophe ».
Avant de nous montrer ces images, on nous a longtemps caché celles-ci :
Qui correspondent aux massacres perpétués par des milices juives dans des villages palestiniens comme celui de Deir Yassine, près de Jérusalem, le 9 avril 1948, où hommes, femmes et enfants ont été assassinés, violés, et certaines femmes enceintes éventrées, afin de mieux terroriser la Palestiniens et les obliger à fuir.
L’histoire officielle d’Israël a reposé, depuis 1948, sur le mensonge consistant à dire que les 800.000 Palestiniens qui ont pris le chemin de l’exil et sont devenus des réfugiés seraient partis volontairement, à la demande des Etats arabes environnants. En réalité, l’expulsion, par tous les moyens, du maximum d’habitants non juifs de la Palestine, et la conquête du maximum de leurs territoires, fut un objectif constant du sionisme, aussi ancien que l’idée même, exprimée pour la première fois à la fin du XIXème siècle, de création d’un Etat juif en Palestine.
« Les Arabes doivent partir, mais nous avons besoin d’un moment favorable pour que cela arrive, par exemple une guerre », écrivait en 1937, dans une lettre à l’un de ses fils, le chef de file du mouvement sioniste et futur fondateur de l’Etat d’Israël, David Ben Gourion.
Avec la fin annoncée, à partir de 1947, de la présence britannique, les dirigeants sionistes constatent que le rapport de forces, diplomatique et éventuellement militaire, leur est désormais favorable.
Le 10 mars 1948, une dizaine de responsables réunis par David Ben Gourion approuvent les derniers détails de leur « plan D ». Il comporte la description de tous les villages de Palestine, avec des détails sur la manière d’attaquer militairement chacun d’entre eux, d’en chasser les habitants, et même d’exécuter sommairement des centaines d’hommes, considérés comme « suspects », dont des listes nominatives ont été soigneusement dressées. Le « plan D » est ensuite distribué, pour application immédiate, aux officiers des 12 brigades de la Haganah, l’armée juive, qui connaît à ce moment un développement fulgurant, tant en effectifs qu’en équipement moderne.
De la mi-mars au 15 mai 1948 — date programmée du départ du dernier soldat britannique de Palestine — se déroule alors, non pas comme le rabâche l’histoire officielle, la « première guerre israélo-arabe », mais la vaste opération de nettoyage ethnique lancée par une Haganah forte de 90.000 hommes, auxquels la résistance palestinienne ne saura opposer que quelques milliers de miliciens villageois à l’armement dérisoire.
Dès la fin du mois de mars, au moins trente villages arabes ont été rayés de la carte, selon le schéma : encerclement de la localité, rassemblement de la population, ordre donné de fuir, mise à l’écart des « suspects » et leur exécution immédiate. Après une phase de pillages et de violences diverses, suit la destruction de toutes les maisons jugées impropres à un habitat juif, voire du village entier, sur les ruines duquel seront édifiés des kibboutz et autres colonies juives.
Destruction des livres palestiniens pendant la nakba
Un des épisodes les plus sanglants de la période est resté dans les annales : le massacre des villageois de Deir Yassin, près de Jérusalem, le 9 avril 1948. Les dirigeants de l’Etat juif ont longtemps mis cette exaction sur le compte de la milice dite « extrémiste » de l’Irgoun, et ont juré leurs grands dieux que jamais la Haganah n’aurait pu tuer délibérément des femmes et des enfants. Faux ! Non seulement parce qu’il y a eu beaucoup d’autres villages martyrs, où la Haganah a opéré en solo, mais parce que la Haganah a bel et bien participé elle-même à la tuerie de Deir Yassin.
Après les villages, les villes : successivement, les principales villes palestiniennes sont attaquées, à Jaffa, Nazareth, Tibériade, à Acre et à Haïfa, dont les habitants arabes sont contraints par milliers de fuir par la mer.
Parmi les épisodes les plus spectaculaires de cette phase de la tragédie palestinienne, on peut citer les « exploits » de deux jeunes officiers israéliens promis à de brillantes carrières, Moshe Dayan et un certain Yitzakh Rabin, qui ordonnent l’expulsion des 70.000 habitants des villes arabes de Lydda (Lod) et Ramleh. L’exode des Palestiniens, jetés sur les routes sans vivres, sans eau et sous un soleil de plomb, se transforme en marche de la mort pour des centaines d’enfants et de vieillards.
Lorsque s’achève cette première phase, au cours de laquelle les armées des pays arabes avoisinants ne sont pas encore intervenues, plus de 10.000 Palestiniens, dont une large majorité de civils désarmés, ont été tués par les forces sionistes, et 300.000 au moins ont été chassés.
Les dirigeants des Etats arabes, pas plus que les dirigeants sionistes, ne souhaitent l’établissement d’un Etat arabe indépendant en Palestine. C’est pourquoi, lorsqu’ils interviennent en Palestine après le 15 mai, il s’agit principalement pour eux, de faire acte de présence pour apaiser l’émotion de leurs propres opinions publiques émues par la tragédie de leurs frères palestiniens, et ils n’envoient que des contingents réduits, inférieurs numériquement et en armement à la puissance israélienne. Finalement, les combats avec les armées arabes, interrompus à plusieurs reprises sur injonction des Nations et Unies, où chaque grande puissance (Grande-Bretagne, Etats-Unis, Union Soviétique principalement) n’a pas encore clairement déterminé qui pouvaient être ses alliés ou vassaux régionaux, feront un seul perdant incontestable, la population palestinienne. Ils permettront au roi de Jordanie de s’emparer de la Cisjordanie et de la moitié de Jérusalem, à l’Egypte d’occuper la minuscule bande de Gaza encombrée de centaines de milliers de réfugiés palestiniens chassés par le nouvel Etat juif, et à celui-ci de s’agrandir au point d’occuper 78% du pays. Au plan territorial, cette situation restera dans l’ensemble figée jusqu’en 1967.
CAPJPO-EuroPalestine
ENGLISH TRANSLATION
« 1948 : They fled »
Since 1948 the official history of Israel has been based on the lie that the 800,000 Palestinians who became refugees had left voluntarily, at the request of the surrounding Arab states. The reality is that the expulsion, using any methods, of a maximum number of non-Jewish inhabitants of Palestine had always been aim of zionism, one as old as the idea, first mooted at the end of the 19th century, of the creation of a Jewish state in Palestine.
« The Arabs must leave, but we need the right time for that to happen, for example, a war ». This was written in 1937, in a letter to one of his sons, by the leader of the zionist movement and future founder of the State of Israel, David Ben Gurion.
With the announced departure, as of 1947, of the British presence, the zionist leaders saw that the balance of power, both diplomatic and military, was from then on in their favour.
On 10 March 1948, a group of officers convened by Ben Gurion approved the final details of their « Plan D ». It contained a description of every village in Palestine, with detailed plans to attack each one of them, to drive out their inhabitants, and even to summarily execute hundreds of men, whose names had been put onto a list of « suspects ». « Plan D » was then distributed, for immediate execution, to the officers of the 12 brigades of the Haganah, the Jewish army, which was then being developed at lightening speed, in terms of numbers as well as modern equipment.
From mid-March until 15 May 1948 – the planned departure date of the last British soldiers from Palestine – it was not « the first Israeli-Arab war », as the official story would have it, but instead a vast ethnic-cleansing operation launched by a 90,000-strong Haganah – up against which the Palestinian resistance could only muster a few thousand village militiamen with pitifully few weapons. From the month of March, at least thirty Arab villages were wiped off the map, in accordance with the plan : first surround the village, then round up the population, give the order to flee, and take aside the « suspects » for immediate execution. Following the pillaging and violence, all the houses judged unsuitable for Jewish dwellings were destroyed, sometimes all the houses in an entire village, on the ruins of which would be built the kibbutz and other Jewish colonies.
One of the most bloody episodes has stayed in the annals of history : the massacre of the villagers of Deir Yassin near Jerusalem on 9 April 1948. The leaders of the Jewish state blamed the so-called « extremist » militia of Irgun and swore that Haganah could never have deliberately killed women and children. False ! Not only because there were many other martyred villages, where Haganah was operating on its own, but also because Haganah did indeed take part in the carnage at Deir Yassin. . After the villages came the towns : the major Palestinian towns of Jaffa, Nazareth, Tiberiad, Acre and Haifa were attacked and their Arab inhabitants had to flee in their thousands.
Amongst the most spectacular episodes of this phase of the Palestinian tragedy, one can cite the « exploits » of two young Israeli officers destined for brilliant careers : Moshe Dayan and a certain Yitzakh Rabin, who ordered the expulsion of the 70,000 inhabitants of the Arab towns of Lydda (Lod) and Ramleh. The exodus of the Palestinians, forced to take flight with no food or water and under a sweltering sun, turned into a death march for hundreds of children and old people.
When this first phase was completed, during which there was no intervention by the neighbouring Arab countries, more than 10,000 Palestinians, most of whom were unarmed civilians, were killed by the zionist forces and at least 300,000 were forced to flee.
The leaders of the Arab states, just like the zionist leaders, did not wish to see the creation of an independent Arab state in Palestine. That is why, when they did intervene in Palestine after 15 May, it was merely designed to calm the emotions of their own public opinion, moved by the unfolding tragedy of their Palestinian brethren ; they sent small forces which were inferior in number and weapons and no match for the power of the Israelis.
Finally, the battles with the Arab armies were interrupted on several occasions by order of the United Nations, whose major powers – principally Great Britain, the USA and the USSR – had not yet clearly determined who could be their allies or regional puppets. They allowed the king of Jordan to take over the West Bank and half of Jerusalem, and Egypt to occupy the tiny Gaza Strip, saturated with hundreds of thousands of Palestinian refugees who had been chased away by the new Jewish state. The latter was allowed to increase its size to occupy 78% of the land. There was one undisputed loser in the struggle : the Palestinian people. The situation on the ground remained unchanged until 1967.
CAPJPO-EuroPalestine