« Les grévistes de la faim ont une revendication légitime »

Trois questions à Alexis Deswaef.

 

Stéphanie Lecocq

 

Alexis Deswaef est avocat. Il est aujourd’hui par ailleurs président de la Ligue des droits de l’homme.

 

La Ligue soutient-elle la grève de la faim menée à la VUB ?

 

La Ligue est contre la grève de la faim. Nous estimons que cela ne devrait pas être nécessaire. Mais nous relevons quand même que c’est une action non violente, menée par des gens complètement désespérés qui ont une revendication légitime. Gandhi a aussi mené des grèves de la faim. Personne n’a jamais dit qu’il faisait du chantage. Il y a une revendication légitime et fondée en droit. Les grévistes estiment qu’il n’y a pas d’autres moyens de se faire entendre.

 

En quoi estimez-vous que leur revendication est légitime et fondée en droit ?

 

Lors de la campagne de régularisation de 2009, un critère de régularisation par le travail avait été prévu. Nous pensions à l’époque que la grosse majorité des sans-papiers seraient régularisés sur la base de ce critère-là. Or cela n’a pas été le cas. La procédure a été beaucoup trop longue. Deux ans et demi après le début de la campagne, certaines personnes qui avaient fait une demande de régularisation par le travail n’ont toujours pas eu de réponse. Les employeurs qui, à l’époque, leur avaient promis un contrat d’embauche ouvrant la voie à une régularisation ont dû attendre deux ans avant de recevoir l’autorisation de demander un permis de travail. Bien souvent, ils n’avaient pas attendu et avaient engagé quelqu’un d’autre. Au bout du compte, il n’y a eu que quelques centaines de personnes régularisées sur la base d’un contrat de travail. On pensait qu’il y en aurait des milliers. Voilà pourquoi la revendication des grévistes de la faim de la VUB est légitime. Un certain nombre d’entre eux ont été écartés en 2009 alors qu’ils y avaient droit. Mais ils peuvent trouver un emploi, ils peuvent donc vivre en Belgique sans dépendre de la collectivité On pourrait leur donner un permis de travail et un titre de séjour provisoires. Si, après un délai de six mois ou d’un an, ils ne sont pas effectivement au travail, alors ils recevraient un ordre de quitter le territoire.

 

Est-ce que cela ne serait pas un curieux signal ?

 

Je ne pense pas qu’en faisant cela, on donne un chèque en blanc aux demandeurs – ils doivent travailler effectivement – et la ministre ne sort pas de son pouvoir discrétionnaire. On sait que le vieillissement de la population conduira à un manque de travailleurs actifs et qu’il faudra faire venir de la main-d’œuvre étrangère pour occuper les postes vacants. Ne serait-il pas plus rationnel d’intégrer par le travail des gens qui sont déjà en Belgique et y sont intégrés plutôt que de faire venir, dans quelques années, de la main-d’œuvre de l’étranger, qu’il faudra former ?

 


Cet article provient de http://www.lalibre.be

Mis en ligne le 09/04/2012

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