[Sociologue et historien flamand, Ludo De Witte est né en 1956. Il est spécialiste de l’histoire de la décolonisation du Congo belge. Il est, notamment, l’auteur de L’assassinat de Lumumba (Karthala, Paris, 2000). Cet article est paru sous le forme d’une « carte blanche » dans Le Soir du 23 juin 2010 et est reproduit ici avec l’aimable autorisation de son auteur.]
L’anniversaire des 50 ans de l’indépendance congolaise à Kinshasa promet de laisser un arrière-goût d’amertume. C’est comme si, à des noces d’or, il y avait un terrible secret de famille dont on ne parlera pas, même si tout le monde le connaît, parce que « cela n’a plus d’importance », puisque, entre-temps, l’oncle que ce secret concerne est décédé. Au cours de ces festivités, personne ne dira rien de la camisole de force dans laquelle les Belges, les Américains, les Français ont maintenu le Congo au cours des années qui ont suivi l’indépendance. Il faut donc analyser les données qui restituent le contexte dans lequel se sont produites la déliquescence de l’Etat congolais et les souffrances de sa population : la dislocation du premier gouvernement congolais et l’assassinat de ses principaux leaders ; cinq années de répression de toute résistance, au prix de centaines de milliers de morts ; l’aide fournie à Mobutu pour qu’il s’empare du pouvoir ; et les dizaines d’années de soutien à son régime dictatorial.