Il faut protéger la cause palestinenne de ses «amis » !
La révolte syrienne est elle influencée de l’extérieur ? Oui, sans doute. Mais dans quelle proportion ? Toute la question est là ! Comment ne pas voir que quatre-vingt dix pour cent du soulèvement en cours n’a pas grand chose à voir avec les visés de l’Emir du Qatar et de ses alliés (…)
Qu’ils soient naïfs ou pervers, tout le mal que l’on peut souhaiter aux adeptes désolants d’un anti-impérialisme littéraliste, complètement dévoyé de son sens, qui réduit les opposants syriens en armes à des mercenaires rétribués par le camp occidental et ses alliés arabes, est d’avoir à visiter demain Homs, Hama, Alep ou n’importe quelle ville de Syrie (sans oublier, à Damas, le camp palestinien de Yarmouk) avec, sous le bras, leurs plaidoyers enflammés contre « les milices qataris et saoudiennes venues s’en prendre à l’axe de la résistance palestinienne » ; et de devoir, au milieu des décombres, exposer leur étrange rhétorique : « Chers amis syriens…, chers Palestiniens de Yarmouk! « Cessez donc d’obéir aux ordres de François Hollande, de l’émir du Qatar et du roi d’Arabie Saoudite » ! « Arrêtez de ne pas vous laisser massacrer !» « Soyez raisonnables !…. « Vous aurait-il échappé que celui qui vous fait torturer… soutient la cause palestinienne ?! » « Et qu’il est allié avec l’Iran révolutionnaire ».
Ont-ils conscience de l’étrangeté du cadeau qu’ils font là – tous ces anti-impérialistes en chambre qui veulent écrire l’histoire en se passant de l’avis des populations concernées – à la cause palestinienne ou anti-impérialiste dont ils prétendent être les défenseurs ? La cruelle erreur qui plombe mortellement leur posture résulte (sauf bien sûr pour les membres omni présents de « l’armée électronique » de Bachar al-Assad) de leur coupure flagrante avec la réalité de la révolte syrienne.
Elle les conduit à croire que parce que des forces étrangères (quand bien même comprendraient elles « le clan de BHL » et ses alliés) effectivement bien peu légitimes à défendre soudainement la démocratie en Syrie, soutiennent l’opposition syrienne, celle-ci devient ipso facto réactionnaire; et que le despote dont elle cherche à débarrasser la Syrie doit par conséquent être protégé.
Personne n’a pourtant jamais nié que la coalition étrangère qui soutient (ou plutôt qui dit soutenir, car, alors qu’à Alep aujourd’hui, les hélicoptères russes sont à l’abri des pannes et que les canons du régime regorgent des munitions envoyées par monsieur Poutine, chez les opposants, les armes « saoudiennes », « qataris » ou « occidentales » se font encore cruellement attendre…!) a un agenda bien éloigné de son humanisme affiché.
Sur la base de quel magister, du haut de quelle expérience, au vu de quelle réalité (hormis peut être les quelques maladroites déclarations de Borhan Ghalioun, démenties depuis lors) s’arrogent-ils le droit d’affirmer que les forces qui entendent succéder à Bachar al-Assad ont pour objectif de se jeter dans les bras de l’Etat hébreu pour lui offrir le Golan et la Cisjordanie ? Les dirigeants égyptiens nouvellement élus ont-ils opté pour cette option ? Leurs homologues libyens pourtant « alliés de l’OTAN », ou leurs voisins tunisiens ont-ils pris ce chemin ?
La révolte syrienne est elle influencée de l’extérieur ? Oui, sans doute. Mais dans quelle proportion ? Toute la question est là ! Comment ne pas voir que quatre-vingt dix pour cent du soulèvement en cours n’a pas grand chose à voir avec les visés de l’Emir du Qatar et de ses alliés ; et qu’elle est avant toute chose l’expression d’une magnifique mobilisation populaire syro syrienne ! Puissent donc les généreux pourfendeurs des impéralistes manipulateurs venir faire une petite visite en Turquie ou en Jordanie dans les camps de réfugiés syriens. Et les plus courageux d’entre eux s’avancer vers les faubourgs d’Alep ou de Damas. Ils cesseraient bien vite, comme tant d’autres avant eux, de distiller cette prose dont on pourrait se contenter de dire qu’elle est dogmatique et stupide si elle n’était pas, accessoirement, mortifère.