Frères,
sœurs,
camarades,
et tous les autres – ceux qui savent l’urgence dans laquelle nous sommes …
On vient encore de nous planter un couteau dans le dos. Littéralement.
Cette fois, c’est notre frère Aboubakar Cissé.
Poignardé dans sa propre mosquée.
Un frère.
Un croyant.
Un humain.
Un de ceux qui ne demandent rien, qui vivent sans faire de vagues – sauf pour ceux que notre simple existence fait suffoquer.
Et le plus glaçant dans cette affaire, en plus du meurtre, c’est le silence.
Silence politique.
Silence médiatique.
Silence judiciaire.
Silence… complice.
En France, en Belgique, en Europe, en 2025, un musulman peut être assassiné dans une mosquée – et personne ne bronche.
Les chiens de garde des plateaux n’aboient même pas.
Pas un édito.
Pas une minute de silence à l’Assemblée.
Pas un tweet ministériel.
Le vide. Le néant.
Comme si sa vie ne valait rien.
Comme si son sang valait moins qu’un pare-brise de commissariat.
Mais on attend quoi, sérieusement ?
Qu’on commence à nous tirer dessus en pleine prière ?
C’est déjà arrivé ailleurs. Et ça arrivera encore ici.
Car ce meurtre, celui de notre frère Aboubakar, il est le produit de notre époque.
Le résultat d’une machine bien huilée : l’islamophobie d’État.
Pas celle des néonazis en survêt’. Non.
Celle des députés en costume,
des éditorialistes sous coke,
des recteurs d’académie,
des commissaires, des juges,
des philosophes en roue libre.
Depuis 2001, on nous gave du même discours :
« L’islam est un problème. »
« Le voile est un danger. »
« Les barbus sont une menace. »
Et pendant qu’ils débattent de la longueur de nos jupes, on nous tue.
L’islamophobie, ce n’est pas une simple haine. C’est un logiciel.
Le logiciel de l’État raciste. De la suprématie blanche.
C’est le même logiciel qui bombarde Gaza et gaze les manifestants à Paris.
Le même qui tue Aboubakar ici et les enfants palestiniens là-bas.
Le même qui protège les colons, les génocidaires et les flics tueurs dans nos quartiers.
Vous voyez le lien ou il faut encore un PowerPoint ?
Parce qu’il y en a un. Et il est limpide.
Ce système tue.
Ici comme là-bas.
Par une balle, un missile ou un silence.
Et pendant ce temps-là, on nous dit de rester calmes.
De ne pas faire d’amalgames.
De respecter la loi.
Mais vous croyez qu’on va continuer à tendre l’autre joue pendant qu’on nous plante des lames dans le dos ?
Vous croyez qu’on va continuer à prouver qu’on est « modérés » pendant qu’on nous enterre vivants ?
Il n’y a pas de neutralité possible.
Soit tu es contre ce système, soit tu es complice.
Il est temps — ou peut-être trop tard
Le feu est là.
Ce que nous vivons, ce n’est pas une simple discrimination.
C’est une guerre idéologique.
Une guerre contre :
-
les pauvres,
-
les Noirs,
-
les Arabes,
-
les Rroms,
-
les migrants,
-
les sans-papiers,
-
les croyants,
-
les résistants.
Et cette guerre, ils la mènent partout :
Dans les tribunaux.
Dans les écoles.
Dans les commissariats.
Avec des avions de chasse et des matraques.
Et si vous doutez encore, regardez ce qu’on fait aux soutiens de la Palestine.
Dissolutions, arrestations, diffamations.
Même pleurer les morts est devenu suspect.
Alors oui, frères, sœurs, camarades :
ce combat n’est pas communautaire.
Il est antifasciste.
Et il est vital.
Parce qu’on ne milite pas pour des droits abstraits.
On milite pour notre survie collective.
La vérité ? On n’a plus le luxe d’être modérés.
La vérité ? Le statu quo, c’est la mort.
La vérité ? On ne fera jamais la paix avec un système qui nous veut morts.
À celles et ceux qui doutent encore, qui disent qu’on exagère :
ouvrez les yeux.
Aboubakar n’est pas un symbole.
C’est un frère assassiné dans un pays
qui préfère parler de barbes à la plage
plutôt que de sang sur les pavés.
La lutte contre le fascisme n’est pas un choix.
C’est une stratégie de survie.
Et dans cette stratégie, on n’attend plus les consignes.
On construit nos réseaux, nos alliances, nos résistances.
Le combat contre l’islamophobie n’est pas communautaire.
C’est un combat contre le fascisme.
Et ce combat-là, il est global.
On n’a plus le temps. Peut-être qu’il est déjà trop tard.
Mais même trop tard, il faut se lever.
Pas pour négocier notre humanité.
Pour l’imposer.
Pas pour demander la paix.
Mais pour dire non à la guerre qu’ils nous imposent.
Ce combat, c’est le même que celui des Noirs contre la suprématie blanche aux États-Unis.
Le même que celui des peuples autochtones contre les expropriations.
Le même que celui des migrants contre les frontières assassines.
Le même que celui des mères de quartier qui pleurent leurs enfants tués par la police.
Notre combat est un cri de vie contre le pouvoir de mort.
Un cri pour dire qu’on ne pliera pas.
Qu’on n’oubliera pas Aboubakar.
Qu’on continuera à nommer les assassins.
Et qu’on dénoncera le système qui les rend possibles.
Frères, sœurs, camarades,
On doit honorer nos morts, protéger nos vivants, et foutre la honte à ceux qui ferment les yeux.
Parce que demain, ce sera peut-être toi, moi, ou ta sœur.
Et parce qu’on ne laissera plus personne tomber dans l’oubli.
Aboubakar, ton nom est gravé.
On le portera haut.
Pas comme une plainte.
Comme une promesse.
Frères, sœurs, camarades,
ce combat est juste. Il est noble.
Et tant qu’on le portera ensemble,
aucun pouvoir, aussi brutal soit-il,
ne pourra effacer la dignité de nos résistances.
Aboubakar, on ne t’oublie pas.
On se lève pour toi.
On lutte pour tous les vivants.
Et notre mémoire sera notre arme.
Nordine Saïdi
Bruxelles Panthères
« La liberté, la justice et l’égalité, par tous les moyens nécessaires ! » Malcolm X
Mouvement Citoyen Palestine
« L’égalité ou rien » Edward Said