La Négrophobie est le socle fondateur du racisme d’État en Belgique. Cette réalité s’enracine profondément dans l’histoire coloniale, marquée par les crimes du régime de Léopold II au Congo, où le pillage des ressources naturelles et l’exploitation brutale des corps africains ont instauré un système de déshumanisation racialisée. Le colonialisme belge n’était pas simplement une entreprise économique ; il s’appuyait sur une idéologie de suprématie blanche, d’évangélisation et de « civilisation », légitimée par des discours pseudo-scientifiques et religieux.
L’assassinat de Patrice Lumumba, le 17 janvier 1961, perpétré directement par l’État belge, sous l’impulsion du roi Baudouin et avec la complicité des États-Unis, illustre l’une des manifestations les plus brutales de cette négrophobie d’État. Lumumba, en tant que leader charismatique de la lutte pour la souveraineté congolaise, représentait une menace pour l’ordre colonial mondial et l’hégémonie occidentale. Son meurtre n’est pas un accident tragique de l’histoire : il est le produit d’un système colonial déterminé à écraser toute résistance Noire. Ce crime, un assassinat politique délibéré, a laissé des cicatrices profondes qui continuent de résonner dans les mémoires africaines et diasporiques.
Cependant, la négrophobie ne s’est pas éteinte avec les indépendances africaines. En Belgique, elle persiste sous des formes institutionnelles bien établies : dans les pratiques policières, où le profilage racial est endémique ; dans l’accès à l’emploi, au logement, aux soins de santé et à l’éducation ; ainsi que dans le fonctionnement du système judiciaire. Les violences policières dirigées contre des personnes Noires, largement documentées mais jamais sanctionnées, sont l’expression directe de cette continuité historique.
En parallèle, l’arabophobie s’est intensifiée à partir des années 1960 avec l’arrivée des travailleurs migrants marocains. Ce racisme d’État est intrinsèquement lié à l’Islamophobie, qui se cache souvent derrière des discours sur une supposée « incompatibilité culturelle » ou des préjugés sur la religion musulmane. En réalité, ces deux formes d’oppression sont indissociables. L’islamophobie a permis de renforcer les politiques de stigmatisation, de contrôle et de marginalisation des populations d’origine marocaine et d’autres communautés musulmanes.
Elles agissent comme des rouages complémentaires d’un système de domination raciale organisé, qui perpétue l’exclusion et la violence structurelle. Refuser de reconnaître l’un de ces piliers ou de le combattre avec la même intensité que l’autre mène inévitablement à un antiracisme partiel et inefficace, trop souvent récupéré par des stratégies politiques opportunistes.
Il est crucial d’affirmer sans détour que la lutte contre la négrophobie ne saurait être la seule responsabilité des personnes noires, pas plus que la lutte contre l’islamophobie ne peut être laissée aux seuls musulmans. Ces combats sont l’affaire de toute personne authentiquement engagée dans un projet antiraciste et décolonial. Un véritable engagement antiraciste ne peut tolérer des solidarités fragmentées ou conditionnelles : il doit rejeter toutes les formes d’oppression raciale et s’attaquer aux structures de pouvoir qui les perpétuent. Comme l’a écrit Frantz Fanon, « Je me découvre un jour dans le monde et je me reconnais un seul droit : celui d’exiger de l’autre un comportement humain, un seul devoir : celui de ne pas renier ma liberté au travers de mes choix. »
Cette exigence de solidarité universelle est au cœur de tout projet antiraciste sérieux. Être décolonial, c’est comprendre que les mécanismes de domination raciale sont interconnectés et qu’ils bénéficient systématiquement à une classe dominante blanche, au détriment des Noirs, des Arabes, des musulmans, des migrants, et des sans-papiers. Accepter ces hiérarchies raciales, même tacitement, c’est devenir complice d’un système colonial dont la brutalité s’incarne encore aujourd’hui, comme le prouve la mémoire vivante du 17 janvier 1961.
Refuser la négrophobie et l’islamophobie est non seulement un impératif politique, mais aussi un devoir moral indissociable d’une praxis antiraciste radicale. Se taire ou détourner le regard revient à une complicité active avec le racisme d’État et les violences qu’il engendre. Il est temps de dépasser les discours complaisants et les postures confortables pour embrasser une lutte véritablement transformante. Le courage antiraciste, aujourd’hui comme hier, consiste à dénoncer sans relâche toutes les formes d’oppression, quelles qu’en soient les conséquences.
Nordine Saïdi Bruxelles Panthères « La liberté, la justice et l'égalité, par tous les moyens nécessaires ! » Malcolm X Mouvement Citoyen Palestine « L'égalité ou rien » Edward Said
#Lumumba 17/01/1961 – 17/01/2025
Plus de 60 ans après on oublie pas.
» Ni brutalités, ni sévices, ni tortures ne m’ont jamais amené à demander la grâce, car je préfère mourir la tête haute, la foi inébranlable et la confiance profonde dans la destinée de mon pays, plutôt que vivre dans la soumission et le mépris des principes sacrés.
L’histoire dira un jour son mot, mais ce ne sera pas l’histoire qu’on enseignera à Bruxelles, Washington, Paris ou aux Nations Unies, mais celle qu’on enseignera dans les pays affranchis du colonialisme et de ses fantoches.
L’Afrique écrira sa propre histoire et elle sera au nord et au sud du Sahara une histoire de gloire et de dignité. «