La Belgique utilise sa législation antiterroriste pour protéger l’industrie de guerre israélienne

La Belgique se sert de sa législation antiterroriste pour protéger une firme d’armement israélienne.

Le bureau du procureur fédéral à Bruxelles a confirmé qu’il traitait un dossier relatif à des dommages récents occasionnés à l’usine OIP Sensor Systems, installée près de la ville de Gand.

L’affaire pourrait avoir des implications de très longue portée. OIP est la propriété entière d’Elbit, un manufacturier d’armes israélien qui tire profit des attaques perpétrées contre les Palestiniens.

La Belgique utilise sa législation antiterroriste pour protéger l’industrie de guerre israélienne. Le manufacturier d’armes israélien Elbit Systems est propriétaire de l’usine OIP, près de la ville belge de Gand.

Le manufacturier d’armes israélien Elbit Systems est propriétaire de l’usine OIP, près de la ville belge de Gand. (Photo : Pavlo Gonchar / SOPA Images/SIPA)

 

David Cronin, 19 octobre 2022

Le week-end dernier, un article paraissait dans le quotidien belge en langue néerlandaise Het Laatste Nieuws, disant qu’un homme était en détention suite à un incident qui avait eu lieu à l’usine OIP.

Le 28 août, des cocktails Molotov avaient été jetés sur des véhicules blindés garés sur le parking d’OIP. Le slogan « Fermez Elbit » avait été trouvé sur les lieux peu de temps après, prétendent certains comptes rendus.

Bien que les pompiers soient venus sur les lieux pour maîtriser rapidement les flammes, les deux véhicules militaires avaient néanmoins été détruits complètement, a-t-on pu lire dans Het Laatste Nieuws.

À l’origine, l’affaire avait été confiée à un tribunal local, mais avait été transmise par la suite au procureur fédéral.

Eric Van Duyse, un porte-parole du procureur, a déclaré que

« le suspect était en fait confronté à des accusations d’incendie criminel avec intentions terroristes ».

Le nom de l’homme en détention n’a pas été révélé.

« Nous ne fournissons pas les identités des suspects mais je puis vous dire que, jusqu’à présent, aucun lien n’a été trouvé avec quelque organisation palestinienne que ce soit »,

a déclaré Van Duyse par courriel.

« Nous sommes toujours au début de l’enquête »,

a-t-il dit, ajoutant qu’aucune date n’avait été fixée pour une audience au tribunal.


Le perroquet

Contacté par téléphone, Ronny De Coster, le journaliste qui a rédigé l’article du week-end dernier pour Het Laatste Nieuws, a insisté pour dire qu’il ignorait le nom du détenu ainsi que celui de son avocat. De Coster a déclaré que son article s’appuyait sur des détails que lui avaient transmis les autorités judiciaires en Flandre-Orientale, où est située l’usine OIP.

Ce que De Coster reconnaît là soulève de graves questions à propos de son journalisme. Pourquoi a-t-il répété à la façon d’un perroquet une ligne que lui ont transmise les autorités, sans s’arrêter pour examiner l’agenda sous-jacent ?

L’article de De Coster suggérait que l’homme en détention nourrissait des sympathies envers le peuple palestinien en situation critique. L’article décrivait néanmoins l’incident du cocktail Molotov comme criminel, sans fournir le moindre contexte à propos du rôle d’Elbit dans la violence d’État d’Israël.

Bien que propriété d’Elbit depuis près de deux décennies, les connexions étroites d’OIP avec l’industrie israélienne des armes sont loin d’être largement connues.

Jusqu’à présent, la firme a échappé au genre de protestations que le groupe Palestine Action a entreprises contre les investissements d’Elbit en Grande-Bretagne. Ces protestations ont inclus des prolongements tout à fait louables tels que la destruction d’équipements de production d’armes.

Personne n’a été blessé lors du jet des cocktails Molotov sur les véhicules blindés garés à proximité de l’usine OIP.

Alors, pourquoi la Belgique a-t-elle invoqué sa législation antiterroriste ? Se pourrait-il que l’État envoie un signal pour dire qu’il ne tolérera aucune protestation susceptible de perturber le fonctionnement d’OIP et, par extension, celui de sa maison mère israélienne ?

The Wall Street Journal vient de publier un article lumineux sur les marchands de mort israéliens.

L’article brode sur la façon dont les « ventes militaires mondiales d’Israël » ont atteint « le montant record de 11,3 milliards de USD l’an dernier ». Un important facteur derrière cette croissance a été les accords Abraham – une série d’accords de normalisation avec des pays arabes.

L’acquisition par Elbit d’OIP en Belgique est antérieure à ces accords. Mais cela ne la rend pas sans conséquence.

OIP, par exemple, a dirigé un consortium qui a décroché un important contrat en 2019 en vue d‘équiper l’armée française de nouveaux fusils.

En agissant de la sorte, OIP a trouvé une affaire pour l’industrie israélienne des armes dans l’un des plus grands pays de l’Union européenne.

Cela fait d’OIP un producteur très sinistre et dangereux. Bien plus dangereux que la personne qui a incendié les véhicules blindés sur son parking.

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Publié le 19 octobre 2022 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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David Cronin est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Europe Israël : Une alliance contre-nature (Ed. La Guillotine – 2013) et  Europe’s Alliance With Israel: Aiding the Occupation (Pluto Press, 2011 – L’Alliance de l’Europe avec Israël contribue à l’occupation). Il a participé à la rédaction du rapport “The israeli lobby and the European Union”.
Son dernier livre est : Balfour’s Shadow: A Century of British Support for Zionism and Israel (Pluto Press – Londres 2017).

Il a écrit de nombreux articles pour de nombreuses publications, dont The Guardian, The Wall Street Journal Europe, European Voice, the Inter Press Service, The Irish Times and The Sunday Tribune. En tant qu’activiste politique, il a tenté d’appliquer un état d’ “arrestation citoyenne” à Tony Blair et Avigdor Lieberman pour crimes contre l’humanité.

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