Quand la RTBF ne pige rien au racisme structurel

Le Soulier d’Ebène ou quand la RTBF ne pige rien au racisme structurel
Mercredi 10 mai, La Première (RTBF), 08h35. Souriant et pro, le journaliste François Heureux lance sur les ondes un sujet « digne d’intérêt public”, intitulé : « Le Soulier d’Ebène est-il discriminatoire ? » (1). Soit ce prix annuel – créé en 1992 par l’asbl African Culture promotion pour récompenser le meilleur joueur de foot d’origine africaine du championnat belge – décerné dans le cadre de l’évènement African Awards serait… discriminatoire envers les joueurs blancs. La question est sérieusement posée et le collègue Eby Brouzakis, l’un des rares journalistes afrodescendants de la RTBF, chargé d’y répondre. En sa qualité de journaliste sportif, bien sûr, et appuyé par l’expert blanc Patrick Charlier, directeur-adjoint d’UNIA (Centre interfédéral pour l’égalité des chances).
Remarquons d’abord la « perspicacité journalistique » estampillée RTBF : il aura donc fallu 25 ans (1992-2017) pour que certains journalistes croient percevoir et interrogent un imaginaire « racisme anti-blancs » dans le chef des organisateurs des African Awards. Le tout habillé d’un politiquement correct où les mots « noirs », « blancs » et « arabes » demeurent bannis tandis que le terme discrimination a systématiquement remplacé celui de racisme. Quant à la bonne santé du racisme structurel belge, sous coalition gouvernementale MR-N-VA, on en dira évidemment pas un mot : il y a trop d’auditeurs qui écoutent à cette heure-là…

François Heureux, journaliste-présentateur à la Première (RTBF).
Débonnaire, François Heureux interpelle son confrère : «Est-ce qu’au sein de la rédaction (sportive de la RTBF), ça fait l’objet de débats cette récompense ? » . « Oui, c’est le moins que l’on puisse dire, François », répond Eby Brouzakis. « En fait, ce prix a été créé en 1992 et on s’est souvent demandé quel était le but d’une distinction qui est a priori plutôt clivante. Dans une société footballistique où l’on se veut incluant, on propose un trophée qui exclut tout une partie du monde footballistique sur base de l’origine, peut-être aussi un peu de la couleur de peau d’une certaine façon. Et cette question, on se l’est posée aussi lors de l’apparition toute récente du “Lion belge” qui, cette saison, a récompensé Ishak Belfodil et qui met à l’honneur le meilleur joueur d’origine maghrébine de Belgique. On s’est souvent posé la question suivante : comment serait perçue par ces communautés l’apparition d’un soulier d’or belge qui exclurait tous les autres ? On serait, il faut en convenir, un minimum dans l’ostracisme.En tout cas, c’est mon avis ».
Un avis, somme toute, pénétré de simplisme et d’ignorance quant a l’invisibilisation et la non-reconnaissance des joueurs d’origine africaine lors, par exemple, du « Soulier d’Or » récompensant, longtemps et systématiquement, des joueurs blancs et belgo-blancs. Nous y reviendrons.
Naufrage journalistique

Eby Brouzakis, journaliste sportif à La Première (RTBF).
Eby Brouzakis enchaîne en nuançant son avis : « Ici, avec le Soulier d’Ebène, on emprunte une posture particulière, même si ce prix n’est qu’un prix parmi d’autres au sein d’une soirée qui met en avant d’autres disciplines qui valorisent l’Afrique. Alors, on a décidé d’y aller, c’est la position que la RTBF-radio a adopté, on donne l’information, le nom du vainqueur, en bref, sans en faire des tonnes. Voici un court extrait du vainqueur, Youri Tielemans ». Glisse sur les ondes la voix du Soulier d’Ebène 2017 et joueur d’Anderlecht qui réagit à l’obtention de son prix : « Oui, ça me fait plaisir évidemment, voilà, ça fait plaisir de représenter ses origines… » Au sortir de l’extrait, Brouzakis enfonce le clou : «Voilà, on l’a entendu au début de cette interview, Youri Thielemans met en avant ses origines. Il est Diable Rouge et, en même temps, il a une maman qui est, je pense, d’origine africaine ».
On peut se demander en quoi est-ce une faute de « mettre en avant ses origines » ? Et en quoi « être Diable Rouge » ne pourrait-il aller de pair avec « avoir une maman africaine » ? C’est le cas des frères Romelu et Jordan Lukaku ou de Michi Batshuayi. Seraient-ils moins Belges ou moins Diables Rouges pour autant ? Mais n’accablons pas plus le pauvre Eby dans son rôle de tirailleur et porte-parole de sa (blanche) rédaction. Après avoir donc suggéré un ostracisme anti-blancs au sein de l’asbl African Culture Promotion comme chez le jeune Tielemans, le journaliste sportif retrouve quelque pertinence. En révélant l’autre «intérêt » pour la RTBF à couvrir la cérémonie du Soulier d’Ebène : « On y va aussi pour rencontrer des personnalités intéressantes – on va pas se mentir – parce que souvent, il y a Didier Drogba qui apparaît, il y a Vincent Kompany, on a même vu Stromae débarquer là (rire). Donc, c’est parfois intéressant d’y aller aussi pour cela”. Comme quoi, les imaginaires « communautaristes noirs » de l’African Culture Promotion sont révèlent très utiles lorsque la RTBF est en manque d’interviews de stars noires bankable…

Youri Tielemans, 20 ans, Soulier d’ébène 2017, en partance pour l’AS Monaco; selon un contrat de 25 millions d’euros.
Semblant quelque peu déçu, François Heureux revient « au coeur du sujet » : « Donc, ça fait pas polémique parmi les joueurs, ce Soulier d’Ebène ? ». « Non, les joueurs l’apprécient plutôt, c’est le sentiment que l’on a », répond Eby Brouzakis. « Mbaye Leye, par exemple, qui a reçu le trophée la saison dernière, est Sénégalais et lorsqu’il est retourné au Sénégal, il jouissait, paraît-il, d’une reconnaissance sans pareil. C’est son épouse qui nous a raconté cela : il ne pouvait pas se retourner dans la rue, il était systématiquement accosté. Pour les joueurs africains ou d’origine africaine qui évoluent en Belgique, c’est vraiment quelque chose de très très fort, de très intéressant. Je n’ai pas l’impression que ça crée la polémique chez ceux qui ne sont pas africains ou d’origine africaine, c’est plutôt chez nous, au sein de la rédaction, qu’on s’est posé la question ».
Bref : une question « d’intérêt public » que personne ne se pose depuis 25 ans et qui n’a suscité aucune plainte ni contestation de la part de joueurs non-africains depuis le même quart de siècle… Après cette débauche d’intelligence journalistique, Heureux veut néanmoins « poursuivre sur cette question ». Il se retourne donc vers le directeur-adjoint d’Unia : celui-ci verrait-il « une forme de discrimination” dans l’organisation du Soulier d’Ebene ? «On a été saisi, on a remis des avis là-dessus, des personnes se sont inquiétés de savoir si c’était discriminatoire », commence Patrick Charlier. « Au sens strictement légal, la loi ne s’applique pas. Parce qu’on n’est pas dans une offre d’emploi, ce n’est pas une offre publique, on n’est pas candidat et on ne peut donc parler de discrimination au sens légal du terme ».
C’est ici que le sujet « d’intérêt public » sélectionné par nos fins limiers fait définitivement flop. Une question saugrenue qui n’aurait jamais dû passer en l’état sur antenne. Mais aucun des protagonistes ne semble s’en rendre compte et Charlier va pousser l’analyse jusqu’à tomber à moitié dans le fossé. « Est-ce que cette pratique est positive ou négative ? Est-ce qu’elle stigmatise un groupe ? », s’interroge le directeur-adjoint d’UNIA.

Patrick Charlier, directeur-adjoint d’UNIA (Centre Interfédéral pour l’égalité des chances).
« Ma réponse est double. L’idée du Soulier d’ébène est de mettre en avant le caractère positif de la contribution de minorités à notre société. En ce sens, c’est quelque chose qui est intéressant. Et plus fondamentalement, on sait que, dans les groupes minoritaires, il est important d’avoir des modèles, des rôles-modèles positifs, des gens qui réussissent. Quelles que soit les minorités, ethnique, sexuelle, religieuse ou autre, il important d’avoir ces rôles-modèles, spécialement chez les jeunes. En ce sens, c’est positif et mérite d’être souligné et encouragé, mais j’ai un bémol. Ici, on parle du Soulier d’ébène et on est dans le monde sportif ; et donc cela véhicule le stéréotype de la personne africaine qui est bonne en sport, qui court vite, on pense à Usain Bolt ou les marathoniens. Or, il faudrait pouvoir mettre en avant des rôle-modèles de personnes africaines dans d’autres secteurs : des fonctionnaires, des entrepreneurs, des enseignants, etc. Parce qu’on sait que, dans le domaine de l’emploi, il y a des difficultés pour les personnes d’origine africaine de trouver du boulot ».
Soyons précis : Usain Bolt n’est pas « Africain » mais afrodescendant et de nationalité jamaïcaine. Attention, M. Charlier, à ne pas verser dans le stéréotype blanc selon lequel tout être humain à la peau noire est automatiquement africain. La Traite transatlatique, d’abord, les voyages et unions « mixtes », ensuite, ont pulvérisé ce préjugé européen depuis des siècles. Pour autant, les scientifiques pourraient vous donner raison car, en réalité, nous sommes tous afro-descendants ou d’origine africaine (les premiers hommes étant apparus à l’Est de l’Afrique). Mais comme vous êtes payé pour le savoir, M. Charlier, cette donnée scientifique ne fait pas le poids face à tous ceux qui préfèrent entretenir la perpétuation d’un racisme structurel, le statut quo d’une hiérarchisation raciale en société occidentale. A cet égard, gageons que votre suggestion de « mettre en avant des rôles-modèle de personnes africaines dans d’autres secteurs » s’adressait davantage aux journalistes qu’aux auditeurs.
Etre d’origine africaine
Comme la plupart de ses confrères blancs, François Heureux n’entend rien à la suggestion du directeur-adjoint et choisi de l’interroger sur le nombre de plaintes dont UNIA a été saisie concernant le Soulier d’Ebène. « Deux en cinq ans », répond Charlier. De plus en plus «représentatif » et « digne d’intérêt public »… Mais décidément heureux de son privilège blanc, le journaliste s’enfonce : « Concernant ce Soulier d’Ebène, est-ce qu’il n’y a pas aussi un problème au niveau du concept de joueur africain ou d’origine africaine ? C’est un peu flou, finalement : qu’est-ce que ça veut dire être africain ou d’origine africaine ? ».
Entendre une question aussi stupide qu’inepte venant d’un confrère laisse littéralement sans voix. Quand Heureux , qui n’a jamais si bien porté son nom, se demande ce que signifie être d’origine africaine, on a envie de lui répondre qu’il s’agit de celles et ceux – à quelques exceptions près – qu’il ne croise pas dans les couloirs de la RTBF ; de celles et ceux qu’il ne voit pas présenter un Journal Télévisé ou Journal Parlé ; de celles et ceux qu’il ne voit pas diriger un grande entreprise ou un CA universitaire, de celles et ceux qu’il ne verrait jamais comme Premier ministre du plat pays à l’instar d’un Obama aux Etats-Unis.
On aura encore envie de lui répondre qu’être d’origine africaine, c’est se heurter depuis des années au consensus politique blanc du refus à consacrer une « place Lumumba » à Bruxelles, dans le quartier de Matonge, tandis que 86 autres pays dans le monde ont rendu cet hommage au premier Premier ministre du Congo indépendant, co-assassiné par le gouvernement belge de l’époque. Etre d’origine africaine, c’est avoir un ou des parents et grand-parents qui ont enduré le crime de la colonisation belge sous l’approbation ou l’indifférence des vôtres, c’est se confronter aujourd’hui à l’impossibilité de voir ses enfants, comme les vôtres, apprendre cette histoire à l’école, à l’âge où ils s’interrogent sur leur identité et origines.
Avoir des origines africaines, enfin, c’est s’appeler Cerina de Rosen, Véronique Clette-Gakuba ou Pierre Migisha et ne pas être invités à développer la pertinence comme les objectifs du Soulier d’Ebène dans une émission, dite de service public, cornaquée par des blancs inconscients de leur privilège racial au sein d’une société qui perpétue les discriminations envers les noirs et les arabes.
Racisme structurel, négrophobie, islamophobie ? Connais pas !
Très en colère suite à cet épisode indigne du journalisme, la styliste et activiste Cerina de Rosen, a écrit, le 11 mai, un texte en guise de réponse sur son profil Facebook :

Cerina de Rosen.
« Il y a 26 ans, nous avons créé le fameux Soulier d’Ebène et les Dunia avec l’African Culture Promotion. Nous étions 5 membres fondateurs (Fely Samuna, Bernard Malaba Tshienda, Eugene Bunga, Moro Mukota et moi ), nous l’avions lancé en nous inspirant du Soulier d’Or qui existait déjà. Nous constations avec beaucoup de regrets la quasi-absence et l’invisibilisation des joueurs de football africains lors de ce Soulier d’Or. Dès lors, nous avions pris l’initiative de récompenser nous-mêmes les joueurs issus de notre diaspora. En effet, je ne vous apprends sans doute rien en vous disant que les footballeurs africains occupaient déjà une grande place dans ces équipes belges, nous trouvions cela injuste qu’ils ne soient pas reconnus dans cette cérémonie « mainstream ». Face à ce constat regrettable est donc né le Soulier d’Ebène, qui avait pour but de valoriser notre communauté et de mettre sous les projecteurs toutes les personnes ayant oeuvré à mettre l’Afrique en avant dans de multiples domaines, tels que la science, la littérature, l’art, les études, le cinéma, l’économie… Le trophée qui récompensait ces différents domaines a été baptisé “Les Dunia”, et pour le foot : le Soulier d’Ebène. »
Un coup de fil à l’un des fondateurs ou organisateurs actuels du Soulier d’Ebène aurait donc suffit à Brouzakis ou Heureux pour ne pas médiatiser leur question inutile et nuisible. Mais visiblement, à la RTBF, on préfère suggérer à retardement un « ostracisme anti-blancs»dans le chef de Belges d’origine africaine, subsaharienne et maghrébine, plutôt que de faire sérieusement son métier.
De Rosen corrige ensuite le propos de Patrick Charlier en rappelant que la cérémonie stigmatisée par la RTBF ne s’est jamais limitée au football et n’a pas attendu UNIA – Institution créée par le gouvernement en 1993, soit un an après la création du Soulier d’Ebène – pour valoriser l’importance du rôle-modèle au sein des minorités :
« A travers ces Awards, nous voulions mettre en exergue toutes ces personnalités, reconnaître leur contribution épatante, améliorer la représentation et renforcer l’estime de soi des personnes de notre communauté, nous avions besoin de voir des rôles-modèles autour de nous puisque les médias ne nous les montraient pas, nous minoraient ou nous stéréotypaient. Nous voulions déconstruire tous ces clichés misérabilistes autour des Afrodescendants. On le déplore, à l’heure actuelle, cela n’a que très peu évolué, nous sommes toujours confrontés à un racisme structurel, un racisme ordinaire, un racisme par omission et toutes formes de micro-agressions et d’expressions négrophobes. Le contenu de cette émission hélas vient corroborer mes propos. »
Des propos qu’on ne risque pas d’entendre sur la RTBF ou alors ceux-ci se verraient immédiatement refoulé au rang de « posture victimaire» déplacée. Or, concernant le Soulier d’Ebène, partie des African Awards, il n’en est rien selon Cerina de Rosen : « Notre démarche s’inscrivait aucunement dans une posture victimaire, bien au contraire dans une dynamique d’empowerment, nous nous sommes donner les moyens de contrecarrer et pallier à un système qui faisait sans nous ! La valorisation d’une communauté mise à la marge n’a absolument rien avoir avec de la discrimination : quelle mascarade ! ».
Ajoutons que le jury du Soulier d’Ebène 2017 a été présidé par Georges Heylens, ex-Diable Rouge, et comprend les entraîneurs des divisions nationales ainsi que des journalistes de la presse sportive écrite et parlée. Autrement dit : autant de belgo-blancs qui n’ont pas le sentiment de participer à une opération d’exclusion ou « d’ostracisme” des joueurs qui ont la même couleur de peau qu’eux…
En conclusion, de Rosen finit par interroger ce communautarisme blanc qui ne dit pas son nom, ce communautarisme blanc qui, de toute éternité, n’a jamais inquiété les dirigeants blancs de la RTBF : « Petite question : lorsqu’ils organisent leurs trophées hermétiques, réservés aux blancs belges, où aucune personne non-blanche n’est représentée, pourquoi ne s’accusent-ils pas d’être racistes et discriminatoires ? Pure Hypocrisie ! Tout ceci nous renvoie au débat essentiel et urgent de la déconstruction du privilège blanc et d’une société réellement inclusive ! ».

Au centre, Véronique Clette-Gakuba.
Pas moins en colère que Cerina de Rosen, la chercheuse universitaire, Véronique Clette-Gakuba, s’est également fendue d’une réaction sur Facebook, le jour même de la diffusion de cette lamentable émission : « Quand la RTBF, radio publique belge, décide d’évaluer les lois anti-discrimination (chose en soi suffisamment rare pour le relever), elle commence son dossier en flinguant le Soulier d’Ebène (prix annuel récompensant le meilleur joueur de foot belge d’origine africaine) et, au passage, le Lion belge (meilleur joueur d’origine maghrébine). Deux personnes se sont plaintes auprès de l’UNIA pour discrimination, ce serait, d’après la rédaction de la RTBF, de l’ostracisme. La RTBF, ayant depuis toujours oublié de balayer devant sa porte, a bien entendu, pour parler du sujet, invité le spécialiste de la discrimination Patrick Charlier (qui lui, rappelons-le, n’a pas hésité le mois passé à licencier Rachida Lamrabet en raison de ses opinions sur la burqua) pour parler à la place des concernés. »
Non, définitivement non, messieurs Heureux et Brouzakis ! Ce ne sont pas les « Soulier d’Ebène » et « Lion belge » qui sont discriminatoires, mais cette société belge qui n’en finit pas d’alimenter un racisme structurel, fait de négrophobie et d’islamophobie, afin de mieux asseoir sinon éterniser un privilège racial blanc.
Olivier Mukuna
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1 réflexion au sujet de « Quand la RTBF ne pige rien au racisme structurel »

  1. «Les colonialistes du dimanche matin»
    – À l’attention d’Adrien Joveneau, animateur et producteur sur la RTBF de l’émission «Les Belges du bout du monde»

    Adrien Joveneau,

    Vous êtes idiot. Un idiot utile, cependant. Utile à la politique colonialiste de la Belgique, donc de la RTBF.

    Vous interpellez Denis Mukwege en lui demandant s’il ne se sent pas «un peu Belge du bout du monde».
    Denis Mukwege n’est pas belge, loin s’en faut; d’où peut bien vous venir cette question dans un accès de familiarité?
    L’explication suivra, toute candide, toute bonhomme:
    Quand Denis Mukwege est né, «on» appelait son pays «Le Congo Belge».
    N’est-ce pas là la source d’une grande fraternité qui vous lie au-delà de tout?

    Auriez-vous demandé à une Algérienne si elle ne se sent pas un peu «Française du bout du monde»?
    Voyons! Le pays où elle est née n’était-il pas, alors, propriété française?

    Et demanderiez-vous à un Français s’il ne se sent pas un peu «Allemand du bout du monde»?
    Légitime! Quand il est né, ce n’était plus tout à fait la France; l’occupation, Vichy, etc’.

    Ce qui vous rend moins sordide que vos consœurs et confrères — toute cette attendrissante communauté baignée de neutralité et de bons sentiments, qui considère très objectivement comme une grande aventure nationale, qui lia deux peuples maintenant frères, cette entreprise de massacre, de pillage et de domination qu’est la colonisation, alors et telle qu’elle perdure présentement –, c’est votre grossièreté. Vous ne vous cachez pas derrière toute cette finesse, cette argumentation, ce JOURNALISME qui caractérise les esprits coloniaux plus vicieux qui vous entourent.

    Le colonialisme bienveillant suinte de la plupart de vos émissions.
    Que vous ne vous en rendiez pas compte et n’en soyez pas hebdomadairement averti confirme le degré de complicité — de consentiment — que le milieu professionnel et l’État-nation qui vous accompagnent dans vos insultes sans frontières entretiennent avec cette pensée.

    Aaah! Cette belgitude, aussi béate que semble l’être à l’oreille votre sourire…
    Que n’aura-t-elle donc permis comme crapulerie?
    Elle est cependant tout ce qu’il reste à un peuple d’innocents colons pour préserver encore quelques temps sa cécité et son confort.
    Quelques temps encore.

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