Élections régionales. La France aime jouer à se faire peur… mais, jusqu’à quand ? |
Par Daniel Vanhove |
Dimanche soir, 13 novembre, le verdict est tombé. Le FN n’obtient aucune région. Presque tout le monde semble satisfait. Tant à gauche qu’à droite. Comme si le parti bleu-marine avait perdu, alors qu’il n’aura jamais autant d’élus aux Conseils régionaux. Les PS & LR ont récupéré pêle-mêle les votes de celles et ceux qui se prêtent à leur jeu nauséeux : on joue l’épouvante, et on rafle la mise !
Dans les bureaux des PS & LR il y en a qui doivent déjà se dire qu’au pire, au deuxième tour de la présidentielle de 2017, ils pourront toujours agiter le même spectre puisque la stratégie qui avait déjà fonctionné lors de la présidentielle de 2002 entre J. Chirac et J-M. Le Pen, vient de fonctionner à nouveau. Ailleurs, on fait le décompte des lourdes pertes et des rarissimes profits. Nombreux citoyens se sont donc mobilisés et ont contre leur gré, opté pour un vote utile, comme on dit… Utile à quoi, ou/et à qui !? A faire barrage au FN ? Un leurre… Contradiction majeure : beaucoup d’électeurs, toujours aussi dociles, se sont une nouvelle fois fait voler leur vote. Pour eux, pas d’autre alternative. Alors que le pays est dans cet état, à cause de ceux-là mêmes pour lesquels ils ont voté, pensent-ils vraiment que c’est avec les mêmes équipes que les choses vont changer ?! Nouveau leurre… Ce matin, quel que soit le parti, les commentaires vont dans le même sens. D’aucuns jurent qu’ils ont compris la leçon. Qu’ils ne risquent pas d’oublier. Qu’ils ne pourront jamais plus faire de la politique comme avant. Que cette fois, ils ont entendu le vote sanction des électeurs… Pour les remercier de ce harakiri, le Smic sera augmenté… de six centimes le 1er janvier prochain ! Bref, le résultat c’est que les citoyens ont remis en place les mêmes voyous qui les bernent depuis des décennies, dans ce jeu de dupes. Autre leurre… qui ne changera rien et donc alimentera, à coup sûr, la progression inéluctable de l’extrême-droite. En fait, si notre « démocratie » en est à ce point-là aujourd’hui, c’est de notre faute. Comme je ne cesse de le répéter, nous avons le personnel politique que nous méritons. Dans leurs analyses et leurs commentaires, des internautes nous expliquent leur vision des choses mais ne proposent aucun moyen pratique – ou si peu – à mettre en place pour en changer le cours. Nombreux sont ceux qui condamnent la politique néolibérale européenne et son corollaire l’Otan… Mais comment faire « pratiquement » pour en sortir si tel est le souhait majoritaire de la population ? Sachant que le système capitaliste qui les entretient est d’une redoutable efficacité, et qu’il parvient à récupérer la plupart des entraves qui lui sont mises entre les pieds ? Le cas grec est éloquent et terrible à ce sujet… Je pense que c’est en 2005 qu’a eu lieu la première déflagration. Et qu’il eût fallu descendre dans les rues et manifester contre la confiscation du vote refusant majoritairement le Traité constitutionnel de l’Europe, jusqu’à en obtenir le respect. Et non son copier-coller de Lisbonne. C’est là qu’a été usurpée la voix des citoyens. Sans qu’il n’y ait de réelle protestation, à la hauteur d’un tel rapt. Et à partir de cette date, les différents niveaux de pouvoir – nationaux et européens – ont compris que les citoyens vivaient tout cela de loin. Sans s’en préoccuper véritablement, parce que pour beaucoup, trop préoccupés par un quotidien difficile et harassant. Et même chose en ce qui concerne les votes blancs, nuls ou les abstentions qui ne sont pas pris en compte lors des résultats. Alors qu’ils sont majoritaires ! Au regard d’une « démocratie » saine, il est inacceptable qu’autant de votes (près de 50% dans la plupart des pays) ne soient pas comptabilisés. Quelques heures à peine après le scrutin régional, et un mois après les attentats qui ont ensanglanté Paris à une deuxième reprise en moins d’un an, ceux-là mêmes pour qui les citoyens français viennent de voter (PS / LR) se proposent dans les enceintes de Bruxelles, de relancer la procédure d’adhésion de la Turquie à l’UE… Est-ce vraiment la décision à prendre et le moment approprié ? Quand je vous dis qu’ils ne font qu’alimenter la propagation de la peste brune qui s’infiltre telle une eau glauque dans les moindres interstices de la société… Certains sceptiques me diront, mais que faire ?! Il y a une réponse, sous nos yeux, mais dont personne – et surtout pas nos responsables politiques – ne parle : l’Islande qui se porte très bien – alors qu’elle était le premier pays touché par la crise bancaire en 2008 – depuis qu’elle a tourné le dos à l’UE, à l’euro et aux banksters.
Je ne peux, une fois encore, que conclure en donnant la parole à Léo Ferré : « Ils ont voté ils voteront Comme on prend un barbiturique Et ils ont mis la République Au fond d’un vase à reposer Les experts ont analysé Ce qu’il y avait au fond du vase Il n’y avait rien qu’un peu de vase »…
Daniel Vanhove Observateur civil et auteur 14.12.15 |