La Belgique doit assurer une protection consulaire à Ali Aarrass dans sa prison au Maroc

Le Belgo-Marocain a été condamné à 12 ans de prison en 2011 pour terrorisme au Maroc.

 

 

On ignore encore si l’Etat fera appel. Dans la négative, il s’agirait d’une décision importante – et rassurante – pour les binationaux belgo-marocains, et aussi un tournant dans la jurisprudence.

Les Affaires étrangères belges, notamment défendues par un ponte du droit consulaire, Me Nicolas Angelet, estimaient que la décision d’accorder une assistance consulaire devait être laissée à la discrétion de l’Etat et, en outre, que la Convention européenne des droits de l’homme ne s’appliquait pas en cette occurrence (1). Or les attendus du tribunal battent en brèche la position officielle belge.

http://blog.lesoir.be/baudouinloos/2014/01/10/la-justice-belge-va-dire-si-letat-belge-doit-assister-ali-aarrass-dans-sa-prison-marocaine/

Relevons un point fondamental du jugement : « Un agent consulaire a le droit de communiquer avec son ressortissant mais ce droit peut se transformer en obligation, en vertu de l’article 1er de la Convention européenne des Droits de l’homme, si une violation à ladite Convention est alléguée et portée à la connaissance de cet Etat (…).

Il n’est pas contestable que ces traitements [torture] ont des répercussions sur l’état de santé mental et physique de M. Aarrass qui nécessiterait un suivi médical, actuellement. Cette seule circonstance justifie l’intervention du tribunal des référés. L’urgence ne peut être déniée lorsqu’une situation, qui est le fait de la violation de règles fondamentales qui ont trait aux Droits de l’homme empire par l’effet du temps (…) »

Le jugement de ce 3 février 2014 est exécutoire. L’assistance consulaire consiste surtout en visites du consul belge au prisonnier.

Rappelons que les tortures subies par Ali Aarrass après son extradition d’Espagne vers le Maroc ont été attestées par un courrier de décembre 2012, adressé par le Rapporteur spécial des Nations unies contre la torture au ministre de la Justice marocain, et rendu public en mai 2013.

Aarrass avait bénéficié d’un non-lieu en Espagne mais il avait néanmoins été extradé le 14 décembre 2010. Le condamné a toujours nié les faits allégués et renié les aveux extorqués sous la torture. Il dit toujours subir dans sa prison de Salé des traitements inhumains et dégradants

Les trois avocats de la défense d’Ali Aarrass et de sa soeur Farida qui remue ciel et terre à Bruxelles, Mes Dounia Alamat, Christophe Marchand et Nicolas Cohen, ont signé un communiqué qui se conclut ainsi : « C’est la première fois dans l’histoire judiciaire belge qu’un double national obtient d’un tribunal l’ordre de protéger son ressortissant hors de la Belgique. Face au calvaire subi par Ali Aarrass, il était temps que soit rappelé au ministre des Affaires étrangères qu’au XXIe siècle, on ne transige pas avec les droits fondamentaux pour d’obscures raisons, même quand il s’agit de préserver de bonnes relations avec le Royaume chérifien du Maroc ».

Baudoin Loos

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La justice belge va dire si l’Etat belge doit assister Ali Aarrass dans sa prison marocaine

Source
Communiqué de presse du CABINET D’AVOCATS JUS COGENS : Me Dounia ALAMAT (GSM: 32.470.57.59.25 ; da@juscogens.be) – Me Nicolas COHEN (GSM : 32.470.02.65.41 ; nc@juscogens.be) – Me Christophe MARCHAND (GSM: 32.486.32.22.88 ; cm@juscogens.be)

Victory II

 6 février 2014

 Affaire Ali AARRASS : Le Tribunal de première instance de Bruxelles enjoint au Ministre des Affaires Etrangères d’assurer la protection consulaire à son ressortissant, torturé et détenu au Maroc

 Depuis son extradition illégale vers le Maroc[1], le 14 décembre 2010, Ali AARRASS, citoyen belge, clame qu’il a fait l’objet d’abominables tortures.

 Ces actes barbares ont été confirmés dans un courrier de décembre 2012, adressé par le Rapporteur spécial des Nations-Unies contre la torture au Ministre de la Justice marocain, et rendu public en mai 2013[2].

 Tout récemment encore, le Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies avait constaté que « c’est (…) sur la base d’aveux obtenus sous la torture que M. Ali Aarrass (…) a été condamné en novembre 2011 à 15 ans de prison ferme »[3].

 Depuis son incarcération au Maroc, Ali AARRASS sollicite que la Belgique lui prête secours et assistance, au travers de l’aide consulaire.

 

Toutefois, le Ministre des Affaires Etrangères n’a jamais donné de suite favorable à sa demande. Ce 29 janvier 2014, interpellé par la Député Zoé GENOT, le Ministre des Affaires Etrangères a réaffirmé qu’il n’accorderait pas la protection consulaire à son ressortissant[4]. Concernant l’ « assistance humanitaire », il a expliqué qu’elle avait été exercée, sans expliquer les raisons pour lesquelles il estimait pouvoir clôturer son intervention vis-à-vis d’Ali AARRASS, toujours victime d’une peine et de traitements inhumains et dégradants.

 Suite aux refus répétés et injustifiés de lui venir en aide, Ali AARRASS a cité le Ministre des Affaires Etrangères en justice afin de le contraindre à lui apporter l’assistance consulaire.

Victory Dans un jugement historique et courageux de ce 3 février 2014, le Tribunal de première instance de Bruxelles, siégeant en référé, a fait droit à la demande d’Ali AARRASS. Le jugement expose :

 « La protection consulaire vise principalement à la protection des droits individuels à l’étranger. Elle doit être entendue comme un mécanisme visant à ce que les droits reconnus à un individu puissent être effectivement garantis (…)

La protection consulaire est donc de nature à contribuer au respect des droits fondamentaux, comme celui garanti à l’article 3 de la Convention européenne des Droits de l’homme (…)

 Un agent consulaire a le droit de communiquer avec son ressortissant mais ce droit peut se transformer en obligation, en vertu de l’article 1er de la Convention européenne des Droits de l’homme, si une violation à ladite Convention est alléguée et portée à la connaissance de cet Etat (…

 Il n’est pas contestable que ces traitements [torture] ont des répercussions sur l’état de santé mental et physique de M. AARRASS qui nécessiterait un suivi médical, actuellement. Cette seule circonstance justifie l’intervention du tribunal des référés. L’urgence ne peut être déniée lorsqu’une situation, qui est le fait de la violation de règles fondamentales qui ont trait aux Droits de l’homme empire par l’effet du temps (…)

 L’article 4 de la Convention de la Haye du 12 avril 1930 (..) ne règle pas les droits des parties au litige puisque le Maroc n’a pas ratifié ladite Convention (…)

 Prima facie, il n’existe aucune règle de droit international qui contraint l’Etat belge à ne pas intervenir dans le cas d’un binational (…)

 Il n’est pas contesté que l’Etat belge a apporté une intervention consulaire/humanitaire à l’égard de doubles ressortissants dans l’autre Etat de leur nationalité, même si les circonstances de l’intervention de l’Etat sont différentes d’une affaire à une autre (…)

 PAR CES MOTIFS (…)

 Enjoignons à l’Etat belge d’apporter sa protection consulaire à M. Ali AARRASS »

C’est la première fois dans l’histoire judiciaire belge qu’un double national obtient d’un Tribunal l’ordre de protéger son ressortissant hors de la Belgique. Face au calvaire subi par Ali AARRASS, il était temps que soit rappelé au Ministre des Affaires Etrangères qu’au XXIème siècle, on ne transige pas avec les droits fondamentaux pour d’obscures raisons, même quand il s’agit de préserver de bonnes relations avec le Royaume Chérifien du Maroc.

 Le jugement de ce 3 février 2014 est exécutoire.

 La famille, les proches et la défense d’Ali AARRASS espèrent dès lors qu’une visite du Consul belge au Maroc sera rapidement effectuée et que la Belgique prendra enfin ses responsabilités dans cette triste affaire.

 [1] Extradition réalisée par l’Espagne en contrariété avec une injonction du Comité des droits de l’homme de l’ONU du 26 novembre 2010, compte tenu du risque de torture encouru.

 [2] Voir pièce jointe

 [3] « Déclaration lors de la conférence de presse du Groupe de travail sur la détention arbitraire à l’issue de sa visite au Maroc », 18 décembre 2013, http://www.ohchr.org/FR/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=14121&LangID=F (en annexe)

 [4] Chambre des représentants, Commission des Relations extérieures, Réunion du 29 janvier 2014, CRIV 53 – COM 0913

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