Conquérir le désert

Conquérir le désert

De l’actualité du colonialisme

Par Guillermo Kozlowski

Merci beaucoup à Paola Stévenne pour son regard sur ce texte et tant d’autres.

 

Pourquoi insister ? Le colonialisme semble une vieille question. On ne voit plus ces fanatiques, sanguinaires, ignares et ridicules conquistadores espagnols se promener avec leur croix et leurs épées. Les pays du tiers-monde sont indépendants. Ne restons pas esclaves du passé alors, vivons dans le présent, regardons le futur…

Déjà au XIXème siècle la colonisation commence à se présenter elle-même comme l’instant pendant lequel a lieu une rupture. Elle prétend être le point d’inflexion entre l’épuisement d’un monde archaïque et le début du monde moderne, se défend de plus en plus d’être une modalité du pouvoir ; c’est peut-être pour cela qu’elle semble toujours une problématique du passé, un débat déjà clos. C’est peut-être pour cela aussi qu’il faut aller chercher la présence du colonialisme dans une image paradoxale. Non pas les images dépassées de l’évangélisation forcée du XVIème siècle, ou de la lourde administration coloniale du XIXème, mais la « conquête du désert » qu’il n’a cessé de revendiquer à partir du dernier quart du XIXème siècle. Une image qui encore aujourd’hui, peut-être plus qu’à ses débuts, sert de modèle pour la politique « d’aménagement » des territoires et de « gestion » des populations.

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