La Palestine compte sur nous, montrons-lui qu’elle compte pour nous

Depuis deux semaines environ, des évènements douloureux se déroulent en Palestine ou plutôt s’ajoutent à cette longue tragédie coloniale. D’une part, les Palestiniens subissent les attaques répétées des colons en armes dans le quartier de Cheikh Jarrah, à Jérusalem-est, d’autre part, depuis quelques jours aux alentours de l’esplanade des mosquées, ces mêmes Palestiniens subissent les exactions de la soldatesque israélienne qui tente de limiter leur accès aux lieux saints à l’occasion des derniers jours du Ramadan. Tout d’abord, dans le quartier de Cheikh Jarrah en périphérie de Jérusalem où quatre familles palestiniennes sont menacées purement et simplement d’expulsion de leurs maisons dans lesquelles elles vivent depuis 1956. En fait, à l’origine, vingt-huit puis par la suite soixante-dix familles de réfugiés palestiniens chassés de leurs terres lors de la Nakba de 1948 avaient trouvé refuge dans ce quartier à partir de 1956, du temps où la Jordanie administrait ce territoire. De plus, les terrains sur lesquels elles ont bâti leurs maisons leur avaient été octroyés par le gouvernement jordanien avec l’aide de l’UNRWWA. Après que les Israéliens ont envahi Jérusalem-est (la vieille ville arabe) à l’occasion de la guerre de juin 67, des colons ont miraculeusement trouvé des titres de propriété attestant que ces terrains leur appartenaient. L’affaire en était restée là jusqu’à ces derniers jours, fin d’un très long marathon judiciaire. En effet, demain la cour suprême de justice israélienne devait rendre son verdict définitif concernant ces quatre familles en litige depuis les années 70. On retient son souffle.

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Pourquoi les penseurs décoloniaux sont-ils accusés d’antisémitisme ?

Parce que nous avons dissocié l’antisémitisme de la colonialité de la race – ce dont les défenseurs d’Israël se réjouissent en coulisses.

Publié le 9 février 2021 sur vashtimedia.com

Traduction par Sylvie Tout Court

Dans Peau noire, masques blancs (1952), Frantz Fanon – figure majeure du combat anticolonial, psychiatre et philosophe – écrivait au sujet de la condition noire sous régime colonial : « Car le Noir n’a plus à être noir, mais à l’être en face du Blanc. Certains se mettront en tête de nous rappeler que la situation est à double sens. Nous répondons que c’est faux. Le Noir n’a pas de résistance ontologique aux yeux du Blanc ».

Cette description me renvoie à mon ressenti en tant que Juive établie dans le Nord global, dans ce monde qui a vu passer l’Holocauste et la Nakba. Ce n’est pas que les Juifs (et en particulier les Juifs blancs, occidentaux), comme les Africains colonisés, se voient dénier la permission de se définir eux-mêmes de façon indépendante. C’est plutôt que, tout comme le Blanc a besoin du Noir pour se définir, le Juif doit être défini aux yeux des autres.

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‘Etre Noir en Amérique ne devrait pas être une condamnation à mort.’ Qu’en est-il si on est Palestinien ?

|Gideon Levy pour Haaretz |Traduction J.Ch. pour l’AURDIP

Avez-vous vu les policiers américains ? Avez-vous vu comment ils ont tué Geroge Floyd en l’étouffant à Minneapolis ? Avez-vous vu le policier Derek Chauvin s’agenouiller sur son cou, l’immobiliser, Floyd suppliant qu’on le laisse en vie jusqu’à ce qu’il meure cinq minutes plus tard ? Quelles forces de police racistes ils ont en Amérique, comme elles sont brutales ! Maintenant, Minneapolis flambe après qu’un citoyen noir ait été exécuté à cause de sa couleur de peau. Le maire a présenté des excuses, les quatre policiers impliqués ont été renvoyés, Chauvin a été inculpé. L’Amérique est un endroit cruel pour les Noirs et sa police est raciste.

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Ce que la Palestine m’a appris du racisme aux États-Unis

Par Sylvie Laurent, février 2019

Dans une courte vidéo en noir et blanc, les visages bruns d’opprimés en lutte se succèdent et s’entrecroisent, certains portant des dreadlocks et d’autres un foulard ou un keffieh, unis par un même message décliné sur les pancartes : « Arrêtez de nous tuer », « Rendez-nous notre humanité ». Les images de Ferguson (Missouri), où s’est exprimée l’indignation noire face à l’impunité policière, alternent avec celles des territoires occupés. Des Palestiniens affirment « Black lives matter » (« les vies des Noirs comptent »), et des Noirs américains interprètent l’oppression des Palestiniens comme du racisme. Entre eux, des points de rencontre : la compagnie américaine Combined Systems, qui fournit la police de Ferguson en gaz lacrymogène et autres armes de répression, équipe aussi les forces israéliennes d’occupation de la bande de Gaza ou de la Cisjordanie.

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Le lobby israélien dévoilé

On a tous entendu parler à un moment où à un autre d’organisations comme l’AIPAC ou le TIP, sans savoir très bien quel était leur rôle précis. Après avoir mis l’accent en 2016 ? sur les pratiques mafieuses que certains groupes sionistes utilisent en Angleterre1, Al-Jazzera a réalisé un travail exceptionnel en s’infiltrant au sein des organisation sionistes présentes aux EEUU afin de présenter au monde quel est leur modus operandi.

Tout au long des quatre épisodes qui comporte ce reportage, on apprend que :

-le BDS est un outil redoutable qui fait trembler l’entité sioniste.

-pour s’opposer aux sympathisants du BDS ce réseau de lobbying utilise de méthodes criminelles (calomnie, menaces, insultes).

-un des buts du lobby israélien aux EEUU est de faire en sorte que les EEUU soutiennent inconditionnellement l’état colonial israélien (en lui fournissant par exemple de « l’aide militaire» ,qui actuellement est de 38 Billions de dollars).

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Soixante-dix ans de chansons pour la Palestine

Si la chanson est reconnue depuis longtemps comme un écho des opinions populaires, voire comme un instrument de ralliement derrière une cause, dans le cas de la Palestine elle joue un rôle supplémentaire. Ce n’est pas un mystère : l’entreprise de colonisation du territoire palestinien s’est très tôt accompagnée d’une colonisation culturelle qui a  entravé, menacé de disparition, voire totalement nié la culture palestinienne. Dans un tel contexte, les chansons palestiniennes, ou même celles qui « parlent de Palestine », en plus de participer à la lutte proprement dite, constituent en elles-mêmes des actes de résistance, des « preuves de vie », des preuves de créativité d’une population qui ne se laisse pas détruire. C’est cette histoire que nous allons explorer ici.

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Qu’est « faire un film politique »

« Depuis l’invention de la photographie, l’impérialisme a fait des films pour empêcher ceux qu’il opprimait d’en faire. »
Par Jean-Luc Godard

Les convictions pro-palestiniennes de Jean-Luc Godard n’ont cessé d’accompagner son travail cinématographique, ce qui a valu au réalisateur d’être souvent malmené par la réaction. Dans ce texte de 1970, à l’époque la plus militante de l’oeuvre godardienne, il est question de la production d’un film sur les combattants palestiniens dans un camp d’Amman en Jordanie, initialement intitulé Jusqu’à la victoire. Si le « groupe Dziga Vertov » n’a pas exploité ses images, Godard et Anne-Marie Miéville en ont proposé un montage dans le puissant Ici et ailleurs. Ce dernier film a ceci de singulier qu’il interroge la possibilité même de montrer la révolution palestinienne ; il pose le problème du montage, des effets idéologiques des appareils de prise de vue ; il questionne ce qu’est « faire un film politique », ce qu’est un rapport d’images politique. Le texte republié ici a ceci de fascinant qu’il pose une grande partie de ces enjeux, tout en proposant une lecture anti-impérialiste du cinéma et des circuits de diffusion. « Il faut étudier et enquêter, enregistrer cette enquête et cette étude, ensuite montrer le résultat (le montage) à d’autre combattants. Montrer le combat des fedayin à leurs frères arabes exploités par les patrons dans les usines en France. Montrer les miliciennes du Fath à leurs sœurs des Black Panthers pourchassées par le FBI. Tourner politiquement un film. Le montrer politiquement. Le diffuser politiquement. C’est long et difficile. C’est résoudre chaque jour un problème concret. »

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