Belliraj racontée par sa femme.

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L’histoire de Belliraj racontée par sa femme.

par Said Chleuh, jeudi 9 août 2012, 05:03 ·
Je m’appelle Rachida Belliraj, épouse de Abdelkader Belliraj, je suis actuellement au Maroc pour visiter mon mari en prison. Je suis mère de 3 enfants : Anas, Oussama, Yassine. Mon mari est détenu maintenant depuis presque 5 ans. Je vis avec mes enfants en Belgique, à Gand, et nous vivons comme une famille séparée. C’est certainement très difficile pour les enfants. Quand Abdelkader a quitté notre maison pour la dernière fois, le plus petit de nos fils avait 3 ans et demi, aujourd’hui Yassine a 8 ans. Mes autres enfants sont maintenant dans l’âge de l’adolescence. C’est sur, ce n’est pas facile sans leur père, ils ont besoin de lui, mais malheureusement, il n’est pas là, il est détenu ici. On ne peut pas le voir qu’une seule fois par an, pendant les vacances scolaire et sur une durée d’un mois. D’une façon générale, la vie est devenue difficile sans Abdelkader. Et cette détention est incompréhensible, nous ne savons pas pourquoi, on nous fait subir cette séparation entre un père et ses enfants. Le dossier judiciaire avait déjà été traité avant l’arrivée du nouveau gouvernement et avant que Ramid soit devenu ministre de la justice.Ramid, avocat, était parmi les personnes qui défendaient le dossier Belliraj et ce qu’on appelle ici « les six politiques ». J’avais de l’espoir car Ramid est parmi ceux qui connaissent le mieux le dossier, et une fois ministre de la justice, nous espérions qu’il règle cette situation intolérable. On avait cet espoir qu’avec l’arrivée de ce nouveau gouvernement, et avec Ramid comme ministre de la justice, qu’il y allait avoir une amélioration dans ce dossier. Quand nous voyons toutes les déclarations de Ramid, au temps de la lutte pour la libération des « six politiques », et la manière dont il a parlé à Merouani : « Attention à ne pas oublier le groupe qui reste en prison derrière toi. il faut tout faire pour pour que le reste des détenus retrouve la liberté. »Ces propos, vous pouvez les retrouver sur Youtube. On a été surpris à notre arrivée au Maroc, dans sa réaction vis-à-vis des femmes des détenus, que le dossier Belliraj n’est pas sa priorité pour le moment, et qu’il reportera à l’année prochaine car il  n’a pas de temps libre. C’est sur, on est désagréablement surpris.C’était une déception, on a été déçu. On imaginait vraiment mieux, on était optimiste avec ce nouveau gouvernement au pouvoir. C’est vrai qu’au début nous étions contents. Mais aujourd’hui, nous sommes extrêmement déçus des déclarations de Ramid…

Abdelkader Belliraj est affaibli physiquement, car il a entamé une grève de la faim pendant un mois, juste avant notre arrivée au Maroc. Du point de vue de sa corpulence, il a perdu pas mal de kilos. Mais Dieu Merci, il y a eu l’intervention de M. Khadija Rouissi. Elle a pu le voir en prison et le convaincre d’arrêter, ou du moins de suspendre sa grève. J’étais contente lorsque je suis arrivée car il ne faisait plus de grève. En ce qui concerne ces 5 ans de détention, est-ce qu’il y a eu un changement, une amélioration dans ce dossier ?

Tout d’abord, Abdelkader à été arrêté à Marrakech et non à l’aéroport comme nous l’avions pu entendre de la bouche des médias et du ministre de la justice. Abdelkader a été enlevé dans un café et a disparu pendant un mois. Nous l’avons cherché partout : dans les commissariats, dans les hôpitaux, mais en vain ! C’est par les médias et par intermédiaire du ministre de l’intérieur que nous avons appris qu’Abdelkader avait été incarcéré. Il a été enlevé, puis torturé. La famille a encaissé le coup, nous ne savions pas où était Abdelkader et le pourquoi de sa disparition.

Du jour au lendemain , Abdelkader est devenu l’ennemi publique numéro 1 au Maroc , et cette affaire , l’affaire du siècle !!! Le ministre de l’intérieur a sorti des informations , aux médias avant même que Abdelkader ne soit présenté devant un juge !!! Dans une violation flagrante du secret de l’instruction …..puis quand une question lui a été posée sur ce détail, il a simplement répondu que ce n’était qu’un détail futile et sans importance.

Bien que dans un véritable état de droit, c’est une violation flagrante des procédures judiciaires…Avant qu’Abdelkader soit présenté à la justice, avant toute enquête, des informations vraies et fausses se retrouvaient dans la presse. Après un an de procès, plus d’une centaine de séances, Abdelkader a été condamné à vie en première instance, qui a été confirmé en appel.

Dès ce moment, ma maison est devenue la destination prisée des médias belges et marocains et parmi eux la deuxième chaine. J’ai même été poursuivie par les médias en voiture lors de la conduite de mes enfants à l’école pour une déclaration. Ils m’ont demandé cette déclaration en face de l’école, devant tous les parents. J’ai refusé. C’était honteux, et ils ont continué ! Un lynchage médiatique sans aucun précédent !  Vingt années de vie avec Abdelkader et je n’avais jamais rien vu de tel ou ressenti quelque chose qui pouvait amener à la situation actuelle.  Abdelkader qui a vécu 40 années en Belgique, n’a aucune relation avec cette soit disant « affaire Belliraj » !

Rachida Belliraj
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