Le sionisme en crise : la résistance palestinienne ouvre un nouvel horizon

Par Palestinian Youth Movement

Trop longtemps, le mouvement mondial de solidarité n’a perçu les Palestiniens que comme des victimes de la violence israélienne. Le contexte actuel nous invite à remettre en question la pérennité du projet sioniste et à réévaluer notre lutte.

Au cours des dernières semaines, des événements importants sont survenus dans la Palestine historique.

Le 7 janvier 2023 a marqué le début des manifestations sionistes en réponse aux réformes judiciaires proposées par Israël. Parallèlement, nous avons également assisté à une intensification de la violence coloniale perpétrée par l’entité sioniste à l’encontre des Palestiniens : le mois de janvier a été le plus meurtrier en Cisjordanie depuis près d’une décennie, et les dernières semaines ont été marquées par une violence accrue à l’égard des Palestiniens à Al-Aqsa.

En réponse à ces agressions, nous avons assisté à une intensification des efforts de résistance de la part de groupes à travers la Palestine historique, ainsi qu’au Liban et en Syrie.

Illustration : via The New Arab

Alors que les médias peuvent vous faire croire que ces événements sont politiquement, géographiquement et temporellement isolés, ils racontent une histoire collective de développements significatifs dans la lutte de libération palestinienne.

Il est facile de rejeter les protestations sionistes contre les réformes judiciaires comme étant sans intérêt pour les Palestiniens, pour qui l’assujettissement à la violence israélienne persiste quel que soit le gouvernement.

Bien que cela soit vrai, l’aggravation des contradictions au sein du mouvement sioniste mondial reflète les fondations pourries sur lesquelles l’État sioniste a été construit et la tension qui en résulte entre sa base fasciste sous-jacente et la surface superficielle de la démocratie que l’entité projette au monde.

Ces tensions révèlent la nature artificielle de la colonie sioniste : si tous les colons sont unis contre la menace extérieure de la résistance palestinienne et en faveur de l’ordre social colonial, il n’y a pas grand-chose d’autre qui les lie politiquement ou qui les maintienne ensemble.

Dans le même ordre d’idées, il convient de noter que c’est par les excès du projet de colonisation, par la colonisation et l’exploitation du peuple palestinien, que le sionisme cherche à résoudre ses contradictions internes.

Des Palestiniens d’Israël participent à Umm al-Fahm, à la « Marche du retour » organisée le jour anniversaire de la Nakba, c’est-à-dire l’expulsion violente et la dépossession de la population autochtone de la Palestine, pour faire place à l’entité sioniste – 9 mai 2019 – Photo : Ahmad Gharabli
 

Ainsi, la tentative de construire un schéma simpliste entre « citoyen » et « colon » – un schéma dans lequel sa branche « libérale » cherche parfois à se distancier du fascisme du mouvement de colonisation – doit être remise en question. Nous soutenons que les deux existent en relation l’un avec l’autre et, plus important encore, en relation avec le colonialisme sioniste.

Le mouvement des colons sionistes fait depuis longtemps partie intégrante de l’expansion de l’État sioniste : l’État par lequel les sionistes libéraux ont exercé leur pouvoir et au sein duquel ils exercent la « démocratie » pour laquelle ils prétendent aujourd’hui se battre.

En refusant d’aborder cette question en termes de « démocratie » contre « fascisme » et en interrogeant plutôt la relation de cette contradiction avec le colonialisme, nous sommes en mesure de comprendre le rôle de la résistance et de l’unité palestiniennes dans la disparition inévitable du projet sioniste.

Si ce sont les intérêts du mouvement fasciste des colons qui sont représentés par les réformes judiciaires proposées par le gouvernement de coalition, ce sont également leurs intérêts qui sous-tendent la violence croissante à Al-Aqsa.

Nombreux sont ceux qui ont rapidement souligné, à juste titre, que les assauts actuels contre Al-Aqsa sont des cas d’école : la violence israélienne à l’égard des Palestiniens s’intensifie chaque année pendant le Ramadan, que ce soit par des invasions d’Al-Aqsa ou des bombardements sur Gaza.

Cependant, la violence envers les Palestiniens augmente également pendant les fêtes juives, et cette année, la Pâque, Pâques et le Ramadan ont lieu en même temps.

La violence accrue doit donc être lue comme telle : comme la manifestation d’un État extrémiste qui cherche à imposer une nouvelle réalité, une réalité qui se rapproche du démantèlement d’Al-Aqsa dans l’espoir de construire le « temple de Salomon » au sommet de celle-ci.

S’il est vrai que le mouvement qui insiste pour entrer dans Al-Aqsa pendant la Pâque est une communauté qui a été isolée des sionistes « pro-démocratie », ces rêves de convertir Jérusalem en une ville d’une seule foi sont beaucoup plus larges dans la société sioniste, révélant une fois de plus la relation symbiotique entre les courants apparemment contradictoires du sionisme lorsqu’ils sont placés dans son cadre colonial plus large.

Face au sionisme en crise, les Palestiniens se sont unis et rassemblés autour d’efforts de résistance accrus dans toute la Palestine historique, en s’appuyant sur l’héritage des soulèvements de l’Unité de 2021.

Alors que les soulèvements de mai prenaient de l’ampleur, un chant commun résonnait de Haïfa à Ramallah : mishan Allah, ya Gaza yalla (pour l’amour de Dieu, venez à Gaza).

Pour la première fois de mémoire d’homme, les villes de l’intérieur, terres conquises en 1948, dirigeaient un soulèvement au lieu de le soutenir. Les jeunes de la communauté, forte de deux millions d’habitants, se sont révoltés contre les incursions répétées des forces de police dans Al-Aqsa.

Des bus en provenance de dizaines de villes palestiniennes sont descendus à Jérusalem, et la police a été dépêchée pour bloquer les rues principales. Les images dramatiques de personnes âgées choisissant de marcher à pied et de contourner les points de contrôle ont cristallisé l’unité entre deux régions que les politiques sionistes ont tenté de fragmenter pendant 75 ans.

Lorsque la résistance est entrée en lice, Gaza, isolée et assiégée, a répondu à Jérusalem et s’est imposée aux calculs de Tel-Aviv.

À peu près au même moment, à Jénine, le martyr Jamil Alamoury, âgé de 25 ans, et ses camarades se sont regroupés au sein du bataillon de Jénine, entamant un nouveau chapitre de la confrontation qui prend l’environnement urbain local comme zone d’opération et le berceau populaire comme bouclier.

De petites unités de résistance ont commencé à se former dans toute la Cisjordanie et occupent aujourd’hui près de 60 % des forces d’occupation. Lorsque Gaza peut garantir la guerre, l’intérieur et Jérusalem un soulèvement, et la Cisjordanie une guerre d’usure et de résistance populaire, le coût de l’impunité sioniste devient insupportable.

Le peuple palestinien possède aujourd’hui quelque chose qu’Israël s’est efforcé de démanteler : l’unité et l’optimisme révolutionnaire.

Les soulèvements de mai 2021 se sont fondus dans l’approche de « l’unité de tous les fronts », et nous assistons actuellement à la transformation de ce slogan en une réalité politique. En particulier, nous assistons à l’extension de cette notion au Liban et à la Syrie.

15 avril 2022 – Les troupes israéliennes d’occupation envahissent l’esplanade des Mosquées et la mosquée al-Aqsa, terrorisant et maltraitant les fidèles – Photo : via MintPressNews
 

En réponse à la répétition des exactions commises en 2021 sur les fidèles d’Al-Aqsa, les organisations palestiniennes opérant au Liban et en Syrie ont lancé à deux reprises, la semaine dernière, des barrages de roquettes sur le nord de la Palestine.

Les manifestations se multiplient dans les villes de 48 et les bataillons de Cisjordanie redoublent d’efforts.

Les dirigeants sionistes ont choisi d’attaquer Gaza en réponse, confirmant que les politiques d’endiguement et d’isolement ont échoué et que « l’unité de tous les fronts » prévaut.

Pour la première fois de mémoire d’homme, c’est l’entité sioniste qui a agi avec retenue, s’empressant d’absoudre les acteurs régionaux du Liban et de la Syrie du rôle qu’ils jouent indubitablement dans le soutien à la résistance palestinienne.

Le régime sioniste a également veillé à ce que ses bombardements sur Gaza évitent de lourdes pertes en vies humaines et en biens de la résistance.

Le 10 avril, des journalistes israéliens ont confirmé que les forces d’occupation avaient cessé d’utiliser le nom « Opération briser la vague » pour décrire leurs tentatives d’étouffer la résistance palestinienne en Cisjordanie, reconnaissant ainsi implicitement que les groupes de résistance palestiniens étaient là pour rester.

Le 11 avril, M. Netanyahu a annoncé que les colons ne pourraient pas entrer à Al-Aqsa pendant la durée du Ramadan, par crainte d’une montée des tensions à Jérusalem. Ces exemples illustrent collectivement le manque de confiance de l’entité sioniste dans ses calculs répressifs face à la force de la résistance palestinienne aujourd’hui.

Les défenseurs de la Palestine ne doivent jamais oublier la vérité que cela révèle : les jours de l’invincibilité de l’entité sioniste sont révolus, et c’est la persistance et l’accumulation de la résistance palestinienne qui ont permis d’en arriver là.

Pendant trop longtemps, la diaspora palestinienne et le mouvement mondial de solidarité ont été paralysés par une position réactive qui considère que les Palestiniens ne sont que des victimes de la violence israélienne.

Cependant, ce moment nous invite à remettre en question l’invincibilité du projet sioniste et à réévaluer les outils de notre lutte. Aujourd’hui, nous pouvons affirmer que le projet sioniste est plus fragile qu’il ne l’a jamais été.

Dans le même temps, la résistance palestinienne n’a jamais été aussi forte. Le changement global auquel nous assistons actuellement reflète le potentiel d’un changement de paradigme dans ce cadre : nous sommes victimes de leur violence, mais nous sommes également capables de prendre notre destin en main.

Dans la diaspora, cela signifie rejoindre des organisations pour construire un pouvoir transnational et s’engager dans une lutte fondée sur des principes pour rendre réelle la promesse de libération.

16 avril 2023 – Mondoweiss – Traduction : Chronique de Palestine

Spread the love

Laisser un commentaire