C’est avec Véronique Clette-Gakuba, sociologue à l’ULB, que nous avons essayé de poser quelques bases, pistes, orientations en vue de créer cet espace rédactionnel. ITECO a ensuite sollicité quatre personnes, militant.e.s décoloniaux issus des diasporas africaines, et les a invité.e.s à participer à deux rencontres de 3 heures en février et en mars 2021. Nous tenons à les remercier très chaleureusement ici. Ces quatre invité.e.s étaient, en plus de Véronique Clette-Gakuba, Doum Memdé (Collectif Présences Noires), l’acteur François Makanga, la cinéaste Monique Mbeka Phoba et l’activiste Nordine Saïdi (Bruxelles Panthères).
Fragments de la tradition afro-critique pour les sciences sociales
Le décentrement
États-Unis 1895. Les Blancs sont obligés de considérer sérieusement les luttes et les revendications des Noirs. Ils mettent alors en place le Compromis d’Atlanta, une résolution tacite des Blancs du Sud qui promettait de développer les noirs. Ceux-ci doivent désormais bénéficier d’une éducation de base, des opportunités économiques et une égalité judiciaire. Mais en contrepartie, ces mêmes Noirs doivent continuer à se soumettre aux discriminations, à la ségrégation, à l’exclusion du droit de vote et à l’interdiction du travail syndiqué (Harlan, 1972). Ainsi, la promesse de décoloniser les Noirs est remplacée par celle de les développer, ce qui a permis de les coloniser davantage et de manière beaucoup moins conflictuelle.
Une voix décoloniale en Flandre
Nadia Nsayi, Belgo-congolaise, politologue, activiste et auteure du livre ’Dochter van de dekolonisatie’ – fille de la décolonisation – , s’exprime sur l’origine de son engagement pour le décolonial, ses expériences dans le secteur de la coopération au développement, l’exposition « 100 x Congo » au MAS à Anvers, où elle est curatrice, la politique et le mouvement décolonial en Flandre.
Elargir les analyses par la lutte décoloniale
Françoise Vergès sur le féminisme décolonial ; ces propos ont été recueillis par Rachida Kabbouri et Joris De Beer. Tout au long de cet entretien, Françoise Vergès analyse la situation actuelle au regard du passé esclavagiste et de cette colonialité bien présente dans toutes les structures de sociétés européennes. Elle est critique par rapport au féminisme civilisationnel, occidental et bourgeois, qui se donne comme rôle d’émanciper les femmes racisées. En effet, elle critique le fait que, dans sa lecture de ce type de féminisme, il faut sauver du patriarcat les femmes du Sud ainsi que celles issues des minorités au Nord. Cet article nous invite à nous questionner, à lutter contre nos propres représentations et à nous décentrer afin de prendre conscience de nos automatismes.
Moïse Lamine Bangoura : Innocence raciale et négrophobie judiciaire.
Le meurtre de Lamine Bangoura par 8 policier.ère.s ne connaîtra pas de procès public. Les « parties civiles » sont condamnées à payer des dommages aux policiers.ère.s. Vingt-cinq pages de l’Arrêt de la Chambre des Mises en accusation (Cour d’Appel de Gand, Arrêt 2020/12/95, 16/03/2021) motivent le non-lieu. Cette impunité s’y articule comme un site d’une construction active de blanchité, mécanique de silences assassins où, à aucun moment, la vie de Lamine ne compte.
Ce que veut dire Apartheid dans le cas d’Israël
Par Tareq Baconi, le 5 novembre 2021
Un consensus croissant s’est formé autour du terme — non comme une comparaison rhétorique avec l’Afrique du Sud, mais pour décrire un système de domination construit sur la partition de la Palestine.
SUR LES TRACES DES BLACK PANTHERS À ALGER
Kareem El Hidjaazi, auteur du livre « Nègres & islamistes, les convergences d’une lutte culturelle » poursuit ce numéro par un article sur le mouvement révolutionnaire de libération afro-américaine : les Blacks Panthers. En 1962, l’Algérie ouvre ses portes aux damnés de la terre et offre son soutien aux groupes de libération présents à travers le monde, Alger devient l’épicentre des mouvements anti-impérialiste. L’auteur nous invite à découvrir un pan de l’histoire méconnu, le lien entre le parti des Blacks Panthers et l’Algérie riche d’une expérience révolutionnaire et anticolonialiste. Tout au long de cet article, Kareem El Hidjaazi met en évidence les soutiens et la solidarité entre différents mouvements pour qu’une convergence des luttes soit possible.
Une histoire en images de la solidarité entre noirs et Palestiniens
Depuis les années 1960, noirs et Palestiniens ont fait cause commune en s’opposant à l’impérialisme et au racisme.
Salam Awad, 18 octobre 2021
La solidarité entre noirs et Palestiniens était une composante remarquable du mouvement Black Lives Matter (BLM) apparu en 2014. L’intersection de l’activisme noir et de l’activisme palestinien n’est pas un phénomène nouveau, bien sûr, mais plutôt la réapparition d’une alliance historique enracinée dans le combat mondial contre le racisme et l’impérialisme.
Dissolution validée du CCIF : les Musulmans ne sont toujours pas la Nation
Très rapidement, la machine politique s’emballe. Les déclarations des responsables publics fusent, le Gouvernement se mobilise, le Président de la République se rend même sur place.
Il semblerait qu’il s’agisse d’un énième attentat commis par un Musulman. Il faut des réponses, fortes et rapides, pour affirmer l’autorité de l’État.
Trois jours plus tard, le Ministre de l’intérieur propose la dissolution du CCIF, et de BarakaCity, « associations ennemies de la République » selon lui.
Le dévoilement des femmes comme obsession coloniale française. Relire Fanon
La mise en scène du dévoilement d’une femme musulmane sous les encouragements du symptomatique Éric Zemmour a sans surprise « fait le buzz » : elle a amplement circulé et elle a mobilisé les passions collectives. Si elle apparaît comme un remake des cérémonies de dévoilement des femmes à Alger en mai 1958, l’obscénité s’en trouve décuplée par le rapport pornographique aux images caractéristique de notre époque[1]. Voir et revoir, donner à voir, jusqu’à épuiser l’excitation.
De toute évidence, et il n’a pas fallu attendre l’orchestration de CNews dans les rues de Drancy pour s’en convaincre, le « foulard » continue d’agir comme signifiant – un signifiant spécifiquement français – dont le sens et la fonction sont à trouver dans l’histoire coloniale du pays. C’est la raison pour laquelle nous choisissons de mettre à disposition un court extrait de l’ouvrage de Frantz Fanon rédigé en 1959, L’an V de la Révolution algérienne (Éditions La Découverte, rééd. 2011).